C'est la guerre entre "Valeurs actuelles" et "Le Monde". Dans son édition de cette semaine, l'hebdomadaire a en effet décidé de consacrer une "enquête" aux journalistes d'investigation du "Monde", Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Ces derniers se sont notamment rendus célèbres pour leurs révélations concernant plusieurs affaires sensibles touchant Nicolas Sarkozy ("Karachi", "Bettencourt" ou encore "Bygmalion").
Dans son numéro de cette semaine, "Valeurs actuelles" entend ainsi démontrer l'anti-sarkozysme des deux journalistes du "Monde". Evoquant leurs dernières révélations sur l'affaire "Bygmalion" ou encore celle dite des "hélicoptères du Kazakhstan", l'hebdomadaire de droite commente ainsi : "Les médias s'emballent. Les plateaux télévisés convient pro et anti sarkozystes pour qu'ils s'écharpent sur des affaires dont personne ne sait rien. Le message est clair : revenu dans l'arène, Sarkozy est plus que jamais une cible, il est cerné. La suspicion est permanente, les révélations sur des pseudos 'affaires' sont quotidiennes, le poison est instillé".
Pour démontrer sa thèse d'une entente visant à empêcher le retour de l'ex-chef de l'Etat sur le devant de la scène politique, l'hebdomadaire n'hésite pas à rendre publics dans son article certains rendez-vous professionnels de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, deux "détracteurs de Nicolas Sarkozy" frappés selon lui de "discrédit". L'hebdomadaire commence ainsi par révéler que peu de temps avant leurs dernières révélations, "les deux journalistes ont bénéficié d'un rendez-vous à l'Elysée, le vendredi 3 octobre à 19 heures".
"Valeurs actuelles" révèle ensuite un autre rendez-vous des deux enquêteurs au ministère de la Justice le lundi 6 octobre, "jour de parution de leur 'enquête' sur Bygmalion, et veille de leur article sur le 'kazakhgate'" précise l'hebdo. Ce dernier décrit aussi une visite le même jour de Gérard Davet et Fabrice Lhomme au Pôle financier, "lieu en théorie impénétrable par des journalistes puisque les dossiers sensibles qui y sont traités sont protégés par 'l'inviolable' secret de l'instruction'".
Et "Valeurs actuelles" de dénoncer : "Si on ne connait pas la teneur des échanges qui ont eu lieu entre les deux journalistes et leurs interlocuteurs à l'Elysée et au ministère de la Justice, on sait en revanche que les journalistes, ont bénéficié de la violation du secret de l'instruction pour publier deux enquêtes, quelques jours plus tard. L'Elysée et la Chancellerie étaient-elles au courant du rendez-vous au pôle financier et des articles qui allaient être publiés dans 'Le Monde' trois jours plus tard ? Quel juge du Pôle financier a reçu les journalistes ? On ne le saura peut-être jamais. Une seule certitude, les enquêtes publiées par Gérard Davet et Fabrice Lhomme ne peuvent avoir été conduites qu'avec l'aide de juges qui, cherchant à nuire au retour de Nicolas Sarkozy, sont prêts à violer impunément la loi".
Outre cette atteinte au secret des sources de leur confrères, la rédaction de l'hebdomadaire croit aussi bon de souligner en légende de sa photo que Gérard Davet et Fabrice Lhomme bénéficient depuis le mois de septembre 2014, "de la protection de quatre policiers chacun et d'une voiture par personne" pour un "coût de près de 400.000 euros par an pour l'Etat". Rappelons que Gérard Davet et Fabrice Lhomme ont fait l'objet récemment, tout comme leur famille, de menaces de mort, ayant entraîné la mise en place de cette protection policière.
Au cas où cet article n'aurait pas suffi, le patron de "Valeurs actuelles", Yves de Kerdrel en a remis une couche sur Twitter. Présentant l'article de son journal, il a ainsi traité les deux journalistes du "Monde" de "valets" et de "pseudo-journalistes" au service d'un "cabinet noir contre Sarkozy".
Dans le prochain numéro de @Valeurs revoilà le cabinet noir contre #Sarkozy avec ses deux valets : les pseudo journalistes Davet et Lhomme.
- Yves de Kerdrel ن (@ydekerdrel) 14 Octobre 2014
Ce midi, "Le Monde" a décidé de répondre aux attaques de "Valeurs actuelles". Rappelant qu'il n'y a pas de "presse libre et indépendante sans sources d'information, qu'elles soient officielles ou secrètes", le directeur du quotidien, Gilles van Kote, a dénoncé dans un éditorial le "mépris de toutes les règles déontologiques" montré selon lui par "Valeurs actuelles" dans cette affaire. "Faute de pouvoir réfuter nos informations sur le fond, l'hebdomadaire préfère s'en prendre à nos sources et tenter de discréditer notre travail" dénonce le quotidien.
Et le journal ne compte pas en rester-là. Il a ainsi annoncé son intention de saisir la justice. "Au vu de l'article de 'Valeurs actuelles', il apparaît maintenant que les faits et gestes de nos collaborateurs étaient surveillés et qu'ils ont été probablement suivis. Ces méthodes visent clairement à empêcher nos journalistes d'effectuer leur travail d'investigation. Elles constituent une atteinte au secret de nos sources totalement inacceptable (...) Nous allons demander au parquet de Paris d'ouvrir une enquête pour espionnage et déposer une plainte pour diffamation et injure", prévient "Le Monde" qui précise qu'il ne "se laissera pas intimider et poursuivra sans relâche son travail d'enquête dans tous les domaines".