Certains lecteurs belges ont sans doute cru avoir des problèmes de vue en découvrant la Une de leur quotidien "L'Avenir" ce matin. En effet, la première de couverture a été entièrement floutée et barrée d'un gros bandeau sur lequel on peut lire "L'Avenir est flou". Si le jeu de mot fait sourire, la réalité qu'il décrit est beaucoup plus sombre. En effet, les rédactions contestent le plan annoncé par la direction le 23 octobre dernier, qui consisterait à supprimer 25% du personnel, soit 60 équivalents temps plein sur 280 travailleurs.
Les coupes porteraient principalement sur les rédactions et les services commerciaux, même si le flou demeure encore. Une incertitude qui pèse sur les nerfs des salariés. "Pour toute réponse, il (le personnel) n'a eu que des colonnes de soustractions. Celles des têtes qui doivent tomber. Service par service. Des gens seront dégagés, mais qui ? Pas de réponse. D'autres seront déplacés dans d'autres services (et rédactions régionales). Qui et où ? Pas de réponse", peut-on lire sur le site de "L'Avenir".
Si ces suppressions de postes sont confirmées, les salariés estiment qu'ils ne seront plus en mesure de faire leur travail correctement. Le mois dernier, dès le lendemain de l'annonce de ce plan, ils avaient déjà réagi en Une en titrant : "Un quart de notre personnel menacé, un quart de votre journal aussi". Symboliquement, toutes les pages avaient été amputées d'un quart de texte. Ces derniers jours, "L'Avenir" a publié également des dessins de presse concernant cette restructuration.
"Cette transformation est indispensable pour garantir un futur à notre journal. Nous la mènerons dans le respect de chaque collaborateur", a assuré Jos Donvil, le directeur des Editions de L'Avenir. Détenu depuis 2013 par le groupe Nethys, le deuxième titre francophone belge en audience cumulée (papier, internet et digital) a connu une baisse de ses ventes en 2017, de l'ordre de 8% selon "Le Monde", quand les ventes des autres quotidiens francophones ont chuté en moyenne de 6,9%.
Si aucune concession n'est obtenue, les salariés de "L'Avenir" sont prêts à laisser leur sourire au placard et à franchir un nouveau cap, comme ils l'expliquent en toute transparence : "Si l'option d'actions plus dures n'a pas été retenue cette fois, il n'est pas exclu que ce soit le cas la semaine prochaine si les travailleurs n'y voient pas plus clair quant au sort que leur réserve la direction". Un nouveau conseil d'entreprise entre les représentants du personnel, l'Association des journalistes professionnels et les membres de la direction doit se tenir lundi.