MyTF1 est mort, vive TF1+. Lundi 8 janvier 2024, concomitamment aux lancements de "Bonjour !", la nouvelle matinale de Bruce Toussaint, et "Plus belle la vie", le groupe TF1 vivait une (petite) révolution avec le lancement de sa nouvelle plateforme de streaming. "C'est un moment fort dans la vie d'un groupe de médias. Ce n'est pas souvent qu'on fait un lancement de cette ampleur. Il est le résultat des efforts très intenses des équipes de la maison", se réjouissait Rodolphe Belmer, directeur général de TF1, lors de la présentation de TF1+ à la presse en décembre dernier.
Après un an de préparation, Claire Basini, la directrice générale adjointe en charge des activités BtoC (à destination du grand public), a accepté de revenir pour puremedias.com sur ce nouveau service gratuit qui proposera plus de 15.000 heures de contenus (200 films de cinéma, 200 films TV, 200 séries en intégralité) et des innovations technologiques aux 28 millions d'utilisateurs de MyTF1.
Propos recueillis par Benjamin Rabier
puremedias.com : Vous avez rejoint le groupe TF1 au poste de directrice générale adjointe en charge des activités BtoC il y a un an, quelles ont été vos principales missions ?
Claire Basini : TF1+, clairement. Nous avons été très concentrés sur le lancement de cette nouvelle plateforme. Nous avons beaucoup travaillé afin de proposer aux utilisateurs une expérience enrichie et des innovations fortes. On a également noué de nouveaux partenariats stratégiques avec nos partenaires historiques (Telco) mais aussi les nouveaux opérateurs de télévisions connectées. En interne, nous avons collaboré avec les équipes des antennes d'Ara Aprikian (directeur général adjoint du groupe en charge des programmes de TF1) pour offrir à nos utilisateurs un catalogue premium et des droits longs sur nos programmes.
En tant que spécialiste du digital, quelles étaient les faiblesses de MyTF1 selon vous ?
C'est un très bon service de rattrapage. Ce n'est pas pour rien qu'il y a 28 millions d'utilisateurs qui s'y connectent tous les mois et qu'il est leader dans son domaine. Mais avec TF1+, nous ne sommes pas du tout dans la même proposition. Ce que l'on souhaite proposer avec cette plateforme est très différent. C'est pour cela qu'on a changé de nom. On a travaillé sur toutes les dimensions : un catalogue de droits longs éditorialisé, une expérience vraiment centrée sur l'utilisateur pour faciliter la découverte de nos contenus. On a aussi imaginé des innovations qui sont différenciantes autour de la maîtrise du temps (avec notamment 'Top Chrono' qui permet d'obtenir des résumés de 5, 10 ou 15 minutes de rencontres sportives ou encore 'Synchro', un moteur de recommandation dédié à l'écoute conjointe qui sera disponible au printemps). Le fait d'avoir notre application TF1+ présente sur tous les environnements, tous les écrans télé et en première visibilité dès l'ouverture des écrans d'accueil des télévisions connectées, c'est extrêmement nouveau. Cela va nous permettre de devenir une destination quotidienne pour le divertissement familial des Français.
"Les discussions ne sont pas au même niveau d'avancement avec tous nos partenaires. Aujourd'hui, sur MyCanal, il y aura toujours MyTF1"
Est-ce que les négociations sont simples lorsqu'on s'appelle TF1 ?
On a eu des échanges constructifs qui se sont concrétisés par des partenariats et des accords stratégiques avec la grande majorité des acteurs du marché. Ces accords représentent un nouveau modèle de partenariat qui permettra à TF1+ d'être disponible en première visibilité et accessible gratuitement au plus grand nombre.
Pourtant, TF1+ ne sera pas disponible chez tous les opérateurs le 8 janvier...
Depuis hier, TF1+ est accessible sur l'écran d'accueil des box Orange et Bouygues Telecom et Free puis dès mars, elle le sera sur celles de SFR. TF1+ est également déjà disponible sur plus de 95% des Smart TV et appareils connectés (Samsung, Google TV, Apple TV, etc). Les discussions ne sont pas au même niveau d'avancement avec tous nos partenaires. Aujourd'hui, sur MyCanal, il y aura toujours MyTF1 qui est une offre de replay. Mais bien sûr, notre ambition et notre volonté c'est de voir TF1+ se déployer partout.
MyTF1 affiche 28 millions d'utilisateurs mensuels mais ils ne passent que 3 heures par mois sur la plateforme contre 20 heures sur Netflix. Quelle est votre ambition première avec TF1+ ? Gagner des utilisateurs ou accroître la consommation mensuelle ?
Aujourd'hui, du fait de notre proposition de rattrapage très limitée liée à une durée de de 7 jours, nous ne pouvons pas proposer une série en intégralité par exemple. Du coup, nous ne pouvions pas embrasser le développement des usages vers le streaming. Le streaming c'est vraiment "je consomme ce que je veux quand j'en ai envie et sur l'écran sur lequel j'ai envie de consommer". Aujourd'hui, nous sommes très puissants, car nous sommes incontournables par la puissance de notre line-up de programmes mais les utilisateurs ne viennent sur MyTF1 que dans un objectif de rattrapage. Désormais, avec TF1+, nous souhaitons devenir une plateforme de destination, un réflexe quotidien. C'est dans cette optique que TF1+ propose un catalogue profond et varié de 15.000 heures de programmes à la demande avec des droits longs, une ergonomie repensée et une accessibilité directe et facile. C'est vraiment le triptyque incontournable.
"Les séries quotidiennes feuilletonnantes sont extrêmement plébiscitées en digital"
Quels contenus fonctionnent le plus en streaming ?
La fiction. Sur les séries, on propose trois choses sur le plan éditorial très différentes de la concurrence. Avec le lancement de "Plus belle la vie, encore plus belle" le 8 janvier, nous serons les seuls à avoir trois séries quotidiennes feuilletonnantes. C'est un genre qui est extrêmement plébiscité en digital. À la fois parce qu'elles captent un public jeune et parce qu'il y a une logique de rendez-vous. Sur la fiction française, TF1 est incontournable donc notre offre de streaming le sera aussi. Nous aurons également une offre de séries étrangères en intégralité et une très belle offre de films populaires et familiaux.
En quoi 'Plus belle la vie' est un contenu qui peut booster les performances de TF1+ en 2024 ?
C'est un atout fort de notre proposition du mois de janvier. Aujourd'hui, les usages ont changé. La télévision doit être vue de manière globale. À côté du linéaire, pour un public peut-être un peu plus jeune, il y aura la possibilité de regarder la série sur TF1+. Les feuilletons quotidiens, plus largement, sont plébiscités par les cibles jeunes.
Il n'y aura aucun programme exclusif sur TF1+. Pourquoi ?
Nos programmes sont tous exclusifs par rapport au marché. Nous sommes les seuls à proposer la "Star Academy", "Master crimes" ou "Panda" par exemple. Aujourd'hui notre ligne de programmes est pensée pour le linéaire et pour le digital. Notre offre de programmes est très différente des autres plateformes, à la fois éditorialement et par sa gratuité.
TF1+ va également marquer notre arrivée en force sur l'information avec un format dédié. C'est une exclusivité qui fait partie de notre mission, de notre ADN et de notre envie. C'est aussi une demande forte de nos utilisateurs d'avoir un format d'information adapté aux usages du streaming. C'est pour cela qu'on lance "Top Info", où chaque jour à 19 heures, cinq sujets d'actualité seront traités par la rédaction en 5 minutes chrono.
L'information est-elle vraiment une thématique qui peut attirer des utilisateurs en streaming ?
Dans notre souhait de devenir une destination quotidienne, on considère que c'est très important d'avoir une offre d'information à côté de celle du divertissement.
"Les séries américaines seront mises à l'honneur sur TF1+"
Les séries étrangères ont de plus en plus de mal à rassembler sur l'antenne de TF1. TF1+ sera-t-elle leur nouvelle maison ?
Les séries américaines seront mises à l'honneur sur TF1+. Notre modèle repose sur un dispositif vertueux entre le linéaire et le digital. Nous n'opposons pas les canaux.
MyTF1 revendique 28 millions d'utilisateurs mensuels. Quelles sont vos ambitions pour TF1+ ?
L'ambition, c'est surtout de développer les usages. 28 millions de personnes c'est déjà très important. Bien sûr, nous espérons toujours faire plus mais l'enjeu principal, c'est vraiment d'avoir des utilisateurs qui nous consomment beaucoup plus régulièrement et plus longtemps.
Pas de contenus exclusifs mais des programmes dérivés de vos marques fortes comme "The Voice : Le Comeback" avec Camille Lellouche par exemple. Ce genre de format va-t-il se développer ?
Ce qui est intéressant avec le digital, c'est qu'il n'y a pas de limites. Nous ne sommes pas contraints par une grille de programmes comme peut l'être l'antenne. Aujourd'hui, nous disposons de marques incontournables avec un public de fans. Nous pouvons désormais leur proposer d'aller plus loin avec le digital. Là par exemple, à l'occasion de la saison 2 de la 'Star Academy', on a lancé une verticale dédiée avec beaucoup de contenus exclusifs, notamment une chaîne live qui est extrêmement plébiscitée. On offre la possibilité d'interagir avec les candidats, de participer à des sondages, etc...
Vous dites que la chaîne live de la "Star Academy" est plébiscitée. Combien d'abonnements avez-vous recensé ?
On ne communique pas sur nos abonnements. Je peux juste dire que ça fonctionne très bien et qu'encore une fois, cette logique de rendez-vous avec la quotidienne et le prime du samedi est extrêmement importante en digital.
Beaucoup d'experts prédisent la fin de "la télévision". Selon vous, quand est-ce que la consommation digitale des programmes aura dépassé celle de la télévision en France ?
Pour moi, le linéaire est l'incarnation de l'événementialisation et reste incontournable pour rassembler autour de grands rendez-vous comme l'info, les séries quotidiennes, des cases cinéma ou des événements comme le sport. Ce qui est très intéressant dans le virage stratégique du groupe TF1, c'est que l'antenne et le digital marchent ensemble. L'idée c'est d'être offensif et conquérant sur les deux canaux. On investit sur le linéaire avec à la fois une nouvelle proposition d'émission d'accueil avec la matinale de Bruce Toussaint, une nouvelle série quotidienne feuilletonnante ("Plus belle la vie"). Nous montons chaque année en puissance sur nos séries de fictions françaises avec beaucoup de modernité.
En parallèle, sur le streaming, le fait d'avoir la puissance de feu de nos antennes pour créer des marques programmes incontournables et être un acteur emblématique de la pop culture aident énormément à susciter de la demande en digital. En fait, c'est un facteur clé de succès, un atout de différenciation unique.