Emmanuel Macron accorde une longue interview à "L'Express". Au cours de ce dernier, le chef de l'Etat a notamment évoqué la crise de l'autorité en France, qu'elle soit politique et surtout désormais scientifique, dans le contexte de la crise sanitaire actuelle. "Toutes les sociétés contemporaines vivent cette espèce d'horizontalisation de la société, de la contestation de toute forme d'autorité, y compris de l'autorité académique et scientifique", a estimé le chef de l'Etat.
"Les controverses scientifiques se déploient sur les chaînes d'information et les réseaux sociaux, alors l'inquiétude gagne", a poursuivi Emmanuel Macron. "Le problème clef pour moi, c'est l'écrasement des hiérarchies induit par la société du commentaire permanent : le sentiment que tout se vaut, que toutes les paroles sont égales, celle de quelqu'un qui n'est pas spécialiste mais a un avis sur le virus vaut la voix d'un scientifique", a-t-il décrit.
Le président de la République a souligné la responsabilité des médias dans la diffusion de ce "poison qui nous menace". "On observe aujourd'hui un processus de déconstruction de tous les discours, qu'il s'agisse d'un discours politique, d'organisation ou de vérité (...) Vous voyez bien que le moindre discours, la moindre annonce, est suivi de plusieurs heures de commentaires. Cela, c'est précisément un processus de déconstruction accélérée. A la fin de la soirée, ceux qui sont restés devant leur télévision se demandent : 'Finalement, qu'est-ce qu'il a dit ?'", a-t-il analysé. Et d'ajouter : "Le commentaire ne peut être permanent, il faut revenir aux faits, à qui parle, sur quoi, avec quelle légitimité et quelle responsabilité. C'est crucial. Car le relativisme délitant tout, il nourrit la défiance et affaiblit, à la fin, la démocratie. Chacun doit donc prendre ses responsabilités pour changer cela".
Selon le chef de l'Etat, nous sommes entrés "dans une société de l'émotion permanente et donc de l'abolition de toute acceptation de la complexité". "Nous sommes devenus une société victimaire et émotionnelle. La victime a raison sur tout. Bien sûr, il est très important de reconnaître les victimes, de leur donner la parole, nous le faisons. Mais dans la plupart des sociétés occidentales, nous assistons à une forme de primat de la victime. Son discours l'emporte sur tout et écrase tout, y compris celui de la raison", a-t-il conclu.