Une campagne qui ne passe pas du tout. Dans un communiqué en date de ce lundi, le syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) dit "fermement dénoncer la campagne diffamatoire de Sleeping Giants à l'encontre de 'Valeurs actuelles' visant à assécher les ressources financières du magazine en exerçant des pressions sur ses annonceurs". Pour rappel, propriété du groupe Valmonde, "Valeurs actuelles" est membre du SEPM, tout comme plus de 400 autres titres de presse.
Dans son communiqué, le SEPM rappelle que "Valeurs actuelles" a "le statut de presse d'Information Politique Générale, accordé par l'État, afin d'assurer l'existence d'une offre de presse pluraliste seule garante du caractère démocratique du débat public". "L'existence du magazine 'Valeurs actuelles', aux côtés de l'ensemble des autres titres de presse d'opinion participe de cet indispensable pluralisme, objectif reconnu de valeur constitutionnelle", poursuit le syndicat, déplorant "qu'il soit ainsi permis à un groupuscule anonyme de décider si tel ou tel média a le droit ou non de se financer".
Se faisant plus menaçant, le SEPM rappelle que "le Code pénal réprime l'entrave à l'activité économique à raison d'une discrimination résultant de l'expression d'opinions politiques". Le syndicat annonce ainsi qu'il "soutiendra, y compris devant les tribunaux, son adhérent et plus largement tout titre de presse mis en danger par ces méthodes inacceptables". Pour rappel, très actif sur les réseaux sociaux, le collectif Sleeping Giants est spécialisé dans l'assèchement financier de sites d'extrême-droite. Leur spécialité est en effet de repérer et interpeler les annonceurs dont les publicités apparaissent sur ces sites afin que ceux-ci les retirent.
Une méthode qu'ils ont donc décliné en s'attaquant aux créneaux de diffusion incluant Eric Zemmour sur CNews et Paris Première. Ce que le groupe Canal+, qui réfléchit à poursuivre judiciairement Sleeping Giants, goûte peu. Après plusieurs mois de ciblage des apparitions télé de Zemmour, le collectif s'est trouvé une nouvelle cible en lançant, début décembre, une campagne ciblée contre "Valeurs actuelles". Celle-ci se poursuit d'ailleurs actuellement. Geoffroy Lejeune, directeur de la rédaction de "Valeurs actuelles", avait dénoncé en début de mois une forme de "terrorisme intellectuel" et une tentative de "sabotage industriel".
Le SEPM n'est pas le seul à être échaudé par les méthodes de Sleeping Giants. Interrogé par nos confrères de "Challenges", Jean-Luc Chetrit, directeur général de l'Union des marques (UDM), qui représente 230 entreprises actives dans les médias à travers la publicité et plus de 1.500 marques, déclare : "La police, cela existe, la justice aussi : ce n'est pas le rôle d'associations, même avec les meilleures intentions, de s'installer comme censeurs". Également contacté par "Challenges", Marc Feuillée, vice-président de l'Alliance de la presse d'information générale et patron du groupe Le Figaro, s'inquiète : "On sait quand cela commence, pas quand cela s'arrêt. Si L'Humanité et La Croix sont boycottés, ce sera un recul du pluralisme. C'est extrêmement dangereux pour l'avenir des médias et du débat démocratique".