Nouvel anniversaire pour Laurent Gerra. Ce mercredi 4 mars, de 9h à 10h, l'imitateur proposera une émission exceptionnelle sur l'antenne de RTL à l'occasion de sa 3000e chronique dans la matinale de la station. Pour marquer le coup, Laurent Gerra sera entouré de Michel Drucker, mais aussi de plusieurs animateurs de RTL comme Stéphane Bern, Alba Ventura, Pascal Praud, ou encore Caroline Dublanche. Sa complice au quotidien, Jade, sera bien également de la partie, tout comme Yves Calvi, l'animateur de la matinale de la radio du groupe M6. A quelques heures de cette 3.000e, puremedias.com a rencontré Laurent Gerra.
Propos recueillis par Benjamin Meffre.
puremedias.com : A quoi va ressembler votre 3.000e chronique sur RTL ?
Laurent Gerra : Il y a des choses que je ne maîtrise pas car j'ai demandé à ce que l'on me fasse des surprises. Ce que je peux vous dire, c'est que cette émission va durer une heure et sera en public, ce qui est rare. Elle sera également filmée, ce qui est encore plus rare car je n'aime pas trop cela d'habitude. Je vais en profiter pour faire revenir des copains, comme Jean-Jacques Peroni (l'un de ses auteurs historiques, ndlr). Nous avons aussi écrit des sketchs spéciaux avec des animateurs de RTL comme Alba Ventura, Caroline Dublanche et Yves Calvi. Et puis il y aura aussi Michel (Drucker, ndlr), qui a été sur RTL pendant de nombreuses années. Je ne pouvais pas faire quelque chose sans lui.
Avec Jacques Martin, il s'agit de votre deuxième parrain dans le métier ?
Oui, je dis toujours que j'ai deux "papas de télévision" : Jacques Martin et Michel Drucker.
Vous êtes sur RTL depuis 18 ans. Pourquoi une telle fidélité à cette station ?
J'aime bien l'ambiance à RTL. J'aime cette complicité que j'ai avec les gens de la rédaction, avec qui j'ai fait plusieurs soirées politiques. J'ai fait trois radios dans ma vie : France Inter, Europe 1 et RTL. C'est vraiment sur RTL que j'ai le plus de liberté.
"Je vais faire rentrer une nouvelle voix"
Après trois ans de présidence Macron, trouvez-vous le personnel politique toujours aussi fade ?
Attention, je les trouvais fades dans les voix, pas dans les faits ! En la matière, ils nous surprendront toujours (rires) Prenez quelqu'un comme Edouard Philippe. Il est dur à imiter car la voix est un peu lisse. Sa voix manque de ce qu'on appelle dans notre jargon la prosodie, c'est à dire de musicalité. Le nouveau personnel politique manque aussi de personnalités aussi fortes que Jacques Chirac ou Georges Marchais. Nous avons Jean-Luc Mélenchon, cela aide un peu. Mais regardez le nouveau ministre de la santé par exemple, Olivier Véran, ce n'est pas facile. Je vais cependant faire rentrer une nouvelle voix très bientôt.
Un politique ?
Non, mais quelqu'un dans l'actualité. Ce sera une surprise. Je ne peux pas encore vous le dire
Comment sont créées vos chroniques au quotidien ?
Je les écris avec trois auteurs : Pascal Fioretto, Stéphane Rose, Jérôme de Verdière. Nous sommes aidés par mon réalisateur, Jérôme Laverdin, qui s'occupe de l'habillage sonore. On se marre et on s'amuse beaucoup. Nous nous retrouvons souvent le dimanche soir. S'ils ont bien travaillé, je leur paye l'apéro (rires). On discute des thèmes que nous pourrions évoquer pour la semaine à venir. Je les ai ensuite régulièrement dans la semaine par téléphone. Ils m'envoient leurs textes que je ne retouche pas généralement.
Regardez-vous ce que font les autres imitateurs ?
Non, pas trop, sauf quand je tombe dessus. Je respecte ce qu'ils font, mais je ne veux pas être influencé.
En 2019, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes avait épinglé vos chroniques. Est-ce que cela a changé votre façon de travailler ?
Ah non, au contraire, cela nous a motivés (rire) ! Plus sérieusement, nous sommes dans un contexte satirique et nous avons un droit à la satire en France, tant que ce n'est pas de la diffamation. Nous partons toujours d'une information vérifiée et vérifiable.
Vous êtes souvent attaqué en justice ?
Non, à part par Marine Le Pen et ses camarades. Mais ils sont très procéduriers, il faut dire (rires).
"Ce qui est insupportable, c'est la bêtise des réseaux sociaux"
Vous surveillez vos audiences à la radio ?
Non, pas trop. Je n'aime pas être rivé sur ce genre de choses. Après, on est toujours content quand on sait que ça a marché.
Il y a peu de personnages féminins dans vos imitations. C'est un regret ?
Je vais encore me faire engueuler par le Haut Conseil (rires). Non, plus sérieusement, je n'ai pas la tessiture pour, tout simplement. Je ne fais que de rares évocations, comme Céline Dion ou Brigitte Macron.
"Je ne suis pas de mon époque", disiez-vous au début des années 2000. En 2020, le constat est toujours le même ?
Oh oui toujours, plus que jamais (rires) ! Comme je dis : "Vous imaginez que pour des gens de ma génération, on prédisait des voitures volantes en l'an 2000 et qu'à la place, on a des voitures bloquées avec des gens en trottinettes sur les trottoirs". Après, du moment que je peux écouter la musique que je veux et regarder les films que je veux, ça va.
Vous ne dites pas comme Michel Sardou que vous haïssez cette époque ?
Non, je ne dirais pas cela. Dans le domaine médical par exemple, les avancées sont formidables. Ce qui est insupportable, ce sont les gens qui filment tout, c'est la bêtise des réseaux sociaux, leur déferlement de haine avec des fautes d'orthographe partout. C'est un tel temps perdu ! Lisons un livre, regardons un film, plutôt que d'aller voir ce que bouffent les gens, leurs enfants ou leurs chats. Prenez le TGV, plus personne ne lit un bouquin ou très rarement. Les gens sont sur leur téléphone, ils écoutent de la musique, ils pianotent. Ce qui m'énerve aussi, c'est qu'on anglicise tout alors que nous avons a une langue magnifique. Dans la bouffe, dans les médias, c'est une catastrophe ! Rendez-vous compte quand même : on dit "la story"... C'est quand même con.... On parle d'un "feel good movie", de "faire le buzz". Un "feel good movie" qui "fait le buzz", je peux vous dire que je ne vais le voir (rires) ! Ca fait réac' mais ce n'est pas grave.
"J'ai un projet de documentaire"
Avez-vous des projets en télévision ?
J'ai un projet de documentaire sur la Seconde guerre mondiale, une période qui me passionne. Je voudrais le réaliser et je suis en train de chercher des financements pour. J'aimerais aller sur les traces de mon grand-père, dont j'étais très proche. Sa vie couvre plusieurs périodes de la Seconde guerre mondiale. Il a connu la débâcle et l'exode de l'été 1940, l'emprisonnement dans les stalags - un aspect de la guerre dont on parle peu. Avec des camarades, il s'est échappé de ce stalag lors d'une évasion digne du film "La grande évasion". Il a ensuite traversé à pied un bout de la Hollande, de la Belgique, jusqu'en France. Il est ensuite entré dans la Résistance.
On vous voit peu à la télévision. C'est un choix ?
Oui, je fais très attention à la télévision. Je vais dans peu d'émissions car j'estime que mon métier, c'est d'être à la radio ou sur scène. On ne remplit pas les salles quand on est à la télévision tous les jours.
Vous la regardez ?
Oui, je regarde beaucoup Arte. Il y a des documentaires passionnants et de très bonnes rediffusions de films l'après-midi. Comme ça, après le "13 Heures" de Jean-Pierre Pernaut, hop ! (rires) Il m'arrive aussi de regarder "4 mariages pour 1 lune de miel" sur TF1. C'est fascinant... Et puis je regarde les infos et Yves Calvi sur Canal+. J'aime bien "C à vous" aussi. En fait, je vais dans les émissions que je regarde, et il n'y en a pas beaucoup.
Avez-vous des projets au cinéma ?
Oui. Je vais bientôt arrêter la tournée de mon spectacle "Sans modération" avec des dernières dates à l'Olympia et à la salle Pleyel, à Paris, en décembre. Je vais avoir ainsi davantage de temps. J'ai des projets sympas mais je ne peux malheureusement pas encore en parler. C'est trop tôt.
"J'ai de la chance !'"
Dans un récent livre, Frédéric Beigbeder évoquait une dictature du rire, où les bouffons auraient pris le pouvoir. Qu'en pensez-vous ?
C'est ce que dit Alain Finkielkraut aussi. Je ne sais pas si on peut parler d'une "dictature". Ce qui est vrai, c'est qu'il y a des chroniqueurs-humoristes un peu partout. Beaucoup plus qu'il y a quelques années du moins.
Faites-vous une différence entre le rire et le ricanement ?
Je me méfie du rire à tout prix. Après, je ne suis pas trop là-dedans à RTL ou sur scène. Nous, on se marre vraiment le matin. Je n'y vais pas en traînant les pieds. Sinon, j'arrêterais. Sur scène aussi, j'ai toujours un immense plaisir à voir une salle rire. Je me dis souvent : "J'ai 52 balais, je fais ce genre de conneries. J'ai de la chance !'".
Après 3.000 chroniques, vous vous marrez toujours ? Il n'y a pas des jours où l'on a moins envie ?
Une fois qu'on y est, que je les vois, je me marre. C'est comme en tournée. On peut être fatigué. Mais les gens ont pris leur place depuis souvent des mois, ils ont le sourire, ils sont au premier rang, ils ont fait la queue, ils ont peut-être fait garder un gamin. On se doit d'être toujours le plus possible au top ! Je le redis, j'ai beaucoup de chance.