"Le Grand Journal" battu par Arte ! Hier soir, le talk présenté par Maïtena Biraben a été devancé par "La provence, le règne du soleil", un documentaire multirediffusé sur la chaîne franco-allemande. "C'est catastrophique", reconnaît en off un journaliste de l'émission. L'access est tombé à 2,8% de parts de marché, soit 500.000 téléspectateurs. Deux fois moins qu'Antoine De Caunes, trois à quatre fois plus bas que Michel Denisot. La moyenne depuis la rentrée est d'à peine 639.000 téléspectateurs (3,7%). La greffe Maïtena ne prend pas, "c'est même un rejet", commente un ex de la chaîne. Et l'absence des "Guignols", qui dopaient l'audience du programme de 30%, n'explique plus à elle seule ce trou d'air.
L'effondrement du "Grand Journal" cache ainsi une crise plus grave : toutes les tranches en clair de Canal+ sont orientées à la baisse. Même "Le Petit Journal" pâtit de sa nouvelle programmation. Quand "Les Guignols" feront leur retour en crypté à 20h50, la chute sera plus lourde, l'émission de Yann Barthès ne pourra plus bénéficier des reports de publicité, son pic d'audience. "Cette programmation, c'est une hérésie ! Il suffirait à Vincent Bolloré de renoncer à basculer 'Les Guignols' en crypté, de les programmer entre 'Le Grand' et 'Le Petit' journal pour redonner un peu d'air à tout le monde", commente un salarié.
Même "Le Supplément" présenté par Ali Baddou souffre le dimanche. La seule émission à se maintenir est celle à laquelle Vincent Bolloré n'a pas encore touché : "Salut les terriens" de Thierry Ardisson ! Après le jeu de chaises musicales d'avant l'été, l'industriel breton n'a-t-il pas qu'une idée en tête : tuer le clair pour transformer Canal+ en une chaîne 100% à péage, comme HBO aux Etats-Unis ? Cette question est dans toutes les têtes des salariés. Et la convention signée avec le CSA l'y autorise. "Je me fous des recettes et des audiences, aurait confié Vincent Bolloré à ses proches selon Les Inrocks. Ce que je veux, c'est que l'abonné en ait pour son argent". Quand il dépense près de 40 euros par mois, l'abonné veut du sport et du cinéma, il se fiche des tranches en clair, pense Bolloré.
Mais ce très cher abonné n'accepte-t-il pas de payer si cher pour un état d'esprit, incarné par ses programmes en clair et ceux qui les animent ? L'avenir le dira car le milliardaire n'a les yeux rivés que sur un chiffre : celui des abonnements. Ils seraient en forte baisse depuis janvier, reste à savoir si cette chute s'est accélérée depuis sa reprise en main. Tuer le clair pour sauver Canal... Ces tranches restent malgré tout une formidable vitrine, un spot publicitaire quotidien. "Quand LGJ tousse, c'est toute la chaîne qui est malade", commente un producteur qui connaît bien la maison. L'access est aussi un écrin pour assurer la promotion de tous les talents Vivendi, de la musique avec Universal au cinéma.
"Le clair, pour lui, c'est D8. L'investissement de 250 millions d'euros avec Hanouna le prouve. Canal va devenir une simple chaîne à péage avec peut-être une fenêtre en clair extrêmement réduite", commente un producteur de la chaîne. Pragmatique, Vincent Bolloré réfléchit déjà à l'après-"Grand Journal". Au plus bas, l'émission ne doit pas devenir un symbole, celui de l'échec de sa relance.