Et si Israël passait son tour ? En mai dernier, avec sa chanson "Toy", Netta offrait à Israël sa quatrième victoire au concours de l'Eurovision. En vertu de la tradition qui veut que le concours soit organisé dans le pays vainqueur de l'édition précédente, c'est donc Israël qui doit normalement accueillir la 64e édition de l'Eurovision en mai prochain. Problème, nos confrères de i24News, spécialisés dans l'actualité israëlienne, rapportent que l'État hébreu pourrait bien renoncer à accueillir le concours en raison du litige qui l'oppose à la chaîne publique Kan.
Selon i24News, Kan a menacé dimanche Benyamin Netanyahou, Premier ministre d'Israël, d'annuler la tenue de l'Eurovision en Israël si le gouvernement ne l'aide pas à payer une garantie de 12 millions d'euros à l'UER (Union européenne de radio-télévision), organisateur du concours basé en Suisse. Dans une lettre adressée au Premier ministre, Gil Omer, le patron de Kan, indique que le délai de paiement a déjà été repoussé et que la date butoir est désormais au 14 août. Selon ce dernier, Israël pourrait donc annoncer d'ici demain qu'elle renonce à accueillir la 64e édition de l'Eurovision.
"C'est un point de non-retour. Par la suite, si le dépôt requis n'est pas versé à l'UER, il sera impossible de changer la situation et le concours de la chanson Eurovision 2019 ne pourra pas avoir lieu en Israël", indique ainsi le patron de chaîne dans sa missive. "Malheureusement, nos demandes répétées (au gouvernement) pour résoudre les graves problèmes qui empêchent d'accueillir la compétition en Israël n'ont pas reçu de réponse", a-t-il également indiqué. Selon Julien Bahloul, ex-journaliste d'i24News, aucun compromis n'a pour l'heure été trouvé entre la chaîne de télévision et le gouvernement alors que l'échéance n'est plus que de quelques heures.
Cette menace intervient alors que le contexte politique et religieux autour de l'Eurovision est tendu. Le 13 mai dernier, au lendemain de la victoire de Netta, Benyamin Netanyahou, avait annoncé sur Twitter que le prochain concours de l'Eurovision se tiendrait à Jérusalem, comme cela avait été le cas en 1999. "Vous savez ce qu'on dit : ceux qui ne veulent pas de Jérusalem à l'Eurovision auront l'Eurovision à Jérusalem. L'an prochain à Jérusalem !" avait-il écrit. Selon certains médias israéliens, l'UER aurait demandé à Israël de ne pas organiser le concours dans un lieu conflictuel comme Jérusalem, que l'Union Européenne ne reconnaît pas comme capitale officielle. En juin, la ministre de la culture, Miri Regev, avait commenté ces rumeurs en recommandant publiquement au gouvernement de "ne pas accueillir l'Eurovision s'il ne peut avoir lieu à Jérusalem".
À ces considérations géopolitiques, s'ajoute l'épineuse question de la pratique religieuse. Le concours de l'Eurovision se déroule en effet le samedi soir soit pendant le shabbat, période durant laquelle les pratiquants ne peuvent, entre autres, utiliser de l'électricité. Selon "Le JDD", le grand-rabbin ashkénaze de Jérusalem avait ainsi écrit à la ministre de la Culture pour lui demander de renoncer à l'accueil dans du concours. "Je pense qu'il vaut mieux que l'Etat d'Israël abandonne son droit à organiser le concert si cela implique une profanation du shabbat" avait-il écrit. Une position notamment partagée par le vice-ministre de la Santé, juif orthodoxe, qui avait également écrit en ce sens à la ministre de la Culture.