Opération légitimation. Le mois dernier, à la surprise générale, Guy Lagache était nommé par Sibyle Veil directeur des antennes et de la stratégie éditoriale de Radio France, en remplacement de Laurent Guimier, parti pour Europe 1 et ce alors qu'il n'avait jusqu'à présent aucune expérience de l'univers radiophonique. Pour tenter de faire taire les mauvaises langues, Guy Lagache a accepté les sollicitations de deux quotidiens, "Libération" et "Le Monde", qui lui consacrent chacun un long portrait ce lundi, jour de sa prise de fonctions.
Les deux journaux s'attellent à retracer le parcours du journaliste. Où l'on apprend par exemple dans "Libération" que lui-même a été surpris de se voir proposer le poste de numéro 2 de la Maison ronde. Le journal de gauche rapporte que, lorsque Guy Lagache s'est rendu à Radio France au mois d'avril, il pensait se voir confier une nouvelle émission. "Poser la question de mon arrivée n'est pas totalement incongru", approuve-t-il, tout en regrettant un peu plus loin que "sous prétexte que l'on ait fait un média, on ne (puisse) pas aller dans un autre".
"Libération" et "Le Monde" s'intéressent tous deux à la personnalité de Guy Lagache, jugée difficile en coulisses. "C'est mon pire cauchemar professionnel", se souvient un journaliste anonyme cité par le journal du soir, qui décrit son confrère comme quelqu'un de "tyrannique". Toujours dans "Le Monde", Emmanuel Chain, qui l'a précédé à la présentation de "Capital", le décrit ainsi : "Ce n'est pas du tout le beau gosse de la télé, c'est d'abord quelqu'un qui aime aller au bout des choses".
Son ancien patron à M6, Nicolas de Tavernost, ne dit pas mieux dans "Libération" : "De temps en temps, je me fritais avec lui. Vous savez que je suis vigilant sur la pub, sur les sujets qui concernent les clients de M6. Il était très soucieux de l'indépendance de sa rédaction", dévoile le dirigeant. Pour lui, Guy Lagache est "assez content de lui. Maniaque, obsessionnel. Il fait refaire les sujets douze fois". Des boîtes de production gardent même "un souvenir amer" de leur collaboration avec l'ancienne figure de M6 et de C8 selon "Le Monde".
Pour le quotidien fondé par Hubert Beuve-Méry, "Guy Lagache est surtout le pari du média global à l'heure de la réforme de l'audiovisuel public". "J'avais besoin d'un profil télé à côte de moi. Créer la surprise n'est pas mauvais pour les équipes. Il est cultivé, fin, sympathique, travailleur", estime pour sa part la présidente de Radio France dans "Libération", dans un joli contre-pied à la personnalité difficile décrite par les deux journaux. Et le quotidien de gauche de conclure : "On est incapable de prédire s'il se fera accepter dans cette entreprise si particulière ou s'il se plantera dans six mois".