La polémique n'en finit plus d'enfler autour de la soirée de M6 dédiée aux trans. Jeudi 6 octobre, la chaîne diffusait sur son antenne, en prime time, le documentaire produit par Karine Le Marchand, "Trans, uniques en leur genre". Celui-ci donnait à voir le quotidien des personnes trans Emma, 63 ans, Aéla, 34 ans, et Zach, 18 ans, dans leur quotidien, au travail comme en famille, ainsi que les obstacles qu'elles pouvaient rencontrer dans l'accès à une transition.
Le documentaire était suivi d'un débat, animé également par Karine Le Marchand. Intitulé "Enfant transgenre : Que faire ?", il avait suscité, avant même sa diffusion, une levée de boucliers de nombreuses associations de défense des trans ainsi que de l'Association des journalistes lesbiennes, gays, bi, trans et intersexes (AJL). Après diffusion, le discours de l'AJL n'a pas changé. "Comme les extraits et la communication de la chaîne le laissaient penser, sensationnalisme et images chocs ont, une nouvelle fois, été préférés à l'information", a estimé l'association, dans un communiqué publié ce mercredi.
L'association en appelle à l'Arcom, le gendarme de l'audiovisuel, à qui elle a signalé l'émission. Elle regrette que la promesse originelle du programme n'ait pas été respectée. "Alors que les personnes trans étaient censées être au coeur de cette soirée, leur temps de parole fut minime. Que ce soit dans le documentaire, où elles ont été souvent remplacées par les membres de leur famille ou les médecins. Ou pendant le débat, lors duquel la parole était confisquée par deux membres de groupes ouvertement transphobes - le collectif Ypomoni et le podcast "Rebelles du genre" -, ce qui n'était pas précisé lors de leur présentation".
Pour l'AJL, les "meilleures intentions du monde" de Karine Le Marchand n'effacent pas "l'irrespect 'habituel' dont sont victimes les personnes trans dans les médias", écrit l'association. Celle-ci de citer : "Mégenrages et formules au moins maladroites, souvent violentes et graves ('lobby LGBT', 'mutilations'...), ont été légion". Pour éviter ces écueils, l'AJL estime que Karine Le Marchand et M6 auraient pu mobiliser des ressources scientifiques pendant le débat. "Par exemple, sur la question de l'éthique médicale : de multiples études prouvent que la santé mentale et physique des personnes trans se trouve fortement améliorée par l'accès à une transition".
Dans une interview que Karine Le Marchand a accordé à puremedias.com, l'animatrice et productrice n'avaient que faire des critiques. "Je suis tout le temps attaquée. J'ai l'habitude. En traitant de la transidentité, je ne cherche pas l'apaisement et je ne cherche pas la paix. Je ne fais pas des soirées en prime time sur le toilettage des chats, c'est sûr...", avait-elle ironisé, considérant dans le même temps que les médias ne traitent pas correctement du sujet de la transidentité.
"La course à l'audience peut déboucher sur des caricatures de gens abandonnés ensuite dans leur quotidien avec une image horrible. C'est pour cela que j'ai toujours produit du long format. C'est avec la confiance des témoins que l'on voit leur évolution et leur réalité, et qu'on leur laisse la liberté de l'exprimer", assurait-elle.
Le 6 octobre, "Trans, uniques en leur genre" avait capté l'attention de 1,52 million de personnes, soit 8,1% du public et 16,1% des FRDA-50, cible sur laquelle la chaîne est leader.