Yann Barthès, nouvelle tête de gondole du groupe TF1, personne n'aurait pu croire à un tel scénario il y a tout juste un an. C'était sans compter sur le flair de son très discret producteur, Laurent Bon, qui a senti arriver la bourrasque Bolloré des côtes bretonnes, emportant tout sur son passage, les icônes de la chaîne, son esprit et son savoir-faire unique. Le transfert de la décennie ! "Quotidien" est aujourd'hui à TMC ce qu'a été "Le Grand Journal" à la belle époque de Canal avec Michel Denisot à ses commandes, the place to be de l'access. Tout le monde s'y presse et la présidentielle devrait lui permettre de confirmer sa puissance, face à "TPMP" sur C8 ou "C à vous" sur France 5.
Il a été le porte-voix d'une rédaction humiliée pendant plusieurs semaines. Propulsé un peu par hasard figure de la contestation à iTELE, son humilité et sa méthode ont beaucoup joué dans l'adhésion des téléspectateurs à une révolte juste, inédite dans un média privé. Comme plus de 80 de ses confrères, Antoine Genton a quitté une chaîne à l'abandon, en état de mort clinique. Il était l'un de ses meilleurs éléments, caché dans les soirées de la grille du week-end. Nul doute que ce journaliste aux faux airs de Laurent Delahousse retrouvera un siège de présentateur la saison prochaine.
La gauche au pouvoir, les audiences de France Inter allaient plonger, forcément. Mais Laurence Bloch, directrice de la station, a mené en toute discrétion une petite révolution sur la grille de la radio publique, écartant certaines voix historiques pour remodeler une radio en phase avec son époque. Des femmes, de l'humour, de nouveaux talents, du débat, de l'international. La modernité de France Inter se voit et s'entend. Quand la concurrence dynamitait ses grilles à coups d'effets d'annonce, Laurence Bloch menait dans son coin un travail d'orfèvre sur chaque quart d'heure qui lui a permis de décrocher un nouveau record lors de la dernière mesure d'audience.
On ne l'attendait pas sur ce terrain-là. Karine Le Marchand, meilleure intervieweuse politique de la campagne présidentielle ? Certains se sont étouffés devant son "Ambition Intime" sur M6 mais les téléspectateurs étaient là, bien plus nombreux que devant la plupart des nouveaux rendez-vous politiques lancés cette saison. Elle a peut-être compris avant tous ses confrères que la personnalité d'un présidentiable pouvait peser plus lourd que son programme. Il faudra aussi compter sur elle en 2017, à condition que ses futurs invités, désormais conscients de tous les ressorts et de la puissance de ce format, ne le retournent pas contre son animatrice.
Le modèle de Canal+ parti en fumé, la route est libre. Après avoir mis la main sur quelques compétitions prestigieuses comme la Premier League, Drahi se voit déjà à la tête d'un empire mondial super-producteur de contenus, capable de rivaliser avec Netflix et Amazon. Le deal avec Discovery et NBCUniversal n'est qu'un prélude à une vaste offensive sur le cinéma et les séries. Son pari est celui de Jean-Marie Messier il y a quelques années : les réseaux ne serviront qu'à transporter des contenus premium pour lesquels un abonné sera prêt à lâcher plusieurs dizaines d'euros par mois. Grâce à un financement par la dette, ses moyens sont pour l'instant illimités.
Il y avait décidément beaucoup, beaucoup de talents à Canal+. Profitant de la brèche béante ouverte par Vincent Bolloré, TF1 ne s'est pas gênée pour faire son marché. Avec Yann Barthès, c'est l'un des plus gros transferts de l'année : Grégoire Margotton, 24 ans de maison au compteur, nouvelle voix des soirées foot de TF1. En un match (France/Cameroun, le 31 mai), la greffe a été acceptée par les téléspectateurs, usés par les commentaires de Christian Jeanpierre. Sa prestation impeccable lors de l'Euro a réconcilié beaucoup de téléspectateurs avec le foot sur la Une.
Difficile de se faire une place dans le carré très couru des intervieweurs politiques pendant une élection présidentielle. Elizabeth Martichoux, peu connue du grand public, a assuré le renouvellement du genre pour le premier débat de la primaire à droite. Questions précises, autorité, maîtrise de ses sujets : la nouvelle intervieweuse politique des matins de RTL s'est imposée sans écraser son confrère de TF1, Gilles Bouleau. Un exploit dans cet exercice où les journalistes tentent toujours de tirer la couverture à eux. C'est la révélation politique de la saison même si les auditeurs de RTL connaissaient déjà son talent.
Leur livre a recomposé le paysage politique français, poussant François Hollande au renoncement pour 2017. "Un président ne devrait pas dire ça" (Ed. Stock) a été la bombe à fragmentation de cette fin de quinquennat, plus redoutable que "Merci pour ce moment" de Valérie Trierweiler, plus dévastateur que l'affaire Cahuzac. Depuis son élection, François Hollande n'a jamais coupé le cordon ombilical avec les journalistes qu'il adorait recevoir pour écrire avec eux plusieurs pages de l'Histoire, de son histoire, sans jamais penser qu'elle pourrait se construire sans lui. Son successeur a déjà retenu la leçon, un président ne doit jamais autant parler à des journalistes.
Il a mis le feu à la maison TPMP. C'est l'enquête de "Society" dans les coulisses du talk le plus sulfureux du PAF qui a provoqué la démission d'un chroniqueur en direct et a alimenté le Hanouna bashing pendant plusieurs mois. Ce reportage sans concession - et contesté par toute l'équipe n'était que le prélude à une série de dérapages, des nouilles dans le slip de Matthieu Delormeau à la simulation d'un meurtre "pour rigoler" en passant par une agression sexuelle en direct. Le CSA, dont la boîte aux lettre déborde de plaintes des téléspectateurs, pourrait mettre un coup de frein à cette course folle en 2017.
Personne ne croyait vraiment à son arrivée sur iTELE mais le super-actionnaire de Vivendi est décidément capable de tout. Malgré la réputation sulfureuse de l'animateur et l'affaire pour laquelle il a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire, l'industriel breton a tenu sa promesse, en le bombardant à l'antenne avec "Morandini Live", ersatz de ses pires émissions sur feu Direct 8. Malgré l'emballement d'une crise qui aura duré plusieurs semaines, l'animateur d'Europe 1 n'a jamais jugé bon de renoncer, poussant avec son entêtement la plupart des journalistes vers la sortie. Il ne reste plus grand chose d'iTELE, bientôt morte et enterrée, mais personne ne sait encore si Jean-Marc Morandini n'aura été qu'un épouvantail ou deviendra l'un des piliers éditoriaux de la future CNEWS.