Gérard Depardieu se met dans la peau de Dominique Strauss-Kahn. Ou plutôt de Monsieur Devereaux, le nom de son personnage dans "Welcome to New York", le film d'Abel Ferrara sur l'affaire DSK, qui sera disponible uniquement en VOD le 17 mai prochain. Un choix qu'avait justifié le comédien en mars 2012 par son inimitié pour l'ancien directeur du FMI, le jugeant "arrogant" et "suffisant". Interrogé par nos confrères de Télérama cette semaine, Gérard Depardieu revient longuement sur sa vision de l'affaire DSK et sa mise en scène dans le film d'Abel Ferrara.
"Pour dire vrai, je ne me suis pas précipité dans Welcome to New York avec gourmandise. J'étais même un peu dégoûté" lâche d'emblée Gérard Depardieu. "Mais ce n'est pas mon genre, non plus, de jouer les redresseurs de torts. D'autant que les hommes politiques sont rarement des modèles de vertu. Ils sont dans l'arrangement, la stratégie. Ils mentent constamment. Au point où en était Dominique Strauss-Kahn, à la veille sans doute d'être élu président, la lutte pour le pouvoir devient quelque chose d'inhumain. Exige de vous des comportements inhumains", juge le comédien.
Mais, plus que les faits, "c'est surtout ce qu'il y a derrière cette affaire qui m'a en effet intéressé" explique Gérard Depardieu. "La tragédie d'un homme au faîte de la puissance et piégé par ses pulsions, parce que ne les remettant jamais en question, trop sûr de lui. La tragédie intime d'un couple - elle sait et il sait qu'elle sait. La tragédie officielle de ce couple à la veille de prendre le pouvoir en France, quand tout s'écroule. Et comment nier que l'héroïne ait furieusement envie de devenir première dame, ce que Devereaux lui reproche, la manière dont sa belle-famille est devenue si riche" déclare l'acteur, comparant l'affaire à un texte de Shakespeare.
En revanche, pour se préparer pour le rôle, Gérard Depardieu n'a pas souhaité revoir les images de l'affaire. "Je n'ai revisionné aucune des images qu'on a prises de lui, et je n'ai rien lu. Sauf le descriptif qu'a fait le FBI des événements" affirme-t-il avant de fustiger les interviews qui ont suivi, notamment celle d'Anne Sinclair dans "Un jour, un destin". "Le reste, de ses explications avec Claire Chazal à celles, récentes, d'Anne Sinclair avec Laurent Delahousse, m'a semblé truqué jusqu'à l'obscène" lâche Gérard Depardieu.
"De toute façon, on est souvent meilleur dans les rôles qu'on n'aime pas. On n'y est pas piégé par l'affect. En plus, j'ai horreur des personnages de fiction qui s'expliquent. Je n'aime pas qu'ils révèlent trop d'intimité. Je voulais surtout montrer le drame d'être traqué, puis inculpé. Qui qu'on soit. Montrer combien la chair peut être triste, aussi" se justifie-t-il, affirmant avoir "rarement besoin d'en savoir trop".