Qui veut épouser M6 ? Vendredi soir, un an et demi après avoir annoncé leur volonté de fusionner, les groupes Bouygues (TF1) et RTL Group (M6) ont officialisé l'abandon de ce rapprochement, avant même la décision finale de l'Autorité de la concurrence prévue le 17 octobre. Puisque "seuls des remèdes structurels concernant a minima la cession de la chaîne TF1 ou de la chaîne M6 seraient de nature à permettre l'autorisation de l'opération", les parties ont conclu "que le projet ne présentait plus aucune logique industrielle", ont-ils annoncé dans un communiqué commun.
Ce mariage avorté est un lourd échec pour Bertelsmann, actionnaire majoritaire de RTL Group, qui possède 48,26% du groupe M6. Thomas Rabe, directeur général de Bertelsmann, avait déjà alerté, auprès du "Financial Times" fin août, des risques d'un raté de cette opération, estimant que cela créerait un précédent à l'échelle du continent qui pourrait entraver les diffuseurs européens dans leur bataille contre les services de vidéo à la demande américains comme Netflix, Amazon et Disney+.
A présent, la situation se complique pour le groupe M6 puisqu'il entre dans une course contre la montre. En novembre prochain, l'entreprise audiovisuelle de Nicolas de Tavernost doit se faire ré-attribuer ses fréquences ; son autorisation d'émettre s'arrête en mai 2023. Si cette réattribution a lieu, RTL Group sera contraint de garder le groupe M6 au moins jusqu'en 2028, en tant qu'actionnaire majoritaire.
C'est donc un casse-tête pour le groupe Bertelsmann qui souhaite depuis janvier 2021 céder ses parts du groupe M6 et quitter le territoire français. A l'époque, la dot s'élevait à 3 milliards d'euros. Il lui reste ainsi quelques mois, voire seulement quelques semaines, pour trouver un nouveau prétendant à la Six. Selon "L'opinion", le géant des médias allemand pourrait ainsi se retourner vers d'anciens courtisans du marché français comme Xavier Niel (Mediawan), Patrick Drahi (Altice Medias), Vincent Bolloré (Vivendi) et Daniel Kretinsky (actionnaire indirect du "Monde", "Marianne", "Elle").
Interrogé ce matin sur BFM Business, Philippe Bailly, président-fondateur de NPA Conseil et expert en économie de l'audiovisuel, estime que le groupe "le mieux placé" est désormais Altice (BFMTV, RMC). "Le groupe Altice connaît bien le dossier. Il avait négocié la reprise de TFX et 6ter. A cette occasion, il a fait tout le parcours avec l'autorité de la concurrence et avec l'Arcom. En publicité, Altice rééquilibrera le marché", déclare-t-il.
La romance pourrait également avoir lieu avec une société étrangère, à l'instar de Mediaset, contrôlée par Silvio Berlusconi, qui avait été considéré comme un repreneur sérieux en 2021. Bertelsmann pourrait aussi toquer à la porte de sociétés n'appartenant pas au secteur des médias afin d'accélérer son passage face à l'Autorité de la concurrence. Cette dernière sera alors en mesure de valider une fusion plus rapidement étant donné que le volet du monopole publicitaire sera écarté de l'équation.