Musique
Jérôme Van Den Hole : "Je ne suis ni dans la famille de Biolay, ni dans celle de Christophe Maé"
Publié le 4 mai 2011 à 15:47
Par Julien Mielcarek
Alors qu'il sort son tout premier album, rencontre avec un chanteur atypique qui évoque la "nouvelle chanson française", la crise du disque ou encore la promo dans les médias. Entretien.
Jérôme Van Den Hole Jérôme Van Den Hole© Philippe Lebruman
Jérôme Van Den Hole Jérôme Van Den Hole
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Il voulait faire du rock, il signe finalement un disque de variétés difficilement étiquetable. Jérôme Van Den Hole débarque avec un premier album de chansons aux mélodies entêtantes et aux harmonies soignées, pas toujours accessibles à la première écoute. Mais accrochez-vous car cet album est bon et son interprète étonnant. Ostensiblement en décalage avec ce qu'on a coutume d'appeler la « nouvelle scène française », l'auteur surfe sur son côté décalé même si ce serait une erreur de le qualifier de trublion. Entretien.

puremedias.com : Si on s'arrête à votre clip ou encore à l'image que vous pouvez dégager dans vos chansons ou dans les interviews et que je dis que vous êtes un marrant, vous le prenez comment ?
Jérôme Van Den Hole : Le truc, c'est que « marrant » peut être une partie d'une description mais si on s'en tient à ça, c'est un peu réducteur.

Mais vous revendiquez ce côté ? « Marrant » n'est peut-être pas le bon terme...
Ce qui est sûr, c'est que je ne repousse pas mon côté naturel à la guignolade, mais ce n'est pas que ça. Je suis quasiment autant influencé par des poètes que des comiques, des comiques que je considère d'ailleurs comme des poètes la plupart du temps.

Lesquels par exemple ?
Desproges, Coluche, Benoit Poelvoorde dont je suis un inconditionnel absolu.

Et plus récemment ?
Nicolas Bedos que je trouve absolument génial. Enfin, je m'emballe un peu mais je le trouve super, très très bien (rires).

Qu'est-ce qui vous plait chez lui ? Dans les noms que vous citez, on retrouve un côté un peu irrévérencieux...
Au-delà de ça, c'est comme d'habitude, on peut se marrer de tout, ça dépend de la façon dont on le fait et avec qui. Evidemment, on ne peut pas rire de tout et de tout le monde, c'est le grand classique. Mais chez Nicolas Bedos, j'aime bien sa plume et sa gueule déjà. Il a une aisance et la façon dont il se marre des choses me parle carrément. Je pense qu'on a été élevés au même biberon.


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A l'inverse, y-a-t-il des auteurs et des comiques que vous exécrez ?
(rires) Je ne les exècre pas, ils m'indiffèrent ! J'ai comme principe de ne jamais dégueuler sur un truc, je trouve ça vraiment inutile. Par exemple, je peux parler de Florence Foresti que je trouve foncièrement drôle mais qui, pour moi, surfe un peu trop sur la vogue actuelle qui est la peinture du quotidien et tout ça. Je trouve qu'elle le fait hyper bien mais voilà, j'aime Desproges parce qu'il peut parler du cancer et pas juste des problèmes d'une maman avec ses enfants, son sac de courses et le plombier. Mais voilà, c'est parce que j'aime les textes forts aussi.

Toute cette vague d'auteurs qui parlent de la vie quotidienne, le trentenaire parisien... Tout ça, on a l'impression que ça vous horripile un peu. On ne va pas citer de noms mais bon...
Non, non parce que je suis un gros client de Philippe Katerine depuis les premiers albums. J'adore ce type-là alors que j'avais plein d'amis qui le trouvaient trop maniéré, parisien. Ce mec m'a parlé assez rapidement et ça ne m'a pas étonné de savoir qu'il était vendéen, qu'il jouait au basket et que ce n'était pas par nature un parisien pédant et dégueulasse. C'est un mec qui s'amusait de ça.

Dans une de vos interviews, vous citez aussi Vincent Delerm qui, typiquement, rentre dans cette catégorie...
Oui et Vincent Delerm, ça ne me dérange pas du tout. Après, ce n'est pas Frank Sinatra, et tout le monde l'avait constaté. Mais je trouve la plupart de ses textes assez pertinents. Biolay aussi, surtout dans son dernier album où il a écrit des chansons vraiment très, très belles. Je n'ai pas de chapelle. Après, il se trouve que je prends peut-être une posture un peu moins parisienne que ces gens-là donc il arrive que certains médias parisiens n'aiment pas ça ou prennent ma sauce au premier degré, ce qui est étonnant pour des gens qui sont censés être plus intelligents que les autres (rires). Mais tant pis pour eux. S'ils tombent dans le piège, voilà.



Vous avez déjà vécu ça en promo ?
Non mais j'ai déjà lu à droite et à gauche que je pouvais avoir des textes faciles. Or, pour qui a écouté l'album plus de deux fois, il peut se rendre compte qu'ils ne sont pas si faciles que ça et que les apparences sont parfois trompeuses. Mais bon, ils finissent peut-être quand même par trouver que je suis un sombre crétin donc tant pis, ce n'est pas très grave de toute façon.

C'est peut-être aussi parce que vous jouez à fond la démarcation avec toute cette vague de chanteurs et d'auteurs. Dans la présentation de votre maison de disques, il est clairement écrit que vous êtes « loin des ritournelles, pas un crooner en noir et blanc »...
Ça, c'est Pierre Siankowski des Inrocks qui a écrit ça, c'est ça qui est drôle. Il aime beaucoup ce que je fais et il a quelque fois un peu de mal à imposer ça dans sa rédaction. C'est souvent comme ça que ça se passe : on a un ami commun donc il n'avait pas d'a priori sur ce que je faisais et il ne s'est pas dit "Tiens, encore un chanteur à la con" parce que la chanson française n'a pas toujours très bonne presse en général dans les médias. Et, je pense qu'il a écouté mes chansons d'une oreille plus attentive et ça s'est très bien passé. Mais c'est vrai que je ne suis ni dans la famille de Biolay, ni dans celle de Christophe Maé, c'est pour ça que c'est compliqué pour les gens.

Le clip de "S'en aller"


Qu'est-ce qu'on doit dire pour qualifier votre style musical ? C'est de la variété ?
Je sais qu'il faut toujours qu'on soit étiqueté...

A la Fnac, on vous met dans quel rayon ?
Je serai en chanson française, évidemment. Je fais de la chanson française, à partir du moment où j'écris des chansons et que je les chante en français. C'est donc de la chanson française. Et s'il fallait affiner un peu, mes référents datent plus des années 60. C'est plus facile de me comparer à Dutronc ou Polnareff qu'à Christophe Maé ou Vincent Delerm. Même si j'adore Bashung, je n'ai pas son héritage en direct. Je ne suis pas un "fils de", je suis plutôt nourri de beaucoup d'expériences musicales, ce qui fait que, quand j'écris une chanson, je n'essaie pas de "ressembler à...".



C'est un disque assez complexe, qu'il faut beaucoup écouter. Ce côté très musical est le résultat de vos années de conservatoire ?
C'est votre avis mais ce n'est pas forcément celui de tout le monde. Je connais des gens qui écoutent ce disque d'une façon assez basique et qui le trouvent entraînant, sympa.

Mais il y a une richesse dans les harmonies...
Oui, je vois ce que tu veux dire. En fait, j'ai d'abord conçu les chansons basiquement, guitare-voix, après des expériences plus ou moins réussies. Je me suis dit que si la chanson était bonne en guitare-voix, c'est que c'était une bonne chanson. Si tu caches la poussière sous le tapis avec des arrangements à la con, va savoir si la chanson est bien ! Ensuite, je voulais qu'il y ait une cohérence dans le disque donc tous les titres ont été enregistrés de la même façon, en live, dans une pièce, à l'ancienne. Ce résultat très spontané m'intéressait. Je fais de la musique depuis très longtemps donc j'ai eu la tentation, comme certains écrivains dans leur premier roman, de tout dire. Et ce n'est pas comme ça que ça marche (rires). J'avais fait un truc très ambitieux où je voulais tout tenter. Je voulais faire du rock à la française, le genre le plus ringard du monde, et ça n'a pas marché. Mais il a fallu que je le fasse pour que je m'en rende compte.

Quand vous dites que ça n'a pas marché...
En fait, j'ai signé dans une maison de disques. L'album a été enregistré mais il n'est pas sorti. Ce fut une expérience très frustrante, je me suis embrouillé avec tous mes collègues mais ça m'a fait un bien fou, évidemment. Après, c'était évident que j'allais continuer dans la musique donc j'ai réécrit des chansons en faisant table rase. J'ai enregistré des maquettes chez moi, mon éditeur a continué à me soutenir et j'ai fait le parcours habituel : j'ai joué dans des bars à Paris, on a fait venir des gens et la sauce a commencé à prendre. J'ai commencé à intéresser quelques maisons de disques et c'est parti.



La signature en maison de disques reste le chemin incontournable pour un artiste ? Comment on démarre une carrière dans une industrie qu'on présente en crise ?
C'est surtout un secteur en cure d'amaigrissement, au régime Dukan tu vois ! C'est un marché qui était obèse, le marché du disque était une bulle. On est revenus à des chiffres qui correspondent plus ou moins aux chiffres normaux du vinyle. Les gens se sont mis à acheter des CD parce qu'il y avait un nouvel objet, une nouvelle technologie, qu'on achetait un CD comme un paquet de pâtes et, au début, ce n'était pas si cher. Le CD est devenu cher, les gens ont fini par en avoir marre d'acheter un CD pour une chanson et en avoir dix pourries à côté. Les maisons de disques se sont foutues un peu de la gueule des gens et ils s'en sont rendus compte, c'est pas plus mal. Après, que la musique soit gratuite sur internet, c'est autre chose et je ne suis pas d'accord avec ça mais, au fond, internet a fait un bien fou puisque les gens peuvent écouter avant de se faire avoir et je suis désolé mais, quand ils aiment, ils achètent. Ils achètent peut être moins qu'à une époque mais demandez à Christophe Maé si la crise du disque est compliquée pour lui, je n'ai pas l'impression. Il y en a qui s'en sortent très bien encore : Zaz, c'est son premier disque tout comme Ben L'Oncle Soul, clairement, ça va aussi pour eux.

EMI vous soutient beaucoup. Vous avez la pression des ventes ou vous vous installez dans un processus plus long ?
De toute façon, quand on a un premier disque et qu'on n'est pas le tube de l'été sur TF1, on n'en vend pas des caisses la première semaine, ça, c'est sûr (rires). Je pense que le projet est d'installer le disque sur six mois, un an et de travailler. Pour l'instant, il se passe pas mal de choses, j'ai de bons retours en presse. En télé, je devrais montrer ma gueule de temps en temps donc voilà, le truc se fait petit à petit. Après, le premier single est "S'en aller", est-ce que c'est le plus accrocheur ? Ce n'est pas sûr et peut-être qu'un morceau comme "Boom Boom" ou "Debout" sera plus simple pour les gens en radio.

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Pour la promo, vous acceptez d'aller partout même dans des talks-show comme celui de Ruquier avec les désormais célèbres Naulleau & Zemmour ?
Non, je vais partout. Je pars du principe qu'il faut respecter les gens qui vous regardent. Après, les interlocuteurs, c'est autre chose mais on ne peut pas réduire un auditoire à deux présentateurs. Vu les fenêtres qui existent aujourd'hui pour les musiciens et les nouveaux projets, on y va et s'il faut se défendre. Je suis fier de ce disque donc je n'ai aucun problème à aller le défendre où que ce soit, même si c'est un peu violent. Et vu qu'il ne reste plus beaucoup d'émissions de variétés... On est dans une économie où on vous dit "Tu vas passer à la télé demain", tu ne peux pas dire non. Et pourquoi dire non ? Si c'était l'émission musicale de Marine Le Pen, je n'irai pas mais, à part ça, mon éthique s'arrête à la politique ou alors je crache sur tout en mettant tout le monde dans le même sac.



Et ça ne vous gêne pas d'être interrogé sur des sujets qui n'ont rien à voir avec la musique comme Marine Le Pen, la présidentielle...
Je joue le jeu, je n'ai pas de soucis avec ça. Je ne suis pas un artiste engagé dans le sens où je ne fais pas de la chanson pour ça mais, après, je n'ai pas de mal à dire que Marine Le Pen n'est pas ma tasse de thé, effectivement.

Vous ne faites pas de chanson pour le dire parce que vous ne le sentez pas ou que vous estimez que ce n'est pas votre rôle ?
Je ne sais pas le faire. Déjà, j'en ai entendu très peu que je trouvais pertinentes et comme par hasard, ce sont les plus grands qui les ont écrites, comme Brassens. Même Ferré, je le trouve moins bon dans l'exercice. J'aurais bien aimé le "Gare aux gorilles" de Brassens mais je n'ai pas ce talent (rires).

Pour vous, ce serait quoi la reconnaissance ou le succès pour ce disque ?
Si ce premier disque marche correctement, je peux juste avoir le confort d'en faire un deuxième. Pour un musicien, de pouvoir voir venir, c'est rassurant car ce n'est pas le job le plus rassurant du monde ! Sans langue de bois, ce serait fondamentalement ça. Après, comme n'importe qui, je ne pourrais pas me plaindre d'un succès public, dans le sens où les gens seraient réceptifs au truc. Souvent, les artistes sont très sensibles à la critique et je suis déjà très content de lire des critiques plutôt bonnes sur le disque et ça me fait chier d'en lire des mauvaises aussi. C'est déjà une étape très importante. Après, le succès, on sait qu'il faut passer à la radio et c'est encore autre chose, ce n'est pas toujours sur la qualité intrinsèque du disque et Colonel Reyel ne me démentira pas là-dessus. Je suis aussi collègue de René La Taupe chez EMI (rires).

Faites un duo !
Pourquoi pas, j'ai proposé à EMI mais ils ne sont pas très chauds, il s'est barré, il est retourné dans son trou, on n'arrive pas à le trouver (rires).

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