Les plateformes sont-elles en train de damer le pion aux chaînes de télévision ? Signé en début d'année, l'accord sur la chronologie des médias est déjà en train d'être renégocié. Depuis début octobre, sous l'égide du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), les parties prenantes de l'accord se déchirent à nouveau sur les délais entre la diffusion des films au cinéma et celle sur les différents supports, que sont les chaînes de télévision gratuites, payantes ou les plateformes SVOD.
Invitée d'Amandine Bégot ce mercredi matin sur RTL, la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, semble donner le point aux plateformes, qui poussent à réduire encore le délai entre l'exploitation des films en salles et l'arrivée des oeuvres dans leur catalogue. "Il y a un enjeu à trouver un équilibre plus respectueux. Surtout que l'on a imposé aux plateformes de financer la création française (...) En contrepartie, elles sont légitimes à demander un raccourcissement de leur délai de diffusion", estime la ministre.
En effet, c'est en contrepartie d'un fléchage de 20% à 25% de leur chiffre d'affaires en France vers la production locale de films, séries, et autres fictions tricolores que les plateformes avaient obtenu de meilleures fenêtres de diffusions. Netflix peut désormais proposer à ses abonnés un film 15 mois après sa sortie en salles (contre 36 mois avant l'accord). L'attente est de 17 mois pour Amazon Prime Video et Disney+.
Mécontente malgré cette avancée, la plateforme aux grandes oreilles accentue la pression depuis des mois. Elle a pris la décision de boycotter les cinémas français et de proposer en fin d'année son film de Noël, "Avalonia, l'étrange voyage", directement sur sa plateforme. La menace planait également sur "Black Panther : Wakanda Forever" mais Disney a finalement confirmé, après l'ouverture de nouvelles discussions autour de la chronologie des médias, que le film passerait par la case cinéma à compter du mercredi 9 novembre.
Pourquoi Disney est-il mécontent ? Disney+ refuse en fait de retirer temporairement de son service en ligne les films qu'ils financent lorsqu'ils passent sur des chaînes en clair comme TF1, France Télévisions et M6. La fenêtre d'exclusivité de Disney, expliquait en juin Hélène Etzi dans "Les Échos", "est la plus courte de toutes avec seulement 5 mois".
Les chaînes de télévision peuvent diffuser des films 22 mois après leur sortie en salles contre 17 pour Disney. Cette dernière souhaitait en conséquence "réformer à court terme son obligation de retirer ses films de la plateforme pendant la fenêtre des chaînes gratuites".
Mais les télévisions gratuites ne l'entendent pas de cette oreille - c'est le sens de leur appel aux pouvoirs publics publié fin septembre dans "Le Monde" - et "demandent à ce que l'étanchéité de leur fenêtre, c'est-à-dire la capacité pour elles d'être les seules à exploiter le film lorsque leur droit s'ouvre, soit reconnue sans condition par tous et selon les termes et l'esprit du nouvel accord".