Olivier Bas ("Nouvelle Star") : "Les albums de reprises, je trouve ça déprimant"

Inconnu du grand public, Olivier Bas a accepté de partir à la recherche de la "Nouvelle Star" pour le retour de l'émission sur D8. Cette "encyclopédie de la musique" comme l'a présenté Cyril Hanouna a répondu à puremedias.com sur ses attentes dans le programme ainsi que sur le marché du disque.

Propos recueillis par Kevin Boucher

Comment vous êtes-vous retrouvé dans "Nouvelle Star" ?

De façon extrêmement rapide, je dois reconnaître. Des gens de Fremantle m'ont contacté et on a eu moins de dix jours pour voir que l'on avait envie de tenter cette histoire ensemble. Ca s'est fait très naturellement, très simplement. Evidemment, je partais avec un lourd handicap parce que personne ne me connaît, c'est très clair. Après, j'espère que tout ce que j'ai fait par le passé et ma personnalité les a emballé et la chaîne aussi, par voie de conséquence.

L'alchimie avec les autres juges est bonne ?

De par mon métier, je connaissais André Manoukian depuis 25 ans, depuis l'époque de Liane Foly. Et puis Maurane et Sinclair, je les connaissais comme eux me connaissaient. Je suis le rédacteur en chef de l'émission "CD'Aujourd'hui" sur France 2, donc je les connaissais par ce biais-là. Humainement, ça s'est fait immédiatement. On a nos caractères, on a nos différences mais on se marre bien tous les quatre. Je crois que ça se voit à l'écran.

Que recherchez-vous chez la future "Nouvelle Star" ?

Si je le savais, je crois que je ne serais pas un très bon juré parce qu'à ce moment-là, je serais un directeur artistique, ce qui n'est pas la même chose. Je n'ai pas envie d'avoir de case. J'ai envie d'être surpris, d'être emporté, d'être un peu perturbé par ça, sachant que moi, j'ai plus souvent l'habitude d'avoir un avis sur des auteurs-compositeurs-interprètes. Là, on se retrouve avec des gens qui vont mettre leur personnalité dans une chanson qui, finalement, appartient à tout le monde. C'est un exercice qui est assez passionnant pour moi et qui est assez significatif. C'est un bon baromètre pour pouvoir évaluer quelqu'un.

Vous aviez déjà suivi le programme auparavant ? Des gens qui vous avaient marqué et que vous auriez bien aimé découvrir ?

Oui, heureusement. Mais je n'ai pas cette frustration de direction artistique. J'aime bien arriver quand c'est fini. Je n'ai pas ce fantasme de l'élaboration. Par contre, oui, j'aime bien être le premier à découvrir le truc qui arrive, c'est évident. Mais je ne suis pas un technicien. Je suis vraiment plus dans l'émotion. Pour moi, le seul avis qui compte pour avoir une opinion sur un chanteur, c'est "j'aime / j'aime pas". Ca, c'est très concret. Après, on est qui pour dire "ça, c'est mieux que ça" ? C'est très difficile. Par contre, le "j'aime / j'aime pas" avec son cerveau, son coeur et ses boyaux, pour moi, ça a de la valeur. Donc peut-être que ce que je voudrais trouver, c'est cette coordination entre un intellect, un sentiment et un truc un peu plus brutal.

Il y a une forte concurrence des télé-crochets cet hiver avec "Star Academy" qui revient sur NRJ 12.

"Star Academy", est-ce que les gens qui prennent le petit-déjeuner fait partie de la musique ? Je ne suis pas sûr. Je me sens à l'aise dans "Nouvelle Star".

On ne vous a jamais proposé auparavant d'être juré dans un télé-crochet ?

Non. J'ai fait un nombre de jurys incalculable, du Hard Rock Café à la Truffe de Périgueux, en passant par le prix machin... Et j'ai toujours dit oui, même si c'est très contraignant, que ça prend du temps... J'ai toujours dit oui parce que je considère que ça fait partie de mon travail.

Vous n'êtes pas sans savoir que le marché du disque s'écroule...

Oui oui, il paraît.

Qu'est-ce que ça fait de se dire que le gagnant pourrait avoir de la difficulté à vendre par la suite ? Les derniers vainqueurs n'ont pas fait d'éclats.

Oui et non. Déjà, je pense que l'industrie du disque ne s'est jamais aussi bien portée. Vraiment. Il suffit de voir ce qui arrive. Il y a un niveau de qualité qui s'est très très largement élevé parce que c'est plus simple de faire de la musique. Il y a moins de timidité dans les propos balancés, on n'a pas besoin d'avoir un label pour pouvoir exister... Après, si vous prenez sur les derniers lauréats, dans le cas d'Amandine Bourgeois où il y a un espèce de cataclysme parce qu'elle annule sa tournée - déjà ça arrive tous les jours pour d'autres artistes qui n'ont pas fait ça -, il faut bien voir que maintenant la surenchère des billets de concerts fait que c'est trop cher. A un moment, on dit que le disque est cher. Alors, moi, je ne les achète pas parce que je les reçois gratuitement. Mais c'est moins cher qu'un livre, vous pouvez acheter un morceau 99 centimes et, à Paris pour les Parisiens, le disque, si vous attendez un petit peu ou si vous le faites tout de suite, c'est le prix d'un croque-monsieur, d'une bière et un café, que vous allez faire pipi et caca derrière.

Après, sur les derniers gagnants, il y a l'encadrement. Je pense que certains gens du métier du disque veulent trop accélérer les choses. A un moment, qu'est-ce qui a fait le succès de Julien Doré et de Christophe Willem ? C'est que Christophe Willem a pris le temps d'avoir des chansons, c'est tout. S'il avait sorti son album au sortir de l'émission, je pense qu'on n'en entendrait plus parler. Il a été rencontrer Zazie, il a été rencontrer Philippe Katerine, il a été donner envie à ces gens-là, ce qu'il a fait qu'il était à l'aise dans son album. Si on arrive comme ça et qu'on lui dit "Dépêche-toi ! Dépêche-toi ! Dépêche-toi !", il y a un stress qui fait qu'il ne se passera rien. Donc je pense - et d'où la professionnalisation et je ne sais pas s'il faudra aller jusqu'à ce rôle-là avec les finalistes - qu'il faut bien les entourer et qu'ils prennent leur temps.

Ces derniers temps, il y a une vague d'albums de reprises...

Je trouve ça déprimant. Et le pire, c'est que ça prend de la place. Patricia Kaas, ça prend de la place. Alors, évidemment, ça fait depuis le début de sa carrière qu'on la compare à Piaf, pourquoi elle le fait l'année des 50 ans de Piaf ? Moi, ça me déprime parce que ça prend de la place pour de la création pure. Prenons l'exemple d'Adamo. Il sort un album pratiquement tous les deux ans. Ca m'épate plus. Après, ce ne sont pas forcément ses grandes chansons mais le mec est artiste toujours, il n'est pas mathématicien. Il y a les Stentors, il y a les Prêtres... Moi, je n'en peux plus. Daphné qui reprend Barbara, elle a le droit. Elle a absolument le droit de faire tout ce qu'elle veut. Maurane a repris Nougaro de façon absolument magnifique, ils ont le droit. Moi, ce n'est pas le truc qui m'intéresse. Je n'aime pas la nostalgie. J'aime le présent, en essayant de voir le futur. Vous m'avez mis sur un truc là, je pourrais y passer des heures... (Rires)

Donc vous préférez quelqu'un comme Adele, qui cartonne avec des chansons originales ?

Adele, je mets au défi les gens qui ont acheté son deuxième album d'avoir écouté le premier. Moi, j'étais là sur le premier. Je m'occupais à un moment des CD qui s'appelaient "Indétendances" à la FNAC, on m'a dit "Pourquoi tu prends ça ?". La réponse c'est X millions d'albums pendant la crise du disque. Quand on donne envie aux gens, ils sont là.

Justement, Adele a-t-elle été l'artiste la plus reprise dans les castings ?

On s'attendait à pire. Il y a beaucoup eu Ben l'Oncle Soul vu que la règle veut que ce soit une chanson en français et une chanson en anglais. Je ne leur en veux pas mais leur culture française est liée à la faute des médias. Moi, je suis très à l'aise, je passe beaucoup plus de Français que ce qu'on me demande. Ce n'est pas un truc de "Cocorrico !" ou de chauvinisme. Les artistes sont à côté et que vous ayez 70 ans ou 15 ans, vous comprenez les paroles. Et si je faisais une émission au Maroc, il y aurait des artistes marocains car ils sont à côté, c'est tout. J'adore Radiohead mais ils ne viennent pas très souvent alors que Soma sont d'Aix-en-Provence et ils font des concerts tous les jours qu'ils ont du mal à remplir. Sinon, je vous passe les "Jardin d'hiver" et autres, mais le truc qui m'a vraiment scotché sur les castings, c'est Zazie. Comme en plus, elle a un répertoire immense, il y avait tout un tas de chansons... J'ai été très très surpris. Zazie, pour moi, c'est instructif. Je dis souvent que j'ai appris des choses aussi bien artistiques qu'humaines, je ne m'attendais pas à ce que Zazie soit autant plébiscitée. Pas un Noah par exemple !

Et vous arrivez encore à écouter leurs disques malgré ces multiples reprises lors des castings ?

Ca n'a rien à voir. Je dois avouer qu'on a eu une journée où on a du avoir sept fois le duo "La Seine" de M et Vanessa Paradis, et c'est vrai que vous vous réveillez le lendemain avec la chanson en tête et c'est un peu casse-couilles quand même. C'est comme quand vous avez un truc en tête et que vous n'arrivez pas à vous en dépatouiller.