Cachez ce film que je ne saurais voir ! "Cinquante nuances de Grey" est sans aucun doute la plus grosse sortie cinéma du jour d'un point de vue marketing. Pourtant, c'est un film que les journalistes n'ont pas eu le droit de voir. Contrairement aux habitudes de la profession, Universal, qui distribue le film en France, a choisi de ne pas organiser de projections de presse qui permettent aux médias de préparer leurs critiques pour le mercredi matin.
Une seule et unique projection a eu lieu hier matin, avec des journalistes triés sur le volet. Tous devaient respecter une règle drastique : aucune critique ne devait paraître dans la presse avant ce matin, 10h. Du jamais vu selon les journalistes spécialisés dans le cinéma qui n'ont pas hésité à dénoncer et à ironiser sur la manoeuvre.
C'est évidemment une stratégie délibérée du distributeur pour éviter qu'une critique négative ne vienne ternir le fantasme provoqué par la plastique de Jamie Dornan, et par la subversion supposée de l'adaptation du roman de E. L. James (la production a promis 20 minutes de scènes de sexe). Universal qui n'a pas lésiné sur la promotion, aussi bien sur Internet qu'en affichage, redoutait qu'un mauvais bouche à oreille dissuade les spectateurs de se ruer en salles dès les premières séances, empêchant ainsi la production de communiquer triomphalement sur les chiffres d'exploitation des premiers jours.
Pourtant, les quotidiens français n'ont globalement pas respecté l'embargo. "Le Parisien" a contourné la règle en se rendant aux avant-premières organisées à New York. Le quotidien considère que le film est "plus drôle et plus enlevé que le roman". "Libération" a bravé l'interdit en publiant ce matin une page qualifiant "Cinquante nuances de Grey" de "soupe maso aussi peu subversive que le best-seller". "Dans le fond, en deux heures, il n'y a de supplice que pour une seule personne : le spectateur", ajoute le quotidien. Idem pour "Le Figaro", très virulent, qui compare le film à "Emmanuelle" avec la regrettée Sylvia Kristel. "L'acteur a le sex-appeal d'un brocoli", écrit même, cinglant, Eric Neuhoff, pour qui le film ne "vaut pas un clou".
Aux Etats-Unis, où le film sort vendredi, les quelques critiques sont également mitigées. Selon le site Rotten Tomatoes, le film récolte 60% de critiques positives sur les 18 déjà sorties (en guise de comparaison "Imitation Game" est à 89% sur 225 critiques). Le film est "mieux écrit que le livre" selon "Entertainment Weekly". IndieWire est beaucoup plus sévère, évoquant un film "aussi ridicule qu'attendu".