
Presque trois semaines après sa mise en ligne, la mini-série documentaire "De rockstar à tueur : Le cas Cantat" continue de nourrir les débats. En s’intéressant au traitement médiatique du sombre meurtre de l’actrice Marie Trintignant sous les coupes du leader du groupe Noir Désir, les réalisateurs de ce carton d’audience sur Netflix (plus de deux millions de visionnage) savaient que les témoignages recueillis dans ces trois épisodes allaient faire causer. Celui bouleversant de Lio au sujet de l’omerta planant autour du rockeur a profondément ému les abonnés de la plateforme. Et vient, quelque part, compenser le mutisme des acolytes musiciens de Bertrand Cantat, lesquels ont scellé un pacte pour ne pas avoir à s’exprimer dans ce documentaire, qu'ils considèrent mal anglé. "Ils voulaient faire un doc sociétal avec deux tiers de fait divers et un tiers de musique. À charge. Alors on leur a dit non. Et personne autour de nous ne leur parlera. C’est une famille, Noir Désir", s'était justifié Denis Barthe, le batteur du quatuor dans les colonnes du "Parisien".
En parallèle de ce choix discuté, une radio a pris une décision toute autant radicale. Sur son site internet, la station Vibration a annoncé boycotter Bertrand Cantat et sa discographie. Plus aucun titre du chanteur, en solo ou avec son groupe Noir Désir, ne résonnera sur ses ondes. Dans un billet intitulé "Pourquoi nous refusons de diffuser Bertrand Cantat", les programmateurs de la radio basée dans la région Centre s'interrogent sur la lourde question soulevée par cette enquête inédite : "Peut-on encore séparer l’homme de l’artiste ?" Ils prennent ainsi à partie leurs fidèles auditeurs : "Doit-on continuer à écouter 'Le vent nous portera' ? Doit-on encore acheter ses albums ? Ignorer la gravité de ses actes au nom de l’art, ne serait-ce pas perpétuer la culture du silence autour des violences conjugales ? Eux ont fait leur choix en âme et conscience en expliquant que la qualité des chansons composées et écrites par le rockeur ne suffisaient pas à omettre sa responsabilité dans ce féminicide. "Aucune mélodie, aucun texte, aussi beaux soient-ils, ne sauraient le justifier. C’est pourquoi, sur notre antenne, nous faisons le choix de ne pas diffuser Noir Désir et Bertrand Cantat", est-il indiqué dans ce communiqué.

Depuis la dissolution du groupe Noir Désir en 2013, l'ex-star du rock se fait discret et partage sa vie entre Bordeaux et une maison isolée dans les Landes, entouré seulement de sa nouvelle compagne, et de quelques proches. Selon "Le Parisien", celui qui vient de fêter ses 61 ans, est désormais un homme que l’on aperçoit à vélo ou en terrasse, mais qui n'a jamais totalement renoncé à la musique. Fin 2024, Détroit, le duo qu'il a formé avec le bassiste Pascal Humbert, publie un deuxième album intitulé "L’Angle", après avoir lancé une campagne de financement participatif sur Ulule. Le projet dépasse largement son objectif initial de 60.000 euros, récoltant plus de 217.000 euros en quelques jours. Face à la polémique, la plateforme se désolidarise et reverse sa commission à une association d’aide aux femmes victimes de violences conjugales.
Aucun concert n’est annoncé pour accompagner la sortie du disque. Dans un message adressé au "Parisien", Jérémy Garat, membre du groupe, déclare : "Nous ne donnons pas d’interview, nous laissons parler la musique. C’est une sortie particulière et nous avons un double principe de précaution et de discrétion." Le disque, composé de 11 titres, est aujourd’hui disponible, mais les musiciens continuent de rester silencieux, refusant toute sollicitation médiatique.