Toute la journée, Jean-Jacques Bourdin, matinalier sur RMC, est l'invité exceptionnel de puremedias.com. Le journaliste raconte dans son livre ("L'homme libre", Ed. Cherche Midi) les coulisses de ses entretiens quotidiens à la radio, sa vision du journalisme et du rapport de certains médias aux politiques. Il défend aussi son modèle, celui de donner la parole aux auditeurs, quotidiennement. Deuxième partie de cet entretien consacrée à la "marque" Jean-Jacques Bourdin.
> La P1 : "Je fais ce que je veux, c'est moi qui décide, voilà ma liberté"
Propos recueillis par Julien Bellver et Benoît Daragon.
puremedias.com : "Jean-Jacques Bourdin" est-il devenu une marque ?
Jean-Jacques Bourdin : Mais bien sûr ! Ca fait partie du jeu. Ici, dans notre groupe, tout est très personnalisé. Regardez aux Etats-Unis comment ça marche.
C'est à double tranchant. Aujourd'hui, ça marche bien pour vous. Mais quand ce sera moins le cas, vous serez en première ligne...
Je m'effacerai. Le jour où je n'aurai plus cet enthousiasme ou la forme physique, je m'arrêterai.
Mais vous dites que vous êtes en contrat à vie...
Oui, enfin, je suis salarié, en CDI ! Je n'ai pas d'actions, ce qui est regrettable d'ailleurs quand on voit comment elle a progressé.
La matinale de RMC est-elle devenue aujourd'hui incontournable pour les hommes politiques ? Ou, comme vous le racontez dans votre livre, certains ne répondent toujours pas à vos demandes...
Certains ne viennent pas encore. Arnaud Montebourg refuse de venir depuis que j'ai retranscrit certains de mes SMS dans mon livre. Christiane Taubira ne daigne même pas répondre, ce qui est d'une impolitesse totale. Elle ne veut pas venir parce qu'elle estime qu'on est trop pro-Valls ! Ce qui montre une analyse politique d'une finesse absolument remarquable...
Elle est rare partout, tous les journalistes font ce constat...
Mais il va falloir un jour ou l'autre qu'elle vienne expliquer sa politique ! Je veux bien qu'on fuie les interventions médiatiques mais il est logique qu'elle aille expliquer son action aux citoyens ! Elle est en mission, au service de qui ? Des citoyens ! Je suis assez d'accord quand certains disent qu'il ne faut pas aller se mélanger avec d'autres dans des émissions de divertissement, comme chez Ruquier le samedi soir par exemple. C'est un mélange des genres qui participe à la confusion actuelle. J'éprouve aussi les pires difficultés à faire revenir Jean-Marc Ayrault, avec qui cela s'est pourtant bien passé leus deux premières fois. Il a peur que cela soit trop rude, me dit-on.
Cela vous plaît, non ?
Oui, j'aime quand ils ont peur que cela soit rude. Cela prouve qu'on fait bien notre job. Mes interviews politiques ne sont pas toujours bonnes. J'ai souvent des doutes, sur les questions posées, le choix des invités. Mais je sais au moins que je vais essayer d'aller au fond des choses, dans tous les cas je travaille pour ça.
Vous avez souvent des doutes ? L'autocritique, vous ne la pratiquez pas beaucoup dans votre livre...
Je ne me regarde jamais et je ne m'écoute jamais. Pas d'autocritique, non, mais des doutes en permanence.
Vos collaborateurs peuvent s'en charger ?
Il leur arrive de me dire que j'aurais pu poser certaines questions. Après... (il réfléchit).
Après, c'est vous le boss...
Oui, c'est moi le boss ! Je suis face à face en interview, c'est moi qui m'engage, ma crédibilité, sans oreillette, sans filet. Je n'ai aucun stress, ce qui est une chance merveilleuse. Des doutes oui mais le stress, je ne sais pas ce que c'est.
On vous imite beaucoup. "Les Guignols" vous font rire je crois...
Ils me font hurler de rire, j'adore.
Et Nicolas Canteloup ?
Beaucoup moins. Ce que je déteste, ce sont les rires forcés autour de lui. Ils sont obligés de rire ! Où est leur liberté ? Je plains celles et ceux qui travaillent à ses côtés, obligés de rire quand ce n'est pas drôle. Jamais on pourrait me forcer à rire.
Et quand il vous imite ?
Sur le plan de l'humour, je trouve ça très moyen. Ce que je n'aime pas, c'est sa façon de considérer que RMC est une radio de comptoir. RMC, c'est autre chose. D'autant plus que sur Europe 1 il y a des auditeurs de RMC et vice versa. Il méprise les deux, ça m'a fait du mal pour mes auditeurs. Je veux rappeler à Nicolas Canteloup qu'il est peut-être encore devant moi selon les audiences radio Médiamétrie... Mais si on ajoute l'audience de RMC et de BFMTV, je suis devant lui sur sa demi-heure ! Et je veux aussi lui faire remarquer que depuis douze ans, je suis en progression permanente avec une interview politique alors que lui est dans le registre de l'humour.