SOS Racisme annonce saisir le CSA. Mercredi après-midi, le professeur Camille Locht, directeur de recherche à l'Inserm, était en duplex sur LCI afin d'évoquer la piste du vaccin BCG afin de lutter contre la propagation de la maladie Covid-19 dans le monde. Des tests doivent prochainement été réalisés dans divers pays comme l'Australie, les Pays-Bas, l'Allemagne et le Royaume-Uni.
Au cours de son intervention, présent en plateau, le professeur a été interrogé par Jean-Paul Mira, chef de la réanimation à l'hôpital Cochin de Paris : "J'ai compris que c'était pour empêcher l'apparition de la maladie pour des sujets sains ou pour éviter chez des patients la sévérité. Le problème est qu'on est en confinement avec des gens ultra-protégés quand ils sont exposés. (...) Il va falloir un nombre considérable de malades pour voir une différence, non ?". Ce à quoi Camille Locht a répondu : "C'est un travail qu'on est en train de faire. (...) On va établir un chiffre (du nombre de malades, ndlr) pour avoir des valeurs statistiques convenables. Vous avez parfaitement raison. Actuellement, d'autres mesures de prévention sont mises en place comme les masques. (...) Il faut que cette étude soit à grande échelle, dans plusieurs pays étrangers et il faut se coordonner avec le même protocole."
"Si je peux être provocateur. Est-ce qu'on ne devrait pas faire cette étude en Afrique où il n'y a pas de masques, pas de traitements, pas de réanimations ? D'ailleurs, comme c'est fait pour certaines études pour le Sida. Ou chez les prostituées. On essaye des choses parce qu'on sait qu'elles sont hautement exposées et ne se protègent pas", a enchaîné Jean-Paul Mira. "Vous avez raison. On est en train de réfléchir en parallèle à une étude en Afrique pour faire ce même type d'approche avec le BCG et un placebo. Je pense qu'il y a un appel d'offres qui va sortir. Ca n'empêchera pas qu'on réfléchisse à une étude en Europe et en Australie", a ajouté Camille Locht. puremedias.com vous propose de visionner la séquence.
Relayée sur les réseaux sociaux, la séquence a provoqué l'indignation auprès de nombreux internautes et personnalités. Le Parti socialiste, par la voix de son Premier secrétaire Olivier Faure, a condamné cette "provocation" qualifiée de "raciste" : "L'Afrique n'est pas le laboratoire de l'Europe. Les Africains ne sont pas des rats". Le Strass, syndicat des travailleurs et travailleuses du sexe, a également dénoncé la séquence et appelé les internautes à saisir le Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Dans un communiqué hier soir, SOS Racisme s'est "indigné des propos tenus par les deux médecins sur LCI", qui sont "tombés d'accord à l'antenne sur le projet d'utiliser les Africains comme cobayes pour tester des vaccins contre le virus Covid-19". "L'association a saisi le CSA qui a accusé réception de notre démarche, tout comme elle a pu s'entretenir avec la direction de la chaîne", a précisé SOS Racisme, qui attend "de LCI qu'elle revienne sur cette séquence autrement que pour la valider" et "des deux médecins concernés des excuses". Contacté par l'AFP, le CSA a confirmé avoir été saisi.
L'Inserm, institut dans lequel travaille Camille Locht, a réagi également hier en précisant que la vidéo circulant sur les réseaux sociaux était "tronquée" et qu'elle fait dès lors "l'objet d'interprétations erronées". "Des essais cliniques visant à tester l'efficacité du vaccin BCG contre le Covid-19 sont (...) sur le point d'être lancés dans les pays européens et en Australie. S'il y a bien une réflexion autour d'un déploiement en Afrique, il se ferait en parallèle de ces derniers. L'Afrique ne doit pas être oubliée ni exclue des recherches car la pandémie est globale", a expliqué l'Inserm.
Contacté par "Le Huffington Post", Jean-Paul Mira a quant à lui "nié toute forme de racisme" et s'est dit profondément heurté par de telles accusations. "L'Afrique est touchée mais il y a peu de tests effectués pour le prouver (...) Il me semblait alors intéressant qu'en plus de la France et de l'Australie, un pays africain puisse participer à cette étude dont je n'avais jamais entendu parler avant l'émission", a-t-il précisé. Et d'ajouter : "Depuis quatre semaines, je me bats contre le Covid-19. Le virus n'a pas de haine. Nous allons le vaincre car nous sommes unis dans les hôpitaux. Seule cette solidarité me permet d'être débout ce soir". Dans un communiqué ce vendredi, Jean-Paul Mira présente "ses excuses", "parce que ces propos ne reflètent en rien ce que je suis, ce que je fais au quotidien, depuis maintenant 30 ans". Contactée par l'AFP, LCI ne commente pas et renvoie aux réponses de l'Inserm et de Jean-Paul Mira.