C'est l'un des succès ciné de cette fin d'année. Sorti mercredi en salles, "La Famille Bélier" jouit d'excellentes critiques et d'un bouche à oreille qui semble être très bon. Cette comédie française d'Eric Lartigau - réalisateur de "Mais qui a tué Pamela Rose ?", "Prête-moi ta main" et "L'Homme qui voulait vivre sa vie" - connaît déjà un joli succès. Sur la seule journée de mercredi, 117.000 spectateurs se sont précipités en salles et les chiffres des cinq premiers jours d'exploitation, qui seront diffusés dans la journée, s'annoncent déjà excellents.
"La Famille Bélier" connaît également un joli succès du côté des ventes de disques puisque la reprise de "Je vole" de Michel Sardou par Louane Emera, demi-finaliste de la saison 2 de "The Voice, la plus belle voix" en 2012 sur TF1, est dans le top 10 des meilleures ventes de titres sur iTunes depuis mercredi. Par ailleurs, la jeune comédienne de 18 ans figure dans la liste des pré-nommées au César du meilleur espoir féminin face à Lou de Laâge, Joséphine Japy ou encore Sofia Lesaffre.
Mais à l'instar d'"Intouchables" et "Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ?", jugés racistes aux Etats-Unis, "La Famille Bélier" ne fait pas l'unanimité hors des frontières françaises. En effet, le film qui sortira prochainement en Argentine, au Brésil, en Colombie, en Allemagne et en Espagne a vivement déplu à une journaliste britannique. Dans une tribune postée sur le site du Guardian, Rebecca Atkinson dénonce ainsi "une nouvelle insulte cinématographique à la communauté sourde".
"Pour la communauté sourde, le film est moins 'feel-good' que 'feel-bad', insensé et présente une fois encore sous un faux jour les sourds" lance la journaliste, sourde de naissance, qui s'en prend au sujet du film. "La fascination des personnes entendantes pour la relation entre musique et surdité ne touche pas la majorité des sourds. Peut-être si vous avez perdu l'ouïe, oui, mais si vous êtes né sourd comme moi, ce n'est pas quelque chose qui vous empêche de dormir" assure-t-elle.
Rebecca Atkinson dénonce aussi "la paresse" des scénaristes, assurant que des histoires semblables ont déjà été portées à l'écran, et de meilleure manière. Autre point qui agace la journaliste : faire appel à François Damiens et Karin Viard dans les rôles des parents sourds, et non à de vrais sourds-muets. "Vous ne pouvez pas trouver d'acteurs sourds ? Prenez juste quelques entendants et faites-leur bouger leurs mains" écrit-elle, dénonçant "un niveau de non-respect pour les sourds et de mépris pour la langue".
Pour elle, "le résultat est une interprétation embarrassante et grossière de la culture sourde et du langage des signes". Une critique déjà faite mais de manière plus mesurée par des journalistes et associations de sourds en France, jugeant notamment que l'expression du visage - essentielle en LSF - n'était pas suffisamment présente, empêchant une compréhension complète sans sous-titres pour les sourds. Mais, contrairement à Rebecca Atkinson, tous soulignent la qualité du film et la mise en valeur de la langue des signes.