La définition de la liberté de la presse... selon le PSG. Dans une enquête publiée ce mercredi, le média en ligne, "Mediapart", révèle que le club de football de la capitale aurait eu recours, entre 2018 et 2020, à "une armée numérique" pour "influencer le traitement sur des sujets d'actualité" et "sauvegarder l'image du PSG" mais aussi décrédibiliser personnalités et médias jugés hostiles.
Dans les faits, une entreprise privée, l'agence Digital Big Brother (DBB), aurait mené, via des faux comptes Twitter, des raids violents sur les réseaux sociaux à l'endroit de ceux qui oseraient contrevenir aux intérêts du club détenu par l'Etat du Qatar. Le tout aurait été supervisé par la direction de la communication du PSG elle-même, pilotée à l'époque par Jean-Martial Ribes. Au total, neuf "attaques" auraient ainsi été commandées contre des cibles précises, parmi lesquelles Kylian Mbappé, en 2018/2019. Dans le viseur de cette armée côté médias, "L'équipe" et "Mediapart" sont en tête de liste.
Ces attaques contre ces deux titres de presse proviennent notamment du compte Paname Squad, qui se présente sur Twitter comme un "collectif de passionnés du Paris Saint-Germain". "Alimenté par le PSG en infos exclusives sur le mercato afin de booster son audience et sa crédibilité auprès des journalistes", dixit "Mediapart", ce compte aurait mené des attaques contre le journal en ligne, renommé "Mediapartouze", "pour contrer les révélations de la seconde saison des 'Football Leaks'".
Plusieurs journalistes de "Mediapart" auraient été, par ailleurs, la cible d'attaques personnelles, en particulier Yann Philippin, qui a coordonné l'enquête "Football Leaks", assure le journal. "Le compte Paname Squad est allé encore plus loin en menaçant, le 16 novembre 2018, de dévoiler les 'numéros' et les 'échanges' de plusieurs journalistes de 'Mediapart'. Le lendemain, le compte publie les six premiers chiffres du numéro de portable du directeur de Mediapart, Edwy Plenel, rebaptisé 'Crawsy le rouge'".
Dans une autre affaire, celle de la supposée, à l'époque encore, violation du fair-play financier par le PSG, le journal "L'équipe" a lui aussi fait les frais de comptes Twitter alimentés par l'agence DBB et téléguidés par la direction de la communication du PSG. Après la publication de l'article "Fair-play financier : le PSG contraint de perdre Kylian Mbappé ou Neymar en cas de sanctions ?" le 8 décembre 2018, le directeur de la rédaction du quotidien sportif, Jérôme Cazadieu, a été pris pour cible par le compte Paname Squad.
Ce dernier avait relayé le communiqué du club publié en réaction à l'article "accompagné d'un bisou adressé à @Cazadieu et d'une vidéo d'un homme violemment frappé au visage". Paname Squad serait un habitué des intimidations. Ce même compte a publié une fausse une du journal, renommé "L'Épipe", mettant en scène Jérôme Cazadieu présentant ses "excuses" au PSG après "ces deux derniers mois de troubles qui ont plongé notre rédaction dans la désinformation". Dernier exemple au printemps 2019, quand Paname Squad poste un autre tweet insultant : "Comment peut-on respecter 'L'équipe avec sa ligne éditoriale putaclic, sa haine viscérale du PSG, et ses journalistes en carton [...]. Sombres pu***".
Ce jeudi dans un édito publié dans "L'équipe", Jérôme Cazadieu a qualifié l'affaire de "gravissime". Il a relevé que parmi les griefs de la direction du PSG contre le quotidien sportif figure la Une de décembre 2018 sur la violation du fair-play financier. "Le plus terrible dans l'histoire ? Cette dernière information nous avait été confirmée par plusieurs sources, y compris au sein du club, ce qui n'avait pas empêché le PSG de publier dans la foulée un démenti assorti d'un communiqué titré 'L'Équipe, média de désinformation'", a ironisé le directeur de la rédaction.
De son côté, le PSG a indiqué à "Mediapart" que "le club n'a jamais contracté avec une agence afin de nuire à des individus et à des institutions". Le PSG a de nouveau "fermement démenti" ces accusations après publication de l'enquête.