J-2. Dans deux jours, Ursula Gauthier, qui est la correspondante de "L'Obs" en Chine depuis six ans, va être poussée vers la sortie à cause du non-renouvellement de sa carte de presse et de son visa par les autorités chinoises. Un départ forcé que l'hebdomadaire voit comme une expulsion. La direction de "L'Obs" a dénoncé une "atteinte inacceptable à la liberté d'informer" et une "entrave réelle à l'exercice du métier de journaliste en Chine". Le 18 novembre dernier, Ursula Gauthier avait signé un article intitulé "Après les attentats, la solidarité de la Chine n'est pas sans arrière-pensées", décrivant les mesures répressives des autorités chinoises.
Ce matin, Ursula Gauthier a dénoncé les rapports difficiles des autorités chinoises avec la presse. Invitée de la matinale de France Inter, la journaliste a estimé qu'il était "vraiment terrible" d'être un journaliste chinois en Chine. "On ne peut rien écrire d'original, on est obligé de reprendre les dépêches de l'agence Chine nouvelle. Il y avait des médias extrêmement bons, qui faisaient des enquêtes sur des sujets très approfondis et vraiment très professionnels mais ils ont été muselés.... Il y avait des blogueurs très indépendants d'esprit qui pouvaient s'exprimer sur Weibo, l'équivalent de Twitter, ils ne peuvent plus le faire. Et maintenant c'est au tour des médias internationaux. Il y a vraiment une tentative systématique de mise au pas de la presse", a-t-elle indiqué.
Pourtant, ironie de l'histoire, son article n'est pas accessible en Chine, même en français, puisque Internet n'est pas libre dans le pays. "Il n'a pas été lu par les personnes du ministère des Affaires étrangères que j'ai rencontrées trois fois. Ils se fondaient sur la version qui a été donnée par le 'Global times', un quotidien chinois virulent et très nationaliste. En fait je pense que personne n'a lu mon article", a-t-elle ajouté en expliquant avoir reçu des "menaces de mort". Des internautes ont utilisé des logiciels militaires pour chercher son adresse et ses photos pour les publier sur des forums de discussions et sur le site du "Quotidien du peuple". "Les internautes réagissent en bas des articles officiels. On laisse libre cours au courroux du peuple et il s'en donne à coeur joie", indique-t-elle.