Le "New York Times" ne sera bientôt plus tout à fait la même. Hier, le prestigieux quotidien américain a annoncé son intention de renoncer aux dessins politiques dans "The International New York Times", son édition internationale. Une décision qui prendra effet dès le 1er juillet, soit dans moins de trois semaines. Le prestigieux navire amiral de la New York Times Company a expliqué qu'il réfléchissait à aligner l'édition internationale sur son édition nationale depuis l'année dernière. L'édition publiée aux États-Unis ne compte en effet plus de dessins politiques depuis déjà plusieurs années.
Difficile de ne pas voir dans ce renoncement un lien avec le tollé suscité par la publication d'un dessin d'Antonio Moreira Antunes, jugé antisémite, en avril dernier. Le "Times" avait en effet publié un dessin représentant Benyamin Nétanyahou, le Premier ministre israélien, en chien tenu en laisse par Donald Trump. Arrimé à un collier avec une étoile de David, il était représenté en guide du président américain, grimé en aveugle portant une kippa sur la tête. Face à la polémique, le quotidien s'était excusé dans un premier temps, regrettant un contenu "offensant", avant de sanctionner le responsable d'édition qui avait choisi cette caricature, et de prendre la décision de cesser de recourir aux dessins provenant d'une société extérieure.
Sur son site, Patrick Chappatte, l'un des dessinateurs auquel le "New York Times" fait régulièrement appel depuis plus de vingt ans, regrette que "toutes ces années de travail restent inachevées à cause d'un seul dessin - qui n'était pas de (lui) - qui n'aurait jamais dû être publié dans le meilleur journal du monde". "Ces dernières années, certains des meilleurs dessinateurs de presse aux Etats-Unis (...) ont perdu leur travail parce que leurs éditeurs les trouvaient trop critiques envers Donald Trump", a-t-il poursuivi. "Peut-être devrions-nous commencer à nous inquiéter", s'est-il alarmé, concluant : "Et nous rebeller. Les dessinateurs de presse sont nés avec la démocratie et lorsque les libertés sont menacées, ils le sont aussi".
Responsable de la rubrique éditoriale du "New York Times", James Bennet a indiqué dans une déclaration que le le journal continuera à "explorer différentes formes du journalisme d'opinion, y compris le journalisme visuel, qui exprime clairement la nuance et la complexité à partir d'une diversité de point de vue". Il a rappelé que la "Times" avait remporté le prix Pultizer l'an dernier grâce à une série de dessins politiques sur une famille de réfugiés syriens. Dans cette même déclaration, James Bennet a affirmé que le quotidien souhaite poursuivre à l'avenir sa collaboration avec Patrick Chappatte et Heng Kim Song, son autre dessinateur vedette, sur "d'autres formats".