Une Palme d’Or reste toujours suspecte pour un spectateur lambda. Certains se demandent encore pourquoi Le Ruban Blanc d’Haneke est reparti avec la prestigieuse récompense l’an dernier alors qu’eux ont passé 2h30 à lutter de toutes leurs forces pour ne pas s’endormir. Et ce n’est certainement pas la Palme version 2010 qui va réconcilier le Festival de Cannes avec le grand public.
Car ceux qui vont s’aventurer dans les salles obscures pour se frotter à l’OVNI offert par Apichatpong Weerasethakul sont prévenus. Oui, c’est une certitude, l’univers dans lequel nous plonge le cinéaste thaïlandais est à la fois fantastique, poétique, fantasmagorique, onirique, bucolique et beaucoup de mots qui se terminent en – ique (comme soporifique). Mais, non, il n’est pas le chef d’œuvre que certains cherchent à nous imposer. A trop vouloir en faire un film d’auteur, le réalisateur met dès le départ une barrière entre lui et les spectateurs. Dans les nuits de cet Oncle Boonmee, on se sent étranger et frustré.
Alors à quoi peut-on résumer ce nouveau film de Weerasethakul ? En cherchant bien, on y trouve quand même un semblant d’histoire, celle d’un homme qui décide de finir ses jours auprès des siens et se retrouve poursuivi par les fantômes de sa femme décédée et son fils disparu. Sur le papier, tout se tient. On imagine déjà le cinéaste nous conduire dans une réflexion poétique et spirituelle sur la mort, les fantômes et la vie. Mais après deux heures de projection, il faut se rendre à l’évidence. Cette Palme d’Or nous endort et Weerasethakul a jalonné son film expérimental par l’ennui. Certes, c’est une expérience. Mais dont beaucoup se passeraient bien.
Avec un titre à rallonge comme celui-ci - Oncle Boonmee (celui qui se souvient de ses vies antérieures) -, on pouvait déjà craindre que les longueurs ne manquent pas. Et ces craintes se révèlent malheureusement trop vite justifiées, car le metteur en scène se perd dans un contemplatif exagéré dont il ne nous sort que pour nous offrir des scènes virant le plus souvent au grotesque (la scène d’amour partagée entre une femme et un poisson supposée symboliser l’union du corps et de la nature est un exemple parmi d’autres…). Tout est confus, incompréhensible, brouillon, lent. Ces nuits d’Oncle Boonmee sont aussi passionnantes qu’un plan fixe sur un arbre. Mais il y en a à qui ce genre de cinéma plaît, ne gâchons pas leur plaisir…
Les conséquences d’un film comme celui-ci, qui divise au point de prêcher le tout ou rien, c’est qu’on l’adule dans sa totalité ou qu’on le rejette en bloc. Certains se gargarisent sur des scènes qui irritent les autres. Apichatpong Weerasethakul réussit son pari de faire un film hypnotique. Les premiers seront fascinés par l’imagination du cinéaste et son sens du symbole. Les seconds seront fascinés par le néant et la platitude de sa mise en scène et son acuité pour la torpeur. On vous laisse deviner le camp que l’auteur de ces lignes a choisi…
Reconnaissons malgré tout au cinéaste thaïlandais sa volonté de faire un cinéma original, à des années lumières des codes habituels et marquant de son sceau son statut d’auteur. Si on peut reprocher mille et une chose à Weerasethakul, il faut lui attribuer le mérite de parsemer son film de petites touches humoristiques qui, bien qu’elles ne masquent pas l’étendue des dégâts, sont toujours appréciables (de l’apparition du fantôme de la sœur d’Oncle Boonmee pendant le repas au retour du fils disparu qui revient poilu comme un singe). Se gardant d’être prétentieux, Weerasethakul livre malgré tout une œuvre extrêmement - et beaucoup trop - déroutante. Prendre le train de son voyage est un pari à double-tranchant. Et si vous êtes hermétiques à ce genre d’aventure, la sieste va vous paraître très chère…
Cinéma
Oncle Boonmee celui qui se souvient de ses vies antérieures : Une Palme d'or qui nous endort
Publié le 13 septembre 2010 à 14:32
Confus, brouillon, incompréhensible, grotesque, "Oncle Boonmee" irrite et plonge le spectateur dans une torpeur sans nom. On ne remerciera pas Tim Burton pour cette Palme…
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