Les femmes et le sport sont à l'honneur sur puremedias.com. A l'occasion de la Coupe du monde de football féminin en France du 7 juin au 7 juillet, les personnalités féminines de l'univers du ballon rond se confient pour notre opération #FemmesDeFoot sur le tournoi international de football et sur leurs actualités à la télévision. Ainsi, Vanessa Le Moigne, présentatrice de "L'Expresso", la matinale week-end sur beIN Sports, a répondu à notre sollicitation.
Propos recueillis par Florian Guadalupe. Entretien réalisé le 4 avril.
Que représente le football féminin pour vous ?
Un enjeu de mixité sociale. Je regarde des matchs de football féminin mais ce n'est pas ma passion première. L'opportunité de cette Coupe du monde sera d'en parler plus que d'habitude. Ce sera une bonne occasion de faire entrer dans les têtes de nos enfants le sport féminin. Si aujourd'hui on parle de foot féminin en disant que ce sont des exceptions d'en voir, peut-être que demain, ce sera entré dans les moeurs.
Quelle sera la surprise de cette Coupe du monde féminine ?
La France ! Nous ne sommes pas favoris. Pourtant, la colonne vertébrale de notre équipe de France est le club de Lyon et c'est peut-être l'une des meilleures équipes du monde aujourd'hui. Dans la logique des choses, avec l'amalgame de toutes ces joueuses, je pense qu'on peut créer la surprise.
L'Equipe de France peut-elle remporter la compétition ?
Je vais dire : elles ne savaient pas que c'était impossible. Du coup, elles l'ont fait ! Je pense qu'elles y croient, elles. Pour les avoir rencontrées, elles sont déterminées. Elles sont préparées à cette Coupe du monde à la maison depuis quatre ans. Pour elles, c'est un objectif. Elles ont dû mal à se hisser un peu plus haut que les quarts de finale par le passé. Aujourd'hui, cette équipe a la détermination et les joueuses pour.
"Quand le ballon arrive dans les jambes d'Amel Majri, c'est incroyable."
Quelle joueuse fera la Une des médias cet été ?
Amel Majri pour l'équipe de France. La France va découvrir son talent. C'est une superbe joueuse. Elle est incroyable le ballon au pied. Pour tous ceux qui disent que le football féminin est lent et pas technique, ils vont découvrir à quel point le football féminin est beau. Quand le ballon arrive dans les jambes d'Amel Majri, c'est incroyable.
Il y a une autre joueuse aussi. C'est Formiga. C'est une joueuse brésilienne qui joue au Paris Saint-Germain et qui a 41 ans. Quand on la voit jouer, on ne voit pas son âge. Elle est assez incroyable. C'est une superbe nana avec une très belle histoire. Je suis sure qu'on en parlera. Enfin, il y aura Alex Morgan, car elle représente les Etats-Unis qui seront favoris.
Quel sport féminin devrait être beaucoup plus diffusé à la télévision ?
Tous. Je pense à l'exemple de l'athlétisme. Très naturellement, nous avons toujours vu des femmes courir en compétition de la même façon que les hommes. Il n'y a jamais eu plus de diffusion pour les hommes que pour les femmes. C'est pareil pour le tennis. Le tennis féminin a toujours été mis en avant. Il vit très bien tout seul. Après, son histoire est un peu particulière. Il y a eu une vraie promotion. Il y a eu des femmes qui à un moment donné ont bataillé pour. Il y a un an, sur beIN Sports, on avait fait un lever de rideau avec un match de handball féminin avant un match masculin. C'était génial. Les spectateurs se retrouvent à voir deux matchs pour le prix d'un. C'est pareil pour les téléspectateurs. Ca attire forcément plus de monde.
"Nous repartirons sur une quotidienne avec la matinale 'L'Expresso'."
Comment allez-vous aborder cette Coupe du monde féminine de football sur beIN Sports ?
Nous repartirons sur une quotidienne avec la matinale "L'Expresso". Nous sommes vraiment liés à l'actualité. Cet événement sera promu sur notre chaîne même si nous n'avons pas les droits. Nous pourrons accompagner cette compétition de ce qu'on diffuse sur beIN Sports : la Copa America, l'Euro Espoirs et la Coupe d'Afrique des nations. Je me dis que les téléspectateurs qui vont venir le matin pour avoir les résultats de ces coupes, auront aussi des informations sur le football féminin.
Quel bilan tirez-vous de votre saison à la tête de votre matinale ?
"L'Expresso" a une vie à part entière, au-delà de beIN Sports. L'émission a été créée au tout début de beIN Sports en 2012. C'était une quotidienne qui avait tout de suite trouvé son public. Ce sont des adolescents, des enfants, leurs parents ou alors des passionnés de sport qui voulaient les résultats sportifs. Ils se sont retrouvés dans notre ton un peu décalé. Nous étions un peu inspirés de ce que faisait Michaël Youn, sans aller aussi loin. C'est une émission dans "l'infotainment". On n'est pas obligé d'être sérieux le matin. Il faut leur apporter de la bonne humeur, le premier ton du matin et les premiers sourires. Puis, j'ai bifurqué sur une autre émission qui s'appelait "Happy Sport". A l'occasion du Mondial l'année dernière, j'ai repris le format de "L'Expresso" en version semaine avec Thomas Villechaize. A la rentrée dernière, l'émission a basculé dans une version week-end. Nous nous considérons comme des commerciaux de la chaîne. Ce qu'il y a à promouvoir sur notre chaîne, ce sont nos droits. Aujourd'hui, j'ai le sentiment que cette émission fonctionne. Je le sens avec les gens que je croise dans la rue. Ils sont contents de retrouver la marque "L'Expresso".
N'est-ce pas difficile de réveiller les gens le week-end ?
C'est une habitude pour moi de réveiller les gens. C'est difficile de se lever. C'est d'autant plus difficile qu'il faut suivre tous les résultats sportifs et regarder aussi les matchs. Je me couche très tard, aux alentours de 0h30, voire 1h du matin. Je prépare tout la veille pour me réveiller à maximum 4h35. Ce n'est pas compliqué parce que je sais aujourd'hui que quand la caméra s'allume, je vais retrouver mes potes. Je sais que je vais leur donner de l'information et de la bonne humeur.
"J'aime bien aller chercher mes invités sur leurs fibres artistiques... Eux moins"
Vous apparaissez parfois hyper active à l'antenne de votre émission. Est-ce quelque chose que vous jouez ?
C'est naturel ! J'aurais aimé naître aux Etats-Unis. Pour eux, ce n'est pas un problème. Le sport est du divertissement. C'est plus compliqué en France parce qu'en 2012, quand on arrive avec notre concept d'émission, ça n'a pas été super bien accueilli. Aujourd'hui, tout le monde a tendance à être dans cet esprit-là. Ensuite, je ne vais pas me renier. Je suis dans le sport depuis que j'ai 18 ans. J'ai eu un passage chez Cauet où j'étais cadreuse, puis au son. J'ai ensuite écrit et tourné des sketchs. C'est un ton que j'ai appris avec lui. J'ai appris à manier l'outil télévisuel et comment occuper l'espace. C'est un peu grâce à lui. Ca fait partie aujourd'hui de mes outils et je m'en sers dans mes émissions. Je sais être sérieuse quand j'ai un invité et en même temps, quand on est trop sérieux, on s'ennuie. Je regarde le football ou le rugby parce que c'est fun et divertissant. Donc, c'est tout naturel chez moi. J'adore danser, j'adore chanter. Mon patron me laisse faire... pour le moment (rires). Je vis mon rêve à la télévision. Et j'aime bien aller chercher mes invités sur leurs fibres artistiques... Eux moins (rires).
Quel est l'invité que vous rêvez d'inviter dans votre émission ?
La gymnaste Nadia Comăneci ! Elle fait partie de ces sportives qui m'ont fait rêver quand j'étais petite. Je faisais tout le temps de la gymnastique car je me rêvais en Nadia Comăneci. Pourtant, je n'ai jamais été une grande gymnaste (rires). C'est une histoire qui m'a inspirée. Ca m'a donné de beaux exemples à suivre.
Aimeriez-vous quitter votre case le week-end pour retravailler en semaine ?
J'ai déjà travaillé en semaine. J'étais en quotidienne avant. Après, on est dans le monde du sport et le monde du sport, c'est soit très tôt le matin, soit très tard le soir et très souvent le week-end. Avoir la matinale le samedi et le dimanche permet de mieux m'organiser la semaine et de pouvoir faire des tournages en extérieur.
"C'est un milieu très élitiste, surtout quand on parle de football. Il faut avoir les épaules pour encaisser."
D'autres formats d'émissions pourraient vous intéresser ? Dans le sport, il y a par exemple beaucoup d'émission de débat.
Je n'aime pas faire qu'une seule chose. J'aime proposer plusieurs choses dans une émission et d'avoir une évolution. Je peux être à la fois dans la news, dans le débat, dans l'interview et dans le fun. J'aime beaucoup animer les débats. Après, c'est un milieu très élitiste, surtout quand on parle de football. Il faut avoir les épaules pour encaisser. Les gens ne sont pas forcément bienveillants. En fait, il n'y a rien qui ne m'intéresse pas. Je ne me fixe pas de barrière. Il n'y a que le commentaire qui ne m'intéresse pas du tout. Je n'ai pas été bercée par ça dans ma façon de voir les choses. Je ne me suis jamais dit que j'avais envie de commenter du sport un jour. C'est peut-être une question d'éducation. Je n'ai pas grandi en entendant des femmes aux commentaires non plus.
Pour cette Coupe du monde féminine, les diffuseurs TF1 et Canal+ vont justement mettre en avant des voix féminines.
Si beIN Sports avait les droits, j'aurais aimé présenter l'émission premium de la Coupe du monde (rires). Message passé ! Sans rire, j'aimerais bien passer un cap maintenant et passer dans un autre registre. Après, je ne peux pas me renier, je suis comme je suis. J'aurai toujours ma bonne humeur. Donc, je n'arrêterai pas de sourire demain.
Une question plus générale sur votre métier. En est-il terminé de cette image très machiste du journaliste sportif ?
Non. Disons que j'ai eu de la chance. J'ai commencé à 17 ans dans une télé locale. Mon employeur était Karl Olive, qui était le bras droit de Michel Denisot à Canal+. A l'époque, il avait remarqué que j'adorais le sport et le foot surtout. Il m'avait dit qu'il fallait que j'aille dans le domaine de sport, parce que les femmes sont l'avenir du sport. Je n'y avais jamais pensé. Pour moi, c'était impossible. Je ne me sentais pas légitime. Il m'avait alors emmené à Canal+. A l'époque, il y avait Nathalie Iannetta. Je l'ai vue avec les yeux de la fan ! Je me suis dit que je voulais être comme elle. J'ai alors été embauchée à Orange Sport. Avec le recul aujourd'hui, honnêtement, j'étais tellement mauvaise dans mes JT que j'ai compris qu'ils ne m'avaient pas pris pour mes compétences, mais parce que j'étais une femme. J'ai conscience que certaines portes se sont ouvertes parce que je suis une femme. Après, ça a été plus difficile au quotidien de prouver ce que je valais. Dès que j'ai pris de l'assurance et de l'expérience, il y a eu comme une gêne. Je pense que c'est pareil pour Anne-Laure Bonnet, Marie Portolano ou Carine Galli. On nous a donné le micro et au moment on n'a plus voulu le lâcher, ça a posé des problèmes à certains.
"On ne dit pas non à Cyril Hanouna. Ou alors il faut vraiment être un peu bête."
L'année dernière, "L'Equipe" avait écrit dans ses colonnes que vous étiez susceptible de rejoindre l'équipe de "Touche pas à mon poste" sur C8. Etait-ce vrai ?
Cyril Hanouna, je le connais depuis très longtemps. Je le connais depuis que j'ai bossé chez Cauet. Lui ne s'en souvenait même pas d'ailleurs. C'est quelqu'un que j'admire. A chaque fois que je le croise, je bois ses paroles. C'est un super animateur et un super producteur. Il n'a pas été question que je fasse une chronique, non. Moi, je suis allée une fois dans son émission. Je pense que c'est de là que tout est parti. On avait pu discuter. Mais c'est tout. Je ne me pense pas légitime pour être dans ses émissions. D'ailleurs, je ne me suis pas trouvée très bonne lors de mon passage (rires). On ne se rend pas compte de la machine de guerre qu'est "TPMP". Je ne pense pas qu'une chronique sport est sa place là-dedans. Par contre, Cyril est ouvert à rencontrer les gens et donne sa chance à tout le monde. Il ne ferme jamais de porte et regarde les jeunes qui montent. Si Cyril Hanouna avait voulu que je travaille avec lui, je travaillerais avec lui.
Vous auriez dit oui tout de suite ?
Oui, clairement. Bien sûr. On ne dit pas non à Cyril Hanouna. Ou alors il faut vraiment être un peu bête.
Aimeriez-vous présenter une émission qui n'est pas liée au sport ?
Avant non. Maintenant oui. Je vieillis en terme d'expérience. J'ai eu la chance d'avoir croisé des gens comme Cauet qui m'ont appris beaucoup de choses. C'est un maître dans l'art d'animer une émission. Pour moi, il reste l'un des meilleurs animateurs en France. Il a juste mal négocié un virage après "La méthode Cauet". Et j'aimerais le faire sans quitter beIN Sports. J'en parle librement avec mon chef. Après, il faut avoir la bonne opportunité.
Ce n'est pas impossible puisqu'Anne-Laure Bonnet collabore avec "C à vous" sur France 5, par exemple.
Non, ce n'est pas impossible parce qu'à beIN Sports, il n'y a pas de principe de concurrence. Il y a juste des principes de complémentarité. La ligne éditoriale de la chaîne est la bienveillance et l'épanouissement, autant des téléspectateurs que des journalistes. Nos chefs ont conscience de ce que ça peut nous apporter. C'est vrai que c'est difficile quand nous commençons à ronronner. Il faut avoir de nouveaux projets.
A LIRE DANS LA COLLECTION #FEMMESDEFOOT :
- Camille Abily : "Je me retrouve sur TF1 comme dans l'ambiance d'un vestiaire"
- Candice Rolland : "Il faut arrêter de trop comparer le football masculin et féminin"
- Estelle Denis : "Une femme peut très bien parler de football masculin"
- Marie Portolano : "C'était une grosse pression d'animer seule le 'Canal Sports Club'"
- Nathalie Iannetta : "Il y aura un avant et un après dans cette Coupe du monde"
- Céline Géraud (#FemmesDeFoot) : "Nous ne brossons pas les invités dans le sens du poil"
- Claire Arnoux : "Le foot féminin n'est pas encore médiatisé comme il le devrait"
- Charlotte Namura : "Le machisme dans le journalisme sportif existe et c'est une réalité"
- Carine Galli : "Le quotidien du journaliste n'est pas d'être sur un plateau de télévision"