La tension est forte en ce moment au Parisien-Aujourd'hui en France entre les rédactions et leur directeur Thierry Borsa. En cause selon Libération, la publication en novembre d'un dossier spécial sur la marque EDF intitulé "EDF, l'énergie d'un géant". Ce "reportage", paru sous la forme d'un supplément intégré à la série "Histoire de marque" du quotidien, serait en fait un publireportage déguisé selon la société des journalistes (SDJ) du quotidien.
"Tout à la gloire d'EDF" et disponible sur le site de la marque, il reprenait ainsi à l'identique la charte graphique du journal bien qu'il ait été réalisé par l'agence de contenus Relaxnews. Quant à la potentielle nature publicitaire de ce contenu, elle n'a jamais été signalée aux lecteurs, ce qui est pourtant la règle normalement. Dans un communiqué publié la semaine dernière, la société des journalistes (SDJ) déplore un "mélange des genres" et a interpellé le directeur des rédactions Thierry Borsa pour lui demander des explications. Le publireportage déguisé pour EDF ne serait en effet pas le premier. En mai dernier, un dossier sur la Caisse d'Epargne présenté sous la même forme et intitulé "Caisse d'Epargne, deux siècles d'innovation" avait déjà créé de forts remous au sein du quotidien.
Selon Libération, Thierry Borsa aurait alors répondu par mail en qualifiant le communiqué de la SDJ de "concentré de malhonnêteté intellectuelle, ou personnelle". Le directeur des rédactions s'en serait également pris à la présidente de la SDJ, Elisabeth Fleury. "Je vais donc désormais devoir évaluer la qualité de tes informations et du traitement que tu en présentes dans le journal à l'aune de ce que ce communiqué de la SDJ que tu portes donne à connaître de ton respect de l'exactitude des faits et de la rigueur avec laquelle tu rapportes des propos tenus par tes interlocuteurs. Je dois t'avouer que cela fait naître en moi quelques inquiétudes", aurait-il écrit.
La polémique autour du "cahier EDF" du Parisien illustre un débat qui enfle depuis plusieurs mois autour de l'immixtion grandissante de la publicité cachée dans les contenus journalistiques, notamment sur le web. Aux Etats-Unis, le régulateur du commerce américain (FTC) s'est ainsi saisi de la question la semaine dernière en convoquant les professionnels du secteur pour discuter du "native advertising".
Cette technique publicitaire se développe actuellement à grande vitesse aux Etats-Unis et permet aux entreprises de déguiser leurs publicités en articles de presse pour les publier sur les sites Web des journaux. Cantonnée au début à des pure players comme "Buzzfeed" ou le "Huffington Post", la pratique se serait désormais étendue à des titres de presse plus prestigieux comme le "Washington Post" ou le "Wall Street Journal". A tel point que les lecteurs ne feraient parfois plus la différence entre les contenus éditoriaux et publicitaires.