Acteur, auteur, humoriste, cascadeur, pilote de course. Son parcours fait penser à une célèbre réplique de Marie-Anne Chazel dans "Les Visiteurs". Après deux saisons passées comme chroniqueur dans "Le Supplément", Stéphane de Groodt s'apprête à quitter l'émission de Maïtena Biraben sur Canal+.
En guise de baroud d'honneur, la production de l'émission a décidé de lui consacrer un prime évènement baptisé "De Groodt, une fois !", mardi soir à 20h55. A cette occasion, puremedias.com a demandé à ce Belge autodidacte et amoureux de la langue française les raisons de ce départ en pleine ascension mais aussi les projets qui l'animent désormais.
Propos recueillis par Benjamin Meffre.
puremedias.com : Consacrer un prime d'hommage au chroniqueur d'une émission, ce n'est pas banal comme démarche...
Stéphane de Groodt : Ah non ça, je vous le confirme. Je suis moi-même spectateur de tout ça. Je suis très honoré mais je pense que je vais digérer l'affaire en le voyant mardi (l'émission est enregistrée, ndlr). C'est tellement énorme ! En général, on consacre ça à des gens qui ont 50 ans de carrière ou qui sont en fin de parcours et encore. Là, je trouve que c'est couillu de la part de Canal de faire ça. C'est formidable ! C'est vraiment un beau cadeau. Je prendrai le temps de déguster tout ça mardi.
Qu'est-ce qu'on pourra voir dans cette émission spéciale ?
Il y aura des surprises, un best of de mes chroniques, Dany Boon qui va se prêter à l'exercice de la chronique, Alex Lutz qui vient faire un happening. Et puis il y aura des séquences qui retracent un peu le parcours que j'ai pu emprunter pour en arriver là.
Votre rencontre avec Nabilla a fait le buzz et vous a fait prendre une nouvelle dimension ? Est-ce qu'on peut espérer la voir revenir dans ce prime ?
On la verra dans la séquence best-of, ça c'est sûr.
Pourquoi arrêter "Le Supplément" ?
Ça fait deux ans et demi que j'écris mes chroniques avec six mois de matinale et deux saisons pour "Le Supplément". C'est déjà une bonne période de travail hebdomadaire sans s'arrêter. Ça me prend beaucoup de temps, d'énergie, d'inspiration. D'abord, je n'ai pas envie de lasser les gens avec ce type d'écriture. Je n'ai pas envie de me lasser moi-même. Et puis surtout, j'ai la chance d'avoir le cinéma qui frappe à la porte en tant que comédien, qu'auteur, que réalisateur. Ça me permet de revenir à mon métier premier. J'ai eu tout ce que je pouvais imaginer de bien avec cette chronique, même bien au-delà. Ça m'a fait changer de statut. Je pense que c'est le bon moment pour passer à autre chose.
Que vous ont justement apporté ces deux saisons à la télévision ?
Ça m'a surtout permis de venir avec un univers qui était le mien. Il n'était pas très exportable jusqu'alors car c'est un univers très singulier, très décalé, très barré. Et là, grâce à Canal, j'ai eu un écrin formidable où j'ai pu assumer et évoluer dans cet univers qui m'est totalement propre et fait partie de mon intime absolu. Je suis venu vraiment avec ce que je suis dans cette émission. Le fait d'avoir été sincère, d'être plus dans l'ironie que dans le cynisme, d'être bienveillant a, je crois, bien fonctionné. Ça a plu aux gens qui ont vu qu'il y avait du travail derrière. Ça m'a apporté beaucoup de succès et une grosse visibilité que je n'avais pas. Ça m'a vraiment fait changer de statut.
La télévision est-elle un incontournable accélérateur de carrière pour tout comédien ?
Pas toutes les télés et pas tous les exercices. Je pense que Canal a ce privilège-là. Celui de révéler des gens ou de confirmer des gens pour le cinéma. On l'a vu avec bien des comédiens que ce soit "Omar et Fred", Guillaume Gallienne et bien d'autres. Canal vous laisse une vraie liberté, vous permet d'être ce que vous êtes. Cette mise en lumière-là, c'est une des manières d'accéder au cinéma même s'il y en a d'autres. Moi, n'étant pas dans cette filière-là avant, ma chance a été d'être sur Canal, d'avoir du succès sur Canal et d'avoir une belle visibilité. Ce qui est sûr, c'est que c'est grâce à Canal que je peux maintenant avoir une nouvelle vie.
Est-ce qu'il y a autant d'adrénaline sur un plateau que sur un circuit automobile ?
Il y a une émotion, une excitation que je peux retrouver avant le lever de rideau au théatre, avant que les lumières s'allument sur un plateau de télévision, avant qu'on dise action sur un plateau de cinéma ou sur un circuit. Il y a une excitation commune. Et moi, j'ai envie de ressentir des choses quand j'exerce mon métier.
Est-ce que vous avez l'impression d'avoir un peu contribué à réhabiliter la langue française à la télévision à une époque où elle est souvent très malmenée dans d'autres programmes ?
Je pense que tout était là avant que j'arrive. Moi, je n'ai fait que me baisser et ramasser des mots pour les mettre dans un ordre qui moi me plaisait. Je n'ai rien inventé. Le jeu de mots existe depuis que les mots existent. Je suis juste revenu avec un mode opératoire qu'on avait déjà vu à travers l'exercice d'autres personnages.
C'était quand même un exercice qui avait un peu disparu de la télé ?
Oui, c'est vrai. Mais je pense que c'est un exercice qui revient en fonction d'une personnalité, de quelqu'un qui s'approprie ça. Il faut venir avec sa propre personnalité, sa propre singularité. Moi, je suis venu avec ça parce que ça me touche. Et les gens le sentent quand on vient avec quelque chose de singulier, de personnel et qui n'est pas une posture. C'est pour ça que ça a fonctionné. Si j'avais juste emprunté des techniques à quelqu'un d'autre, j'aurais passé mon tour comme d'autres chroniqueurs ou comédiens. Ce métier est fait d'originalité et de sincérité.
Vous avez reçu en mars le prix Raymond Devos (qui récompense un artiste dont l'oeuvre ou l'action contribue au progrès de la langue française, à son rayonnement et à sa promotion, ndlr) des mains de la ministre de la Culture, qu'est-ce que ça vous fait ?
J'étais très sensible à ce que la ministre vienne elle-même me remettre le prix à deux heures de route de Paris. J'ai été touché par ça. J'ai été aussi très honoré d'avoir un prix "Raymond Devos" et de voir qui l'avait eu avant. De voir que je m'inscrivais dans cette lignée de gens que j'estime comme François Morel ou Guillaume Gallienne. Et puis le fait de recevoir un diplôme, un prix de la part de l'institution alors que moi je suis toujours passé à côté... Je n'ai jamais eu de diplôme, de reconnaissance scolaire ou académique. Ce prix est donc un clin d'oeil, une pirouette qui m'amuse et me touche.
Quels sont vos projets désormais ? Le cinéma uniquement et plus de télévision ?
Non, moi je ne suis fermé à rien. On discute avec Canal d'autres projets télé sous une autre forme. Et puis je vais me consacrer évidemment à l'écriture de mon long-métrage produit par Dany Boon. Je vais aussi tourner cet été un film de Patrice Leconte et à la fin de l'année un autre film avec Isabelle Carré et Alex Lutz notamment. Et puis, il y a d'autres projets...
En télévision, qu'est-ce que vous aimeriez faire désormais ? Plus le même rôle qu'avant on imagine?
Non, plus vraiment. On discute avec Canal. On a envie de continuer quelque chose ensemble. Dès qu'on aura trouvé la bonne idée, on s'y mettra.