Si le dialogue social est totalement rompu à Air France, la situation n'est guère plus simple à "L'Express". Depuis son rachat par Patrick Drahi, l'hebdomadaire a été mis au régime sec. La semaine dernière, la direction a annoncé un plan de départ social prévoyant le départ de 125 salariés. Des départs qui s'ajoutent aux 115 départs volontaires déjà prévus dans le cadre d'une clause de cession ouverte cet été.
Cette réduction d'un tiers des effectifs passe mal chez les salariés du groupe qui ont interpellé la semaine dernière, Christophe Barbier dans une lettre ouverte. Ils demandent que "les projets éditoriaux et la nouvelle organisation" du groupe soient détaillés. "Il y a un certain nombre d'entre nous qui sont déçus, qui sont tristes parce qu'ils ont l'impression d'avoir perdu Christophe Barbier. Ils ont l'impression qu'il a choisi l'autre camp. Ils ont l'impression d'avoir un directeur général des rédactions alors qu'ils veulent un capitaine. Un capitaine au milieu de la mêlée qui se batte (...) pour des moyens. Je vais te le dire solennellement. C'est ta dernière chance de revenir avec nous et de te battre parce qu'on a besoin de toi. Mais on a besoin de toi avec nous et pas avec Drahi", a lancé la semaine dernière Jacques Trentesaux, délégué CFDT et rédacteur en chef à "L'Express", au patron à l'écharpe rouge, dans une séquence diffusée hier par "Médias, le mag".
Ce matin, Christophe Barbier était au micro de France Inter. Invité de "L'Instant M" de Sonia Devillers, le dirigeant est venu exposer sa "position schizophrénique". "Je suis à la fois avec la rédaction bien entendu, car je suis journaliste, puisque je suis directeur des rédactions de tout ce groupe, et en même temps je suis directeur général délégué donc je contribue avec l'ensemble des managers, et avec le nouvel actionnaire, au redressement de ce groupe qui a des difficultés économiques graves, qui a des comptes dans le rouge. Il faut donc d'abord le redresser. C'est extrêmement douloureux. C'est aussi douloureux socialement que c'est nécessaire économiquement", a-t-il expliqué.
Christophe Barbier a ensuite défendu son ancienne stratégie. "Entre 2008 et 2013, on a mené une bataille défensive car on s'est dit - et on n'a pas été les seuls puisque le président de la République avait la même analyse - que la croissance allait revenir. Donc il s'agissait de traverser cette mauvaise passe pour les médias de presse écrite en essayant de faire la même chose, moins cher. Donc on a mené une bataille défensive avec des départs, beaucoup d'économies sur le fonctionnement. Et on s'est dit que le jour où ça reviendrait, on continuerait à faire les mêmes journaux mais que les moyens reviendraient. Mais on ne peut plus faire les mêmes journaux. Nous ne sommes pas dans un changement de degré mais dans un changement de nature. (...) Il faut inventer de nouveaux journaux dans la nouvelle économie des médias", a-t-il ajouté, évoquant la "révolution" pour le groupe "d'appartenir à un groupe de télécommunication". "C'est le capitalisme qui répond à l'après-crise", a-t-il seulement observé.