Le miracle n'a pas eu lieu. Selon les chiffres dévoilés ce matin par Médiamétrie pour la période septembre/octobre, Europe 1 vient d'enregistrer sa pire rentrée historique. Un douloureux air de déjà-vu pour la station du groupe Lagardère, qui démarre sa saison au plus bas pour la troisième année consécutive. Une belle épine dans le pied aussi pour Laurent Guimier et ses équipes, qui ont bâti une toute nouvelle grille dans l'espoir de relancer enfin la station boiteuse.
Joint par téléphone par puremedias.com, le vice-président d'Europe 1 assure ne pas être surpris par ces chiffres catastrophiques. "C'est la preuve irréfutable qu'on n'arrête pas une hémorragie en 80 jours", explique Laurent Guimier, qui, faute de mieux, se rassure avec "les retours très majoritairement favorables" des auditeurs.
Garantissant qu'il a toujours la pleine confiance d'Arnaud Lagardère avec qui il échange "au quotidien", le patron d'Europe 1 compte désormais sur le déploiement en janvier d'une nouvelle signature et d'un plan de communication pour permettre à la station de rebondir. "Pourquoi des auditeurs nous rejoindraient alors qu'ils n'ont pas entendu parler du nouvel Europe 1 ? Il faut qu'on ait le temps mais aussi les moyens - et on est en train d'y travailler - pour faire savoir qu'Europe 1 a changé", fait valoir Laurent Guimier. "Europe 1 a raté ses dix dernières campagnes de rentrée. Cette fois, nous n'avons pas mis la charrue avant les boeufs. Nous avons pris le temps de travailler notre ton avant de communiquer parce que nous voulons réussir la prochaine campagne", ajoute celui qui se dit persuadé que "le temps fera l'affaire".
Si le vice-président d'Europe 1 compte sur cette campagne pour arrêter l'hémorragie, "pas question" pour lui de procéder à des ajustements dans la grille, comme ont pu le faire ses prédécesseurs ces deux dernières années. "Aucun changement majeur n'est prévu à court terme", promet-il. L'ex-patron de la radio franceinfo affirme même sa volonté de conserver sa grille en l'état jusqu'à la fin de la saison. "Aucun départ" n'est donc à l'ordre du jour selon celui qui compte sur ses têtes d'affiches et ses recrues de la rentrée, dont Laurence Boccolini et Matthieu Bélliard. Malgré les audiences en forte baisse des matinées, nouvelle plaie ouverte en cette rentrée, Laurent Guimier réaffirme aussi sa confiance dans le "très gros potentiel" de Wendy Bouchard et Anne Roumanoff.
Mur porteur de la nouvelle grille et incarnation à lui seul du nouvel état d'esprit de la station, Nikos Aliagas n'est pas menacé non plus. Le nouveau matinalier, en charge du carrefour stratégique du 7h/9h, souffre pourtant d'une perte sèche de 154.000 auditeurs sur un an et d'une relégation derrière la matinale de France Bleu. "Il n'y aucun problème Nikos. Toutes les matinales info, à l'exception de France Inter, sont malmenées en cette rentrée. Notre matinale s'inscrit dans cette tendance. Il n'y a pas plus de désaveu de Nikos qu'il n'y en a de Jean-Jacques Bourdin ou d'Yves Calvi", veut ainsi croire Laurent Guimier.
Affirmatif concernant son matinalier, le patron d'Europe préfère en revanche rester discret sur la situation économique de la station. "On a perdu de l'argent en 2018", se contente-t-il de confirmer lorsque la question des finances est abordée. "Le rebond de l'antenne résoudra l'équation financière. Ce n'est pas en se disant qu'on est dans une situation financière grave qu'on va remonter l'audience", préfère souligner Laurent Guimier. Même discrétion sur les nouvelles mesures d'économie que pourraient entraîner ces nouvelles audiences décevantes. "Il y a une trajectoire d'économies décidée du temps de mes prédécesseurs. On la respecte. Et il n'y a pas de raison de penser qu'il faille la bouger", estime-t-il.
Après cette première vague douloureuse, le dirigeant se dit de toute façon "intimement persuadé" que l'orientation éditoriale de la station est la bonne. Contrairement à l'année dernière, Laurent Guimier observe qu'il n'y a "pas de rejet du produit". Il se défend aussi de faire fausse route en choisissant de miser sur la bienveillance, qui correspond selon lui à l'ADN d'Europe 1 depuis sa création. "Si nous étions dans l'ère du clash, pourquoi France Inter et France Culture rafleraient la mise ?", élude celui qui se rassure devant les audiences en baisse des nerveuses "Grandes Gueules" de RMC. Toujours est-il que, pour l'heure, pour Europe, bienveillance ne rime pas encore avec audience.
Benjamin Meffre & Pierre Dezeraud.