France Télévisions à l'aube du "big bang". Ce n'est un secret pour personne, Emmanuel Macron concocte depuis quelques mois une vaste réforme de l'audiovisuel public, considéré par le chef de l'État, très impliqué dans le dossier, comme "structuré sur le monde d'avant" et pas adapté aux nouveaux usages. Alors que le projet de loi est attendu pour la fin d'année, les grandes manoeuvres ont bien entendu commencé et de premières pistes de travail sérieuses commencent à émerger. Selon "Le Parisien", Delphine Ernotte et Sibyle Veil, patronnes respectives de France Télévisions et Radio France, ont d'ailleurs été reçues hier en toute discrétion à Matignon.
Si le discours officiel met en avant une nécessaire modernisation de l'audiovisuel public, la réforme passera évidemment par une réduction globale des coûts, que certains annoncent d'ores et déjà comme drastique. D'ici la fin du quinquennat, l'audiovisuel public devrait subir un coup de rabot dont la fourchette est estimée entre 200 et 500 millions d'euros et qui devrait principalement concerner France Télévisions. Le groupe dirigé par Delphine Ernotte a d'ailleurs déjà commencé à se serrer la ceinture cette saison en réduisant notamment ses investissements dans les programmes ou encore en renonçant à la mesure d'audience de France Ô.
Compte tenu de l'ampleur de la réforme, les contours de France Télévisions seront amenés à être modifiés en profondeur. Si une fusion entre France 3 et France Bleu, évoquée l'année dernière, n'est plus à l'ordre du jour, les deux entités vont tester, dès la rentrée, une matinale commune en Île-de-France. D'autres pistes d'économies plus drastiques sont aussi sur la table. La semaine dernière, nos confrères de "L'Opinion" évoquaient notamment une possible fusion de France 4 et France 5 ou encore une suppression de France Ô.
La disparition de France 4 du canal 14 ne semble en tout cas pas être un tabou. Invité hier des "4 Vérités" de Caroline Roux sur France 2, Gabriel Attal, porte-parole de LREM et membre de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée Nationale, s'est refusé à parler de suppression de la chaîne principalement dédiée à la jeunesse, préférant évoquer son basculement vers le numérique. "La question qui me tient particulièrement à coeur, c'est celle des jeunes. C'est eux qui, demain, paieront la redevance. Il est illusoire d'imaginer que les jeunes vont revenir vers du hertzien, du linéaire" a-t-il d'abord déclaré.
"Pour moi, il faut regrouper les talents et les moyens pour créer un vrai média digital. Je pense notamment à France 4 et au Mouv'" a-t-il poursuivi. "Il ne s'agit pas de supprimer des chaînes mais de mieux allouer les moyens sur le numérique pour s'adresser aux jeunes" a-t-il ensuite assuré, plaidant pour la création d'un "vrai média digital de production et d'édition de contenus en direction des jeunes sur le web". Comme l'ont observé nos confrères de "Quotidien" hier, une telle option n'est pas sans rappeler la destinée de BBC Three, chaîne dédiée aux jeunes du réseau britannique BBC, qui avait basculé sur le numérique en 2016.
Un basculement de France 4 sur le numérique entraînerait de facto la libération du canal 14 de la TNT. Selon "Le JDD", en date du 6 mai dernier, la direction de France Télévisions réfléchirait, dans cette optique, à y recaser franceinfo, sa chaîne d'information, qui vivote difficilement sur le canal 27. En l'espèce, un tel basculement semble compliqué à mettre en place et serait loin d'être indolore car il entraînerait dans le même temps la fronde des maisons SFR et Bouygues, bien décidées à protéger les intérêts de la puissante BFMTV et de la fragile LCI, qui se plaint d'ailleurs régulièrement de son isolement sur le canal 26.