Il y a des ruptures moins douloureuses que d'autres. Samedi, à la veille de la Saint-Valentin, Vivendi a annoncé dans un communiqué sa volonté de se séparer de sa filiale Universal Music Group (UMG), numéro un mondial de la musique, véritable pépite de ce groupe spécialisé dans la culture, le divertissement, les médias et la communication et dont le premier actionnaire n'est autre que Vincent Bolloré. Un pari finement calculé : une nouvelle société regroupant les titres d'UMG devrait être actée lors d'une assemblée générale extraordinaire organisée le 29 mars prochain.
Au sein de cette nouvelle société, 60% des titres seront redistribués aux actionnaires actuels de Vivendi - le groupe Bolloré détiendra en direct 16% - avant une introduction en Bourse. Vivendi conservera de son côté 20% d'UMG ; les 20% restants étant détenus par le groupe chinois Tencent, qui a déboursé pas moins de 6 milliards d'euros pour s'offrir une partie du champion mondial qui édite des artistes tels que Justin Bieber ou Lady Gaga et qui évolue au sein de la galaxie Vivendi depuis plus de 20 ans.
C'est justement l'opération réalisée avec ce dernier qui a convaincu Vivendi de faire le grand saut. "Le président du Directoire (Arnaud de Puyfontaine, ndlr) avait fixé un objectif de valeur d'entreprise minimum pour UMG de 30 milliards d'euros", peut-on lire dans le communiqué qui souligne que "l'opération de cession (avec Tencent, ndlr) qui s'est finalisée il y a quelques jours" s'est déroulée sur cette base.
Avec 20% d'Universal Music Group, Vivendi disposera potentiellement de 6 milliards d'euros en plus des 6 milliards versés par Tencent, sommes colossales auxquelles s'ajoutent des lignes de crédits disponibles à hauteur de 10 milliards d'euros. De quoi satisfaire ses grandes ambitions : le groupe contrôlé par Vincent Bolloré n'ayant pas caché sa volonté de se renforcer dans le domaine des médias avec dans sa ligne de mire des actifs aussi puissants que le groupe M6, dont l'Allemand Bertelsmann a ouvert la voie à une cession ou Europe 1, propriété du groupe Lagardère, dont Vivendi est devenu le premier actionnaire.
Les grandes manoeuvres ont débuté depuis plusieurs mois à présent avec la "promesse d'achat" signée fin décembre en vue d'acquérir le groupe de presse Prisma Media ("Télé Loisirs", "Voici", "Capital") ou la prise de participation à hauteur de 9,9% - après en avoir acquis dans un premier temps 7,6% - au sein du groupe espagnol de presse Prisa, qui édite notamment "El Pais" et est actionnaire à 15% du "Monde". Fin 2020, Vivendi a également pris 12% du capital de Multichoice, le premier acteur de télévision payante en Afrique.