"Adieu au langage", le dernier film de Jean-Luc Godard, a permis au cinéaste franco-suisse de 83 ans de revenir sur le devant de la scène médiatique. Cette légende vivante du 7ème art a refusé de se rendre au festival de Cannes où le film était en compétition officielle, mais son film a fait l'évènement et s'est vu attribuer le Prix du Jury.
Quelques jours après avoir obtenu ce prix, Jean-Luc Godard a longuement reçu Philippe Dagen et Franck Nouchi, deux journalistes du "Monde", qui ont publié aujourd'hui un très long entretien, parfois décousu. Evidemment, le maestro parle beaucoup de cinéma et d'images mais aussi de son chien, de tennis et de peinture. Il commente aussi l'actualité politique.
Interrogé sur les dernières élections européennes, qui ont été marquées par la victoire du Front National de la famille Le Pen, Jean-Luc Godard s'est dit plutôt content du résultat. "J'ai mon opinion... J'espérais que le Front national arriverait en tête. Je trouve que Hollande devrait nommer – je l'avais dit à France Inter , mais ils l'ont supprimé – Marine Le Pen Premier ministre (...) pour que ça bouge un peu. Pour qu'on fasse semblant de bouger, si on ne bouge pas vraiment. Ce qui est mieux que de faire semblant de ne rien faire (rires)", lance d'emblée le réalisateur qui se place du côté des abstentionnistes.
"Il y a longtemps, Jean-Marie Le Pen avait demandé que je sois viré de France. Mais j'ai juste envie que ça bouge un peu... Les grands vainqueurs, ce sont les abstentionnistes. J'en fais partie depuis longtemps", précise le réalisateur qui aimerait que la démocratie s'exerce par "d'autres moyens".
Jean-Luc Godard se montre assez cruel envers le prix accordé par le jury présidé par Jane Campion, qu'il a reçu ex-aequo avec le jeune Québécois Xavier Dolan. "Regardez ce prix donné à Cannes, à moi et à Xavier Dolan que je ne connais pas. Ils ont réuni un vieux metteur en scène qui fait un jeune film avec un jeune metteur en scène qui fait un film ancien. Il a même pris le format des films anciens", lance le cinéaste qui assume ne pas aimer le cinéma contemporain.
"Les neuf dixièmes (des réalisateurs d'aujourd'hui, ndlr), je ne les connais pas. A Paris, je n'ai plus envie de rôder dans les rues pour aller voir un film. Juste peut-être le film syrien montré à Cannes, et puis le film de Sissako, j'avais vu 'Bamako' en DVD... 'Mommy', je n'irai pas. Je sais ce que c'est. Les trois quarts des films, on sait ce que c'est juste par le petit récit qu'il y a dans Pariscope. 'Un aviateur aime une dentiste...'". Xavier Dolan, qui était très ému par son prix, appréciera.