Les reporters du "Petit Journal" ne sont pas des journalistes comme les autres. La Commission de la Carte d'Identité des Journalistes Professionnels (CCIJP) a mis ses menaces à exécution : sur 12 demandes de cartes de presse, six ont été refusées, cinq ont été renouvelées et un dossier est en attente, révèle Le Nouvel Observateur.
En cause, le format quotidien de Canal+ porté par Yann Barthès chaque soir. Est-il une émission d'information comme une autre ou un simple divertissement ? Ses journalistes ont-ils droit à la carte de presse au même titre que les reporters des 20 heures ou les rédacteurs de presse écrite ? Ces questions avaient été posées par le site Arrêt sur images à la CCIJP en janvier dernier, après la polémique avec Jean-Luc Mélenchon qui accusait l'émission de "tordre la réalité".
"Je pense que la question de ce renouvellement (de leurs cartes de presse) peut se poser. Est-ce que le Petit journal, c'est du divertissement ou de l'information ? s'interrogeait Eric Marquis, président de la commission (...) Je suis assez réservé sur le mélange des genres (...) Les auteurs des Guignols, par exemple, n'ont pas de carte de presse. Ce n'est pas parce que l'on utilise les mêmes outils - reportage, interview ... - qu'il y a une démarche d'information derrière". Depuis, bon nombre de confrères avaient pris la défense des journalistes de l'émission satririque, au nom de la diversité des genres journalistiques.
"Pourtant, les malchanceux, recrutés cette année, viennent de rédactions aussi peu farfelues que RTL, France 5 ou Le Post" note notre confrère. Mais le renouvellement de la carte, nécessaire chaque année en justifiant de sa nouvelle activité journalistique, leur a été refusé. Les reporters et rédacteurs du "Petit Journal" n'exercent-ils pas un métier journalistique quand ils relèvent une tentative de bidonnage sécuritaire dans une émission de TF1 ? Ou lorsque ils déjouent sur le terrain les stratégies de communication des politiques ? Si "Le Petit journal" est un divertissement, ne peut-on pas considérer alors que les journalistes des hebdomadaires "légers" (presse people, féminine, glamour) écrivent aussi pour "divertir" leurs lecteurs ? "Le problème, c'est qu'il n'y a pas de définition officielle de ce que sont les tâches du journaliste. On peut le définir comme une recherche d'info, avec vérification, mise en perspective" expliquait en janvier Eric Marquis, avec dans son viseur une cinquantaine d'émissions de la TNT.
La carte de presse est symbolique, elle offre des avantages pratiques à celles et ceux qui la possèdent, comme l'accréditation rapide aux représentations officielles, qu'elles soient politiques ou culturelles. Il y a quelques mois, malgré une carte de presse dans leur poche, les reporters du "Petit Journal" avaient été boycottés par Jean-Luc Mélenchon.