L'interview a des allures de grand entretien de Chef d'Etat. Une double page, une petite photo et 22 000 signes (soit près de 15 feuillets). Mais ce n'est ni Nicolas Sarkozy ni Barack Obama qui a les honneurs du Figaro ce matin mais Charles Edelstenne, PDG de Dassault Aviation. Dassault qui, petite précision importante, est par ailleurs actionnaire du journal. Pour les lecteurs qui l'ignorent encore, il faut aller au bout des quinze questions pour le savoir grâce à une mention apportée à la fin de l'entretien.
Un dispositif aux petits oignons signé... Etienne Mougeotte, patron du quotidien. "Dassault Aviation vient de vivre une quinzaine de jours agités, durant lesquels ses produits et sa stratégie ont été remis en cause" écrit-il. Charles Edelstenne l'assure : "Quelles que soient les critiques de certains, le Rafale a, sans aucun doute possible, été le choix le plus raisonnable que la France pouvait faire dans le domaine des avions de combat." Et quoi de mieux que le journal maison pour dérouler sa stratégie ? C'est un peu comme si TF1 accordait un 52 minutes aux constructions faites par le groupe Bouygues, propriétaire de la Une. Ou si Canal + réalisait un sujet sur la position dominante de France Telecom en France alors que son propriétaire détient un concurrent, SFR.
Ce n'est pas la première fois que la digue entre les intérêts industriels de l'actionnaire et le patron des rédactions rompt. Déjà en octobre 2008, la présence de Serge Dassault lors d'un déplacement en Russie d'Etienne Mougeotte pour une interview de Vladimir Poutine avait irrité la rédaction du journal. "J'ai obtenu une interview avec M. Poutine, seul. J'en ai parlé avec M. Dassault, qui m'a proposé de m'accompagner dans son avion. J'ai ensuite réalisé seul cette interview. Nous avons ensuite dîné avec M. Poutine, dîner au cours duquel M. Dassault était présent" s'était-il justifié à l'époque. Les journalistes du Figaro avaient alors dénoncé "l'omniprésence" de Serge Dassault. Contactée par puremedias.com ce matin, la Société des Journalistes du Figaro n'était pas immédiatement disponible pour répondre à nos questions.