Il entame sa septième saison en tant que directeur des programmes des radios du groupe NRJ. Alors que la principale station du groupe entame une rentrée sans grand changement, puremedias.com s'est entretenu avec Morgan Serrano pour évoquer cette nouvelle saison mais également la nouvelle politique de NRJ et des autres stations du groupe.
Propos recueillis par Kevin Boucher.
puremedias.com : La rentrée de NRJ se fait dans une stabilité quasi-totale : Manu Lévy entame sa sixième saison à la matinale, Cauet sa septième en soirée, Guillaume Pley sa sixième et MiKL sa deuxième. Stabilité est clé de succès ?
Morgan Serrano : Oui, ça fait six ans que nous avons de bons résultats sur les tranches de divertissement et aussi de musique. Et c'est plutôt bon signe d'avoir une grille à simplement renouveler plutôt qu'à changer. On ne veut pas changer pour changer. Quand on sentira une faiblesse, on se posera peut-être des questions mais tant que nous sommes numéro 1 le soir et que le morning de Manu cartonne, on continue.
Malgré tout, sur la vague avril-juin 2016 - marquée par l'éviction de Fun Radio, accusée d'avoir triché -, NRJ a perdu son leadership et égaré 443.000 fidèles. Vous pensez inverser rapidement la tendance, voire repasser devant RTL ?
On faisait 12 points le 15 avril. Il y a eu l'affaire Médiamétrie donc je ne sais pas vraiment quelle est l'audience de NRJ sur les trois derniers mois mais, globalement, on est entre 11 et 12 depuis trois ans. Moi, je ne réagis pas sur les trois derniers mois un peu bancals, on sait pourquoi. Je vais plutôt attendre de voir comment va se passer cette saison. Et même avec la polémique Médiamétrie, nous étions loin devant nos concurrents.
Après, la vocation de NRJ est d'être première radio de France et de se battre avec RTL sur ce créneau. Nous serons toujours agressifs comme nous l'avons été cette saison sur le terrain, dans les programmes, dans les opés, dans les émissions... Mais RTL est première radio de France grâce aux plus de 75 ans.
Sur les tranches incarnées, Manu Lévy reste largement leader le matin sur les musicales. Vous vous êtes déjà positionné sur une saison 7 avec lui ?
Non (Rires). Franchement, nous n'y avons pas encore pensé. Avec Manu, nous avons une relation un peu particulière. Vu de loin, ça peut paraître bizarre mais Manu, ça fait quinze ans que nous nous connaissons, nous avons toujours travaillé ensemble et tout se passe bien. Les questions de contrat, ce sont des questions que nous nous posons quinze jours avant ! On fait de la radio à l'ancienne un peu. Nous nous amusons, nous essayons de trouver des idées mais le contrat de la saison prochaine, nous en parlerons le mois qui précède.
Le soir, vous conservez le leadership mais Cauet et Guillaume Pley ont tous deux vu leurs audiences baisser sur les deux dernières vagues. Est-ce la fin d'un cycle ?
Comme je vous l'avais dit, si nous avions fait l'interview le 15 avril, nous étions au taquet. Si nous ne prenons qu'avril-juin, il y a effectivement eu une baisse mais nous ne savons pas si elle est validée, compte tenu de l'affaire Médiamétrie. C'est le discours que j'ai tenu à mes équipes : avril-juin, on ne sait pas ce qu'on fait, peut-être qu'on baisse, peut-être qu'on ne baisse pas, mais on ne va pas se baser là-dessus. On se concentre sur cette saison et si on baisse, on avisera. Mais moi, pour l'instant, je fais confiance aux équipes du soir puisque nous restons premiers quoi qu'il arrive et je suis incapable de dire si on baisse ou non.
Vous êtes depuis deux saisons sur un créneau étonnant avec MiKL : le 0h-4h !
Je suis un passionné de radio, j'ai toujours écouté la radio, matin, midi, soir et nuit aussi. Et j'ai toujours eu un peu plus d'affection pour les radios qui pensaient aux auditeurs la nuit et pas seulement à faire du business la journée. Pour moi, c'est important de proposer une émission aux auditeurs qui vivent ou travaillent la nuit plutôt que délaisser cette tranche parce qu'il n'y a pas de revenus publicitaires. Mon boulot, c'est de faire plaisir aux auditeurs, pas uniquement de faire rentrer de l'argent.
Mais la tranche reste rentable malgré tout ?
Honnêtement, je n'en sais rien. Nous ne nous posons pas la question, nous n'avons même pas regardé. Mais je ne pense pas que ce soit super rentable ! (Rires)
Si la grille est stable dans son ensemble, Guillaume Pley perd lui une heure d'émission (désormais sur le 22h-0h).
C'est Guillaume qui voulait finir un peu plus tôt, étant donné qu'il fait pas mal de choses cette année. L'idée, c'est qu'il ne soit pas fatigué non plus. Nous voulons que nos animateurs restent frais. MiKL était content de récupérer une heure, Guillaume ça l'arrangeait de se reposer un petit peu... Tout le monde est content.
La relève est déjà prévue aux soirées ? Chaque année, des rumeurs circulent sur un départ de Cauet et une promotion de Guillaume Pley.
Mon rôle est d'être toujours paré à toute éventualité. Donc évidemment, j'ai des idées sur ce que je ferais si Manu, Cauet ou Guillaume nous quittait. Mais je ne vous le dirai pas ! (Rires)
Il y a une particularité sur la quasi-totalité des radios musicales, c'est l'absence de femmes à la tête d'une émission... La tendance pourrait changer chez vous ?
Tout est possible. Certaines radios aujourd'hui disent "On a mis des femmes" mais il y avait des filles au morning de Skyrock il y a quinze ans déjà, donc ce n'est pas nouveau... La seule différence, c'est qu'il y a peu de filles. Déjà, il y a peu de gens capables de faire de la libre-antenne. Et je parle de très bonne libre-antenne, de la libre-antenne de qualité, avec un animateur qui sait tenir une libre-antenne, qui sait apporter du contenu et se renouveler tous les jours.
Et par conséquent, étant donné qu'il y a moins de filles qui font de la radio, il y en a encore moins donc capables de faire de la libre-antenne. Demain, j'ai une fille qui vient, qui a beaucoup de talent et qui sait tenir une libre-antenne, je la mets de suite à l'antenne. Mais je ne veux pas faire de discrimination positive : mon rôle est de prendre les meilleurs, les plus compétents. Juste, je ne mettrai pas de filles pour mettre des filles.
La majeure partie de la grille de NRJ reste tout de même la musique. Quelle est la politique de programmation ? Certains artistes sont moins présents voire totalement absents aujourd'hui de la playlist, Mylène Farmer ou M. Pokora par exemple.
Les choses évoluent. Vous citez Mylène Farmer, qui a été NRJ pendant plus de vingt ans. Mais au bout d'un moment, j'ai estimé qu'elle ne rentrait plus dans la playlist de NRJ, radio faite pour les 13-30, 13-35 ans. Mais il y a d'autres radios dans le groupe, comme Chérie FM, plus adaptée pour moi aux titres de Mylène Farmer.
Pour M. Pokora, nous avons tout joué quand même. Mais son dernier gros tube, c'est quand même "A nos actes manqués" de Jean-Jacques Goldman, que nous avons joué 800 fois. Après, je vous l'accorde, d'autres singles n'ont pas eu le succès escompté mais nous les avons joués, comme avec tous les artistes avec qui nous sommes partenaires.
Un reproche est souvent fait à NRJ mais aussi à ses concurrentes, c'est le matraquage de certains titres et le peu de nouveautés. Vous vous imposez un pourcentage de nouveaux titres dans la playlist ?
Non non, ça se fait vraiment au feeling, il n'y a pas de loi. Hier, nous avons rentré huit nouveautés par exemple, et peut-être qu'il n'y en aura que deux la semaine prochaine. Et peut-être qu'il y aura des semaines sans, ce qui est très rare. Et des fortes rotations, oui, il y en a. Quand on a travaillé sur un disque, quand on l'a découvert, quand on l'a fait progresser, quand les gens le plébiscitent, il se retrouve en haut des rotations mais il y a deux mois de travail derrière.
Pour vous donner un exemple, "Duele el Corazon" d'Enrique Iglesias, nous étions les seuls à le jouer en avril et c'est devenu un tube en juillet. Après, quand il y a dix radios sur le même titre, ça va effectivement plus vite. Mais nous essayons de nous démarquer au maximum et d'être les premiers à lancer certains disques. Mais quand les auditeurs viennent sur NRJ, c'est pour écouter les hits, donc nous devons leur proposer et c'est notre promesse.
Du côté des autres stations du groupe, la fin de saison a été particulière pour Rire & Chansons puisque la matinale de Pascal Gigot s'est brutalement interrompue fin mai.
Ca ne marchait pas. Nous avons lancé l'émission en septembre et nous n'avons jamais eu de bons sondages. Donc au bout d'un moment, nous nous sommes dit que nous n'allions pas repartir. Quand la décision a été prise, nous l'avons annoncé à Pascal et nous avons décidé d'arrêter de suite. Nous aurions pu continuer deux mois de plus mais vu que la décision était prise...
Le groupe NRJ possède des radios ainsi que des télévisions. Comptez-vous faire appel aux animateurs de NRJ 12 à l'avenir sur NRJ, comme Martial par exemple ?
S'il fait une bonne maquette et que je le trouve super bon en radio, Martial sera sur NRJ. Mais pour moi, la radio, c'est un métier. Ce n'est pas parce que des personnes sont sur NRJ 12 ou d'autres chaînes qu'ils peuvent faire de la radio, la télévision n'est pas une valeur ajoutée. La radio, ça doit être une passion, un métier, une expérience. NRJ, c'est le PSG. Et on ne commence pas par le PSG.
On sait Jean-Paul Baudecroux très attaché à son groupe, au point qu'il est lui-même intervenu sur la grille de NRJ 12 l'an passé. Côté radio, intervient-il dans les grilles de programmes ?
Jamais. Ca fait six ans que je suis là, jamais Jean-Paul ne m'a obligé à faire quoi que ce soit ou n'est intervenu dans le quotidien. Je le tiens évidemment au courant des changements. Mais il m'a toujours soutenu dans mes choix et m'a accordé beaucoup de confiance. C'est pour ça notamment que je suis toujours chez NRJ.
Enfin, avant d'arriver sur NRJ, vous étiez sur Fun Radio où vous officiiez en tant que directeur des programmes mais aussi en tant qu'animateur. Vous n'avez pas envie de reprendre le micro ?
Ca me manque parfois, oui. J'ai arrêté en 2010 quand j'ai quitté la libre-antenne de Fun. Mais c'est compliqué... C'est compliqué en France d'avoir plusieurs étiquettes. Quand j'étais sur Fun, on retenait que j'étais animateur, pas directeur des programmes. Et quand je suis arrivé sur NRJ, j'ai choisi de n'avoir qu'une casquette, et donc d'arrêter l'animation. Mais il faudrait que je reprenne. S'il y a un trou sur NRJ, je pourrais le combler ! (Rires)