J+7. Une semaine après l'annonce officielle de l'échec de la fusion des groupes TF1 et M6, l'écosystème médias s'emballe. Les candidats au rachat du groupe M6, que Bertelsmann souhaite toujours vendre, ont jusqu'à ce vendredi soir pour se faire connaître. TF1, de son côté, annonce dans le même temps dans un communiqué l'arrivée de Rodolphe Belmer en qualité de PDG du groupe, à compter du 13 février 2023. Il y retrouvera notamment Ara Aprikian, aujourd'hui directeur des programmes de TF1, et comme lui ancien dirigeant au sein du groupe Canal+.
S'il succédera officiellement poste pour poste à Gilles Pélisson, rattaché au groupe Bouygues comme directeur général adjoint en charge des médias et du développement, en début d'année prochaine, Rodolphe Belmer débutera dans ses nouvelles fonctions de directeur général dès le jeudi 27 octobre. De Canal+, où il a connu les grandes années, à "Brut" en passant par Netflix, puremedias.com donne une ébauche du profil du futur nouveau boss de la Une.
Sa mission sera de "gérer (...) la réinvention de TF1 pour faire face aux plateformes" de streaming vidéo comme Netflix ou Amazon, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier. Des acteurs délinéarisés que Rodolphe Belmer a bien identifiés : il est membre du conseil d'administration du géant américain Netflix depuis 2018.
"Nous saurons (...) répondre aux multiples enjeux du nouveau monde des médias et ouvrir au groupe TF1 de nouvelles perspectives de développement et de croissance à l'ère" du numérique, a-t-il aussi affirmé dans le communiqué de TF1. Des usages numériques dont il est familier puisque Rodolphe Belmer a intégré en 2018 le conseil d'administration de "Brut", le média vidéo fondé par Renaud Le Van Kim, Roger Coste, Guillaume Lacroix et Laurent Lucas, tous quatre des anciens piliers de Canal+.
Au-delà de ces récentes activités, le quinquagénaire évolue depuis plus de vingt ans dans le secteur de l'audiovisuel, qu'il a marqué de son empreinte. A 53 ans, le nouveau boss de la Une s'est forgé une solide expérience. Si ce diplômé de HEC - promotion 1992 - débute dans le marketing (Procter & Gamble) et le conseil médias (McKinsey), Rodolphe Belmer rejoint, à l'aube du XXIe siècle déjà, un grand groupe médias. En octobre 2001, il prend, en effet, les rênes de la stratégie et du développement de Canal+ Distribution et CanalSatellite.
Il passe ensuite quelques mois à la direction du marketing et de la stratégie avant de décrocher le poste de directeur général délégué dans lequel il a les coudées franches et revient aux fondamentaux. C'est lui qui lance notamment "Le grand journal" avec Michel Denisot, présenté à l'époque comme un "'Nulle part ailleurs' ripoliné", comme le rappelle "Libération".
"Il fait son chemin au sein de la chaîne cryptée, développe aussi les séries maison", complète "Les jours". Et le succès est au rendez-vous ! Les créations originales - "Les revenants", "Braquo", "Engenages" - permettent à Canal+ de gonfler son parc d'abonnés et au futur président du festival SériesMania, qu'il est encore aujourd'hui, d'asseoir sa stratégie.
Le départ en 2008 d'Alexandre Bompard, proche de Bertrand Méheut, pour Europe 1, lui laisse le champ libre pour prendre la tête du groupe crypté. Il est nommé directeur général du groupe Canal+, autrement dit numéro 2, en 2012. Mais Vincent Bolloré, à qui Rodolphe Belmer a racheté Direct 8 à l'époque pour tourner Canal+ vers la télévision gratuite, lui coupe l'herbe sous le pied et empêche le "successeur désigné" de Bertrand Méheut de gravir la dernière marche.
Au moment de son entrée au capital de Canal+ avec Vivendi, le milliardaire lui a préféré, en 2015, son fidèle "Monsieur loyal", comme le surnomme "Le Monde" dans un portrait, Maxime Saada. "Il était reproché à Belmer", écrivait "Le Point" en 2015, "de ne pas avoir fait le grand ménage dans la tranche 19 heures-21 heures", minée par les audiences décevantes du "Grand journal", dont le coût de production n'a pas baissé... "Des échecs" sont à mettre à son crédit, ajoute "Libération", tels que "la matinale et l'émission du midi de Canal+ et la chaîne info i-Télé, distancée par BFMTV".
Après son renvoi de Canal+, et avant que Gilles Pélisson ne soit nommé en février 2016, le nom de Rodolphe Belmer était évoqué pour le poste de PDG de TF1, qui va finalement lui échoir sept ans plus tard, rappelle l'AFP. Finalement, l'année de son éviction, en 2015, Delphine Ernotte, tout juste nommée à la tête de France Télévisions, fait appel à lui pour créer et animer un comité d'orientation stratégique au sein du groupe audiovisuel public.
Il enchaîne, à partir de mars 2016, avec d'autres responsabilités. Il est nommé directeur général de l'opérateur satellite Eutelsat Communications avant de rejoindre le 1er janvier dernier en tant que directeur général le groupe informatique français Atos. Un poste qu'il n'a occupé que pendant six mois, précise l'AFP, et qu'il a quitté sur fond de rumeurs de désaccords avec le président du conseil d'administration Bertrand Meunier.