Day-D pour la radio numérique terrestre. Cet après-midi, le CSA a annoncé la liste des 18 stations sélectionnées pour obtenir une fréquence métropolitaine nationale sur la RNT, autrement nommée DAB+. Pour rappel, cette annonce est le résultat de l'appel à candidatures, lancé par le CSA en juin et clôturé en novembre, et portant sur l'attribution de 24 fréquences nationales métropolitaines. Comme annoncé par Franck Riester lundi matin, six fréquences ont été préemptées par l'État pour Radio France. Réunis en plénière cet après-midi, les Sages ont validé les autorisations de France Inter, France Culture, France Info, France Musique, FIP et Mouv' (France Bleu aura une fréquence locale étendue et non métropolitaine, ndlr).
Du côté des radios commerciales, elles sont donc 18 - sur 40 dossiers jugés recevables - à avoir été sélectionnées pour le DAB+. Sans grande surprise, les principaux acteurs du secteur obtiennent les fréquences convoitées. Les trois stations du groupe M6 (RTL, RTL2 et Fun Radio) ont été sélectionnées, tout comme les trois stations du groupe Lagardère (Europe 1, Virgin Radio et RFM). Les quatre stations du groupe NRJ (NRJ, Rire et Chansons, Nostalgie et Chérie) se déploieront aussi en DAB+ tout comme RMC, BFM Business et BFM Radio, les antennes du groupe NextRadioTv. Air Zen, Latina, M Radio, Radio Classique et Skyrock décrochent également une fréquence métropolitaine.
Pour rappel, l'acronyme DAB+ désigne en fait le "Digital Audio Broadcasting". Le "+" représente la norme mondiale utilisée pour le DAB. Il s'agit tout simplement de la radio numérique terrestre. Cette dernière constitue l'équivalent de ce que la TNT était à l'analogique en télévision. Technologie hertzienne, qui ne passe donc pas par le mobile, elle utilise la voie des ondes mais de façon numérique. Le DAB+ ne se superpose pas à la bande FM puisqu'elle concerne les fréquences de 174 à 223 MHz tandis que la FM est diffusée sur les fréquences de 87 à 108 MHz. Avec le DAB+, contrairement à la FM, plusieurs radios peuvent utiliser la même fréquence. Le signal est ensuite divisé par le récepteur DAB+. De fait, alors que la bande FM est saturée en de nombreux points sur le territoire, la technologie permet l'émergence d'une offre radiophonique plus dense, à la plus grande joie des radios indépendantes.
Quels avantages présente le DAB+ par rapport à la FM ? Contacté par puremedias.com en novembre dernier, Nicolas Curien, membre du CSA en charge de la radio, avait expliqué que la technologie offrira aux utilisateurs "une meilleure qualité d'écoute, des données numériques associées étendues et surtout une meilleure continuité d'écoute en mobilité". Très concrètement, une fois la technologie déployée sur le territoire, un utilisateur qui écoute la radio dans sa voiture ne souffrira par exemple plus d'interruption dans son écoute durant un long trajet et bénéficiera d'une meilleure qualité sonore. En d'autres termes, il ne sera plus condamné à écouter le 107.7, la radio des autoroutes, souvent la seule à être disponible sur les voies rapides des sociétés concessionnaires.
Concernant le calendrier de déploiement du DAB+, la technologie est déjà accessible à Paris, Nice et Marseille depuis 2015 et à Lille depuis quelques mois. Depuis fin 2018, elle l'est également à Lyon et Strasbourg, Nantes, Rouen, Bordeaux et Toulouse. Selon le CSA, d'ici fin 2020, 40 agglomérations de plus de 175.000 habitants seront couvertes, ce qui représentera 70% de la population. En outre, les principaux axes routiers seront couverts d'ici à cette échéance. Le maillage en zone rurale et en outre-mer interviendra, lui, ultérieurement.
Pour accéder à cette technologie - il faut impérativement être équipé d'un récepteur DAB+. Depuis fin décembre, date à laquelle la couverture de 20% de la population du territoire a été effective, les constructeurs de postes de radio et les équipementiers automobiles ont l'obligation légale, déclenchée par le CSA, d'intégrer la technologie, via l'installation de puces. "Il faudra un certain temps avant que ce mode d'écoute ne se développe" avait reconnu Nicolas Curien. En 2017, selon les chiffres du CSA, 8% des Français étaient équipés d'un récepteur DAB+ et 8% des autoradios étaient compatibles avec la réception de la radio numérique terrestre.
Grand défenseur de l'utilisation de cette technologie, que la France s'apprête donc à embrasser avec beaucoup de retard, Nicolas Curien avait estimé qu'elle correspond à "l'évolution numérique de la FM". "Contrairement à la TNT en télévision, nous n'avons pas de contrainte de temps sur la FM, puisqu'il n'y a pas besoin de libérer cette bande pour que le DAB+ se développe et que les auditeurs se l'approprient", avait-il expliqué. D'après lui, le DAB+ ne sonnera donc pas le glas de la modulation de fréquence, dite FM, qui est la technologie la plus répandue en France depuis la libéralisation de la bande, en 1981.
"À ce stade, il n'est pas question d'anticiper une disparition de la FM. Cette technologie survivra durablement. Aujourd'hui encore, des auditeurs utilisent la technologie des grandes ondes. On peut imaginer que, dans quarante ans, la FM sera encore présente dans les zones rurales peu denses", avait expliqué Nicolas Curien tout en rappelant que, même en Norvège, pays où les pouvoirs publics ont acté dès 2015 le basculement vers le numérique terrestre, "la FM subsiste encore de manière marginale et est notamment utilisée par des petites radios associatives".
Outre la FM, le DAB+ devra co-exister avec d'autres modes de réception, dont la 4G, qui couvrira les principaux axes routiers d'ici 2020, et, à moyen terme, la 5G. En pleine expansion, la radio par internet a les faveurs des groupes de radio, qui y voit souvent LA technologie d'avenir. Tous se bousculent d'ailleurs pour accompagner la montée en puissance des assistants personnels proposés notamment par Amazon, Google et Apple. Les grands groupes privés, après s'être longuement observés les uns les autres, avaient pourtant tous décidé de répondre à l'appel d'offres national du CSA - et tous ont donc obtenu les fréquences auxquelles ils ont candidaté -. Nicolas Curien nous avait expliqué qu'il pense que "plusieurs technologies cohabiteront". "Les évolutions technologiques, c'est un peu comme les évolutions biologiques. Une nouvelle espèce n'entraîne pas la disparition immédiate de celles qui la précèdent" avait résumé le Sage de l'audiovisuel.