L'Arcom tape sur les doigts de la chaîne. Dans une décision prise le 13 mars et publiée sur son site ce mardi 19 mars, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique s'est penchée sur une interview de Loana dans "Touche pas à mon poste" sur C8. Le 5 février 2024, Cyril Hanouna et ses chroniqueurs avaient interrogé l'ancienne candidate de télé-réalité sur le viol dont elle aurait été victime en septembre 2023.
Dans sa décision, le régulateur rappelle que la séquence a été introduite par une courte vidéo faisant principalement état des déboires de l'invitée. "Alors que cette dernière s'exprimait, des photos de son corps dénudé couvert d'ecchymoses ont été diffusées à l'écran, avec un floutage léger de ses parties intimes. Des questions intrusives quant aux faits dénoncés lui ont été posées", indique l'Arcom, précisant que Cyril Hanouna l'a "interrogée sur le choc traumatique qu'elle avait subi" alors qu'elle avait eu "de grandes difficultés à s'exprimer, rendant son propos difficilement compréhensible".
"Malgré cette situation manifeste de profonde détresse, l'animateur de l'émission a continué de lui poser des questions sur son traumatisme ou encore son intimité", poursuit le gendarme de l'audiovisuel. Et de citer des phrases du présentateur de "TPMP" : "Alors, à la suite de ça, tu as eu des problèmes de santé également, syphilis plus autre chose. Il paraît que vous avez failli mourir", "Il paraît que tu as eu en plus un accident récemment. Tu as fait un malaise dans la rue (...) Qu'est-ce qu'il s'est passé ?".
L'Arcom relève également des propos tenus par les chroniqueurs autour de la table. "Vous le faites exprès de parler comme ça ?", avait demandé Jacques Cardoze, choquant les autres personnes autour de la table. "Est-ce qu'il y a une divergence entre ce que toi, tu as vécu et ce que la personne (...) t'aurais pu entendre dire, de ce qu'elle a dit ?", avait lancé Kelly Vedovelli. Plus tard, durant l'émission, la chroniqueuse et des personnes présentes derrière elle dans le public ont été vues amusées par la situation.
Le régulateur note alors des manquements sur "le respect de la dignité de la personne humaine", "la retenue dans la diffusion d'images ou de témoignages susceptibles d'humilier les personnes" et "l'absence de complaisance dans l'évocation de la souffrance humaine". "En dépit du désarroi et de la détresse manifestes de l'invitée, l'éditeur n'a pas mis fin à la séquence, pas même de manière provisoire le temps de lui permettre de se ressaisir", souligne l'Arcom, ajoutant que cette interview, avec l'ensemble de ces conditions, "était de nature à contrevenir au respect de la dignité de la personne humaine", "exigence à laquelle le consentement de la personne ne permet pas de déroger".
De plus, les images de son corps dénudé couvert d'ecchymoses, "avec un floutage léger de ses parties intimes" et les questions intrusives "posées sans retenue", "ni ménagement", étaient "susceptibles de l'humilier", écrit l'Arcom dans sa décision.
L'autorité de régulation précise aussi que C8 "ne pouvait ignorer la particulière vulnérabilité" et "la situation de détresse dans laquelle elle se trouvait" : "L'éditeur a fait le choix de diffuser son témoignage en direct, à une heure de grande écoute, précédé d'une vidéo faisant principalement état de ses déboires". "Une telle situation est constitutive d'un défaut de maîtrise de son antenne par l'éditeur", argumente l'Arcom. Et de conclure : "Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de mettre en demeure C8 de se conformer à l'avenir" à ses dispositions et à sa convention.