Le CSA est en guerre contre "College Boy", le nouveau clip d'Indochine. La semaine dernière, lors de sa mise en ligne, Françoise Laborde, membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel, a estimé que le clip était d'une violence "insupportable". Réalisé par Xavier Dolan, celui-ci met en scène le harcèlement subi par un collégien allant jusqu'à sa mort par crucifixion dans la cour de l'établissement. L'ancienne journaliste a préconisé l'interdiction de la vidéo pure et simple "aux moins de seize ans, peut-être même dix-huit ans", rendant quasiment impossible sa diffusion à la télévision.
Cet après-midi, le CSA confirme sa fermeté quant à cette vidéo qui entend dénoncer les violences scolaires. Dans un communiqué, les Sages indiquent avoir débattu en séance du clip du groupe de Nicola Sirkis et avoir estimé qu'il ne respectait ni "la dignité humaine" ni "la protection de l'enfance et de l'adolescence".
Le CSA indique qu'il va "saisir de toute diffusion par une chaîne de télévision d'extraits violents de cette vidéo musique". Autrement dit, il se réserve le droit de prononcer des sanctions contre toutes les chaînes qui ont diffusé (ou vont diffuser) les extraits les plus violents de cette vidéo. En revanche, l'instance dirigée par Olivier Schrameck fait état de son impuissance face à la diffusion de ce clip sur internet. Les membres du CSA "ont relevé, qu'en l'état de la législation, n'entraient dans leurs compétences que les diffusions sur les chaînes audiovisuelles et les services de médias audiovisuels à la demande."
Dans une lettre ouverte sur le Huffington Post, le canadien Xavier Dolan s'en ai pris sévèrement à Françoise Laborde. "En 1990, je vous aurais écrit afin de me battre pour que vive le vidéoclip 'College Boy' d'Indochine. En 1990, votre décision et celle de vos pairs aurait fait en sorte qu'il soit vu par des milliers de gens, ou qu'il sombre dans l'oubli, mort-né. Vingt-trois ans plus tard, les plateformes de diffusion en ligne ont pu nous assurer, depuis jeudi dernier, un nombre de visionnages approchant le million. En effet, l'Internet veillera à la survie de ce document produit non pas dans l'optique d'exploiter la violence de manière superficielle, mais bien dans celle de fournir à la jeunesse une oeuvre à la fois réaliste et poétique, et qui puisse illustrer de manière graphique la brutalité dont ils sont tour à tour les dépositaires, instigateurs, ou témoins", a-t-il écrit.
"À la lumière de vos commentaires, j'en déduis que vous me percevez comme un artiste à demi-conscient qui n'a pour seul moteur que la confection de son plus récent caprice, ne réalisant pas la teneur de son propos ni la portée de son geste. 'On ne dénonce pas la violence en montrant de la violence' ajoutez-vous. Alors comment la dénonce-t-on ? Comment la dénonce-t-on sinon par la démonstration par l'absurde ? (...) En effet, Madame Laborde, vous arrivez à table pour le débat sur la légitimation de la violence à l'écran avec environ trente-cinq ans de retard. Car qu'en est-il de tous ces films qui prennent l'affiche chaque vendredi et qui banalisent le geste violent depuis les quatre dernières décennies ?", écrit-il alors que le clip est précédé d'un avertissement pour prévenir les plus jeunes spectateurs de la dureté de son contenu.