Ce n'est pas encore fini. Un article de Franceinfo paru ce mercredi 6 décembre 2023 met à jour de nouveaux SMS qui révèlent des consignes que la production de "Touche pas à mon poste" dicte (parfois) à ses chroniqueurs. C'est la journaliste Virginie Vilar, enquêtrice du portrait de "Complément d'enquête" dédié à Cyril Hanouna , qui apporte ces nouveaux éléments.
Dans son portrait consacré à Cyril Hanouna diffusé jeudi 30 novembre, "Complément d'enquête" révélait en effet comment l'animateur envoyait des instructions précises aux chroniqueurs de "TPMP". À l'aide de SMS envoyés par le présentateur et la production, que l'équipe du documentaire a pu consulter, le magazine de France 2 démontrait que plusieurs des interventions des chroniqueurs, censées se baser sur leurs opinions personnelles, seraient en réalité téléguidées par la production.
Captures d'écran à l'appui, les nouveaux textos font état "d'éléments de langage" provenant de parfois des plus hautes autorités de C8.
En mai 2018, alors que les médias traitaient l'affaire d'Alexandre Benalla, les chroniqueurs ont reçu l'interdiction formelle de critiquer l'ancien chargé de mission à l'Elysée. La raison : Cyril Hanouna tentait de l'inviter sur le plateau de son autre émission "Balance ton post". "Il ne faut PAS le défoncer parce qu'ils essaient de l'avoir sur BTP [Balance ton post]" écrit le texto de la production. Ancien proche d'Emmanuel Macron, Alexandre Benalla avait été filmé alors qu'il agressait violemment des manifestants du 1er mai.
L'année suivante, en août 2019, les chroniqueurs reçoivent comme consigne : décrédibiliser une polémique autour de la campagne publicitaire pour le parfum "The New Sauvage" de Dior. Qualifiée de "pub raciste" et "colonialiste", la vidéo mettait en scène mettant en scène Johnny Depp et un Amérindien dans le désert de l'Utah. Pourtant, il n'y avait pas de place pour le débat ce soir-là sur "TPMP" : "Pour la polémique sur Dior (pub sauvage avec Johnny Depp) on me dit de vous dire que vous devez dire que c'est ridicule" écrit encore la production.
En octobre de la même année, la chroniqueuse Géraldine Maillet avait de son côté reçu comme mot d'ordre de parler du film "Soeurs d'armes" de l'essayiste Caroline Fourest "comme d'un coup de coeur". Visiblement, la demande serait venue directement de Vincent Bolloré, propriétaire de la chaîne, qui aurait "déalé avec Cyril [Hanouna]", peut-on lire dans le message. "ll faut vraiment que tu regardes ce que dit la critique et que ça soit un vrai coup de coeur", écrit encore la production.
Le jour de la diffusion du documentaire de "Complément d'enquête" et avant même ces nouvelles révélations, Géraldine Maillet s'était offusquée sur le plateau de TPMP : "c'est humiliant pour nous et c'est un mensonge absolu !" s'était-elle exclamée.
Autre SMS, cette fois-ci daté de début 2020. La production interdit alors aux chroniqueurs de parler du César du meilleur film attribué à Roman Polanski pour son film "J'accuse". Un César hautement controversé, alors que le cinéaste a été accusé de viol ou d'agression sexuelles par onze femmes, dont certaines étaient mineures au moments des faits rapportés. Comme toujours, la cérémonie avait alors été diffusée sur Canal+, chaîne de Vincent Bolloré. Même si aucun lien n'a été fait pour cette consigne avec le milliardaire breton.
"ATTENTION", peut-on lire dans le texto en grandes lettres. "Si jamais au moment où nous parlons des agressions dans le sport etc vous vient l'idée de revenir sur les Césars, sur Polanski, Foresti il ne faut SURTOUT PAS en parler", prévient le texto.
Selon les recommandations de l'ARCOM, le gendarme de l'audiovisuel, les principaux actionnaires d'un média ne doivent pas intervenir sur le contenu éditorial, au nom de la liberté et "l'indépendance de l'information", rappelle Franceinfo. Contacté par les journalistes de "Complément d'enquête", l'avocat de Cyril Hanouna assure que les chroniqueurs sont "libres de leurs propos".