Ça grince à TV5 Monde. Dans un communiqué, la SDJ de la chaîne publique francophone internationale fait savoir que la rédaction a voté une motion de défiance visant l'ensemble de la direction de l'information et Yves Bigot, le patron de la chaîne. Dans un vote qui s'est clos hier et auquel 74% des inscrits ont participé, soit 73 personnes, les journalistes ont fait massivement savoir leur défiance vis-à-vis des équipes en place. Ils sont ainsi 76% à affirmer ne pas faire confiance à Yves Bigot pour "préserver et développer la qualité et les moyens de l'information à TV5 Monde".
Un taux de défiance qui monte à 80% pour les équipes de la direction de l'information, composée d'André Crettenand, directeur de l'information, Pascal Guimier, directeur adjoint de l'information, Véronique Rosa-Donati, secrétaire générale de la direction de l'information, et Laurent Lejop, directeur de la rédaction. Dans le texte voté, la rédaction dénonce le plan stratégique de réforme de la chaîne, tourné vers le numérique et enclenché par la direction de la chaîne en 2017, qui a accouché, selon les termes employés, "d'un projet éditorial indigent".
"Dans une rédaction, tout nouveau projet éditorial doit se mener en concertation avec les journalistes. Ce projet induit alors l'organisation de la rédaction, et donc un planning précis. À TV5Monde, c'est l'inverse. Des noms sont inscrits dans des cases sur des tranches horaires, sans les nouveaux services annoncés", est-il écrit. Les journalistes dénoncent également des conditions de travail dégradées. "Les journalistes travaillent toujours plus, cliquent toujours plus, à moyens constants ou diminués, aux dépens du coeur de leur mission, celle d'informer", écrivent-ils, fustigeant par ailleurs la priorité au web impulsée par la direction.
"'Des journalistes vont être engagés, c'est bien le signe d'une volonté de développement !', dit la Direction.
Mais la gestion pitoyable des ressources humaines suggère tout autre chose. Tandis qu'un groupe d'environ 10 pigistes très anciens pourrait enfin être régularisé, une quinzaine est éjectée : à la misère éditoriale s'ajoute la casse sociale", dénoncent les journalistes, évoquant une "gouvernance brutale". In fine, la rédaction réclame une "approche plus sérieuse que le projet qui est présenté".
Le malaise social à TV5 Monde n'est pas nouveau. En octobre dernier, deux syndicats de journalistes de la chaîne avaient fait voter une grève de 48 heures, dimanche et lundi, pour dénoncer le plan stratégique de réforme de la chaîne, qualifié à l'époque de "plan social déguisé". Pour rappel, TV5 Monde est impactée par les économies demandées à l'audiovisuel public. En 2019, la dotation s'est élevée à 77,7 millions d'euros, en baisse de 1,2 million d'euros par rapport à l'année précédente. En revanche, les actionnaires internationaux de la chaîne ont maintenu leur budget, ce qui a permis de limiter la baisse de moyens.