C'était pourtant l'un des films les plus attendus de l'année, qui sentait déjà le soufre. Mais "Welcome to New York", le film d'Abel Ferrara sur l'affaire Strauss-Kahn, avec Gérard Depardieu dans le rôle de l'ex-patron du FMI et Jacqueline Bisset dans le rôle d'Anne Sinclair, ne sortira pas en salles.
Alors qu'ils espéraient que le film soit sélectionné pour le prochain Festival de Cannes, Vincent Maraval et Brahim Chioua, les co-producteurs français, expliquent dans une interview au "Monde" que le film sortira directement en VOD, pendant le Festival, au prix de 7 euros. "Cela fait longtemps qu'on voulait tenter une expérience de distribution en ligne. On n'aime pas le terme VOD. Pour nous, c'est du cinéma à la maison, comme cela se fait aux Etats-Unis et dans de nombreux pays, où les films sortent en même temps en salles et sur Internet. (...) En France, comme la loi interdit la simultanéité de la salle et de la VOD, on a fait le choix d'Internet. Dans d'autres pays, aux Etats-Unis notamment, le film sortira en même temps en salles et sur le Web", déclare le célèbre producteur, connu pour ses coups de gueule. "Quand on voit que '4 h 44, dernier jour sur Terre' (le précédent film d'Abel Ferrara , ndlr) a fait 20.000 entrées en salles en France et 3 millions de vues sur YouTube, ça fait réfléchir", ajoute-il.
"C'est une façon de dire aux chaînes de télé : OK, vous n'avez pas voulu financer le film, on peut faire sans vous", ajoute Vincent Maraval. En effet, "Welcome to New York" a eu du mal à boucler son financement, aucune chaîne de télévision française n'ayant accepter de le soutenir. Vincent Maraval pointe directement les "réticences" de Canal+ et Orange, à qui il avait fait lire le scénario.
Pour garantir son existence malgré un fragile financement par des Américains, Gérard Depardieu a accepté de ne pas être payé pour faire ce film. Les deux producteurs estiment par ailleurs que cette sortie en ligne doit permettre de lutter contre le piratage. "Il y a une attente énorme sur ce film. Tout le monde va vouloir le voir tout de suite, c'est de la très bonne chair à piratage", expliquent-ils.
Mais cette sortie sur Internet ne se fera pas en catimini. Les producteurs promettent d'organiser une projection en marge du festival de Cannes. Et ils vont dépenser "environ un million d'euros" pour en promouvoir la sortie ! "C'est plus que pour 'Her' de Spike Jonze par exemple, alors qu'il n'y a pas de frais techniques liés à la fabrication des copies. On va faire de l'affichage, des bandes annonces, mais aussi de la pub télé – ce qui est interdit lors d'une sortie en salles. Pendant dix jours, le film sera exposé sur les pages d'accueil de toutes les plateformes internet, iTunes, Free, Orange...", promettent-ils. Ce choix de sortie, pas banal pour un film aussi attendu, devrait faire beaucoup parler dans le monde du cinéma. "Welcome to New York" a décidément envie de faire polémique.