Valeria Bruni-Tedeschi sera bien seule. L'actrice/réalisatrice est la seule femme à avoir un film en compétition lors du 66e festival de Cannes dont la direction a dévoilé ce matin la sélection officielle. Du 15 au 26 mai prochain, Valéria Bruni-Tedeschi tentera de convaincre le jury présidé par Steven Spielberg d'attribuer à "Un château en Italie", dans lequel elle donne la réplique à Louis Garrel et Xavier Beauvois, la Palme d'or parmi les 18 autres films en compétition, qui ont un point commun : ils ont tous été réalisés par des hommes ! Et la partie sera difficile pour la soeur de Carla Bruni puisqu'elle sera confrontée à de nombreux cinéastes déjà primés à Cannes comme Steven Soderbergh, Roman Polanski, les frères Coen, Nicolas Winding Refn ou d'autres habitués qui sont toujours passés au travers du palmarès comme James Gray, Arnaud Desplechin ou François Ozon.
Une situation qui a agacé l'association féministe La Barbe qui rappelle toutefois qu'en 2012, la totalité des 22 films de la compétition était réalisée par des hommes. Une situation qui avait été largement dénoncée. Dans un communiqué, ce collectif qui fait des happenings barbus dans les endroits trop machos, dénonce la "performance" des organisateurs qui se situe "dans la lignée de décennies de sexisme". "Les justifications ineptes des grands Messieurs du Festival entendues en 2012 laissent présager le pire en 2013. 'Mais comment, mais regardez les titres des films de la sélection officielle et voyez comme nous aimons, nous adooorons les femmes ! "La Vénus de Fourrure", "Jeune et Jolie", "La vie d'Adèle", "La grande Bellezza", voyez on ne parle que de vous, mes chéries'", ironisent-elles.
Ce matin, lors de sa conférence de presse, la direction du Festival de Cannes a nié faire preuve de machisme : "Nous ne préjugeons pas la qualité (des oeuvres) en fonction de ce qu'elles sont faites par des hommes ou des femmes, a déclaré Thierry Frémaux, le directeur général du Festival en réponse à une question d'une journaliste de Slate. Comme citoyens, nous sommes attachés à la parité, mais comme sélectionneurs cannois nous cherchons simplement la meilleure compétition possible. Le problème n'est pas au Festival de Cannes. Le problème est dans les écoles de cinéma, dans la manière dont on peut permettre à de jeunes cinéastes, quand elles en sont au stade du scénario, d'exprimer leur sensibilité. Nous avions dit l'année dernière que ce n'était pas à Cannes et une seule fois par an qu'il fallait se poser la question, mais partout et toute l'année."
Certes, les femmes réalisatrices sont moins nombreuses que les hommes. Mais le collectif La Barbe relève que les réalisatrices sont 5 (sur un total de 14 films) dans la sélection un Certain Regard, preuve qu'un effort aurait pu être fait. "Un certain regard pour les femmes, aux hommes la vision (et la sélection) officielle", s'insurge le collectif.
A ce jour, la seule femme à avoir décroché la Palme d'or est l'Australienne Jane Campion pour son film "La Leçon de piano" en 1993. Depuis 1946, une seule femme a décroché le prestigieux prix de la mise en scène : la Russe Yuliya Solntseva en 1961. La situation est similaire aux Oscars : en 85 éditions, seule Kathryn Bigelow a été plébiscitée comme meilleure réalisatrice en 2010 pour "Démineurs". Aux César, l'heureuse et unique élue, en 38 éditions, est Tonie Marshall, primée en 2000 pour "Vénus beauté (institut)".