Le train de vie (fastueux) de l'état major de France Télévisions à Cannes bientôt épluché par la justice ? Selon une information de "La lettre", Jean-Jacques Cordival, le président de la section communication et audiovisuel de la CFE-CGC, a déposé une plainte contre Delphine Ernotte Cunci, sa présidente, pour "détournement de fonds" et "abus de confiance".
Pour comprendre de quoi il retourne, un retour en arrière s'impose. Il y a plusieurs mois, France Télévisions a été destinataire d'une facture d'un montant de 112.123 euros pour le séjour de ses dirigeants – Delphine Ernotte Cunci, Stéphane Sitbon-Gomez, directeur des antennes et des programmes, Manuel Alduy, directeur du cinéma et des fictions jeunes adultes et internationales, et Christophe Tardieu, secrétaire général – à l'hôtel Majestic entre le 16 et le 27 mai 2023. Cette note avait été publiée puis mise hors ligne par le blog Adap en décembre 2023.
Pour être plus concret encore, Pierre Olivier Lambert, avocat du syndicaliste, évoque les tarifs – entre 1.759 et 1.319 euros – des suites "Prestige Mer" et "Deluxe Ville" retenues par la direction de France Télévisions. Des prix qui tranchent, selon lui, avec les règles budgétaires strictes édictées par le groupe audiovisuel. Depuis une note interne du 8 février 2023, les salariés sont en effet priés de ne pas dépasser le plafond de 350 euros la nuit pour leurs frais d'hébergement.
Dans la plainte que "La lettre" a pu consulter, l'avocat ajoute que la facture de 112.123 euros comprend également les frais de séjour de Renaud Le Van Kim et Guillaume Lacroix, les fondateurs de Brut, média en ligne avec lequel France Télévisions est associé durant le Festival de Cannes. "Ces faits soulèvent des préoccupations quant à la gestion financière de France Télévisions et à la légitimité des dépenses, notamment dans le contexte du service public qu'elle est censée représenter", reproche l'avocat du syndicaliste dans sa plainte.
En décembre 2023, France Télévisions avait précisé à "La lettre" que les frais d'hébergement de ses cadres s'élevaient ainsi à 73.656 euros, les 38.467 euros restants ayant été refacturés à Brut. Aussi, ces 73.656 euros ont été financés par le système dit de "barter", explique "La lettre". Ce système permet à une entreprise d'effectuer des achats – sans sortie de trésorerie – en échange de ses produits ou de ses services.
Par exemple, il "consiste à échanger un espace publicitaire invendu contre des services comme des billets d'avion, des frais de restauration ou de traiteur", ajoute le média en ligne. Ici, c'est le groupe TEC, qui aurait techniquement réglé la facture. Autrement dit, France Télévisions aurait indirectement financé ces frais d'hébergement via sa régie publicitaire.
France Télévisions a publiquement démenti, en fin de matinée ce lundi 12 février, les allégations de "détournement de fonds publics" et d''abus de confiance' portées à son endroit par le syndicat CFE-CGC. "France Télévisions a refacturé l'intégralité du coût des deux chambres de Brut à Brut pour un montant de 38.467 euros. Cette somme a été payée par Brut à France Télévisions. En ce qui concerne les quatre chambres, dont le montant s'élève à 73.656 euros, cette somme a été payée par le groupe TEC, spécialisé dans le barter, pratique qui consiste à échanger des espaces publicitaires invendus contre des services. Pas un euro d'argent public n'a été utilisé pour ces frais".