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La justice interdit à "Mediapart" de publier une enquête sur Gaël Perdriau, Edwy Plenel fustige une "censure préalable"
Publié le 22 novembre 2022 à 11:55
Par Ludovic Galtier Lloret | Journaliste
Né en Isère entre le tirage de la première boule noire de l'histoire de "Motus" et la première visite de candidats à "Fort Boyard", Ludovic Galtier est journaliste à Puremédias depuis octobre 2021. Il est passionné par la politique, l'économie des médias et leur stratégie de programmation.
Le média d'investigation en ligne était sur le point de publier une nouvelle enquête sur les pratiques du maire de Saint-Étienne, avant que la justice ne l'en empêche.
"La justice ne peut pas être le rédacteur en chef de la presse", s'indigne Fabrice Arfi sur France 24 le mardi 22 novembre 2022.
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"Mediapart" censuré ! Son directeur de la publication, Edwy Plenel, a longuement expliqué dans un article publié en accès libre avoir reçu des mains d'un huissier de justice, le vendredi 18 novembre, un acte judiciaire ordonnant au média d'investigation "de ne pas publier une enquête d'intérêt public à la demande expresse" de Me Christophe Ingrain, avocat du maire de Saint-Étienne, Gaël Perdriau, dont "les pratiques politiques" avaient donné lieu à la publication d'une première enquête en septembre. "Mediapart" avait en effet révélé, enregistrements à l'appui, que le maire de la ville-préfecture de la Loire s'était adonné à un "chantage à la sextape" à l'endroit de son premier adjoint centriste, Gilles Artigues.

10.000 euros d'amende par extrait publié

"Mediapart n'était pas informé de cette procédure et l'ordonnance a été prise par un juge sans que notre journal n'ait pu défendre son travail et ses droits", déplore Edwy Plenel. L'enquête signée Antton Rouget est donc "prête" mais ne peut pas être publiée "sous astreinte de 10.000 euros par extrait publié". Le journaliste politique, explique pourtant Edwy Plenel, "a découvert des faits inédits qui, de nouveau, mettent en cause les pratiques du maire de Saint-Étienne, notamment dans le recours à la rumeur comme instrument politique. Mais, cette fois, leur victime est une personnalité notable de la droite, Laurent Wauquiez, président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dont l'ambition présidentielle est notoire".

Cette décision de "censure préalable", "une arme d'Ancien Régime contre la liberté de la presse", est d'autant plus inexplicable, estime Edwy Plenel, que les premières révélations "n'ont fait l'objet d'aucune contestation en justice" et "ont conduit le parquet de Lyon à ouvrir une information judiciaire pour 'atteinte à l'intimité de la vie privée, chantage aggravé, soustraction de bien public par une personne chargée d'une fonction publique, abus de confiance et recel de ces infractions'".

"Cette censure préalable provient d'une décision prise dans l'urgence, sinon la précipitation, sans audience publique ni débat contradictoire, dans le secret d'un échange entre seulement deux personnes : l'avocat du demandeur et le président du tribunal", s'étonne Edwy Plenel. Et de conclure : "Dans ses motivations, la requête de Gaël Perdriau, qui a été ainsi satisfaite, invoque fallacieusement une atteinte à la vie privée dont nous aurions démontré, dans une audience publique, qu'elle n'existe aucunement".

"Une décision similaire" à l'encontre du site d'investigation "Reflets.info"

Plusieurs sociétés de journalistes, à l'image de celles de M6 ou de "Libération", ont dénoncé, dans un message de soutien à "Mediapart", cette décision de justice. "La censure préalable d'un article sans audience publique ni débat contradictoire est inacceptable", a ainsi tweeté la Société des journalistes et du personnel de "Libération".

À lire aussi : Le site "Reflets" interdit par la justice de publier des articles sur Altice à partir de données piratées

Cette décision de justice, "alarmante" dixit Edwy Plenel, "survient quelques semaines après une décision similaire rendue, le 6 octobre, par le tribunal de commerce de Nanterre au nom du secret des affaires : saisi par le groupe Altice et son président Patrick Drahi, il n'a pas hésité à interdire à Reflets.info de publier 'de nouvelles informations'. Le site d'investigation a fait appel".

Inquiet lui aussi, le Syndicat national des journalistes (SNJ) ne dit pas autre chose ce mardi. "C'est du jamais vu en matière d'information", s'alarme le Syndicat. "Une telle décision constitue une grave atteinte à la liberté d'informer. Le SNJ rappelle le droit constitutionnel du public à être informé et la liberté de publier garantie par la loi du 29 juillet 1881, deux fondements de notre pacte démocratique républicain".

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