Troisième et dernière rentrée de l'année pour Léa Salamé. Après la matinale de France Inter et "L'émission politique", c'est au tour de "Stupéfiant !" de faire son retour - avec une petite semaine de décalage en raison du décès de Charles Aznavour - sur France 2. L'émission produite par Bangumi, qui accueille Fabrice Lucchini pour sa première, revient pour une saison 3 dans sa case du lundi soir. À l'occasion du retour de "Stupéfiant !", puremedias.com s'est entretenu avec celle qui a été au coeur de l'événement en cette rentrée, de la démission de Nicolas Hulot sur France Inter à la rentrée politique d'Édouard Philippe sur France 2.
Propos recueillis par Pierre Dezeraud & Florian Guadalupe.
puremedias.com : Comment définiriez-vous "Stupéfiant !" ? Comme une manière de faire de la Culture pas chiante en télé ?
Léa Salamé : Je prends le compliment, ça me va ! Je pense que ce n'est pas que ça mais c'est sûr que c'est une manière d'écrire et de raconter la Culture différemment. Je crois que le succès de l'émission tient aux sujets qui sont menés par une équipe de jeunes reporters qui viennent tous de l'actu. Ils écrivent les reportages avec un ton beaucoup plus nerveux et électrique. Tout ça est très moderne. Je crois que que les téléspectateurs apprennent des choses et il n'y a pas de prétention de notre côté. "Stupéfiant !", c'est accessible et pointu à la fois. Ce cocktail, c'est la réussite de l'équipe emmenée par Jérôme Bermyn, le rédacteur en chef de l'émission, et Laurent Bon qui est à mon sens le meilleur producteur télé du moment. Il a quelque chose qu'avait "Libération" dans les années 80. Il sent l'air du temps avant les autres. Cette émission, c'est un peu sa danseuse par rapport à "Quotidien" mais il y tient énormément.
Alain Delon avait inauguré la première saison, Vincent Cassel la seconde. Fabrice Luchini en parrain de la saison 3, c'est un choix personnel ?
Absolument. C'est quelqu'un de très important pour moi depuis longtemps, avant même que je ne sois journaliste. Je vais voir tous ses spectacles depuis que j'ai 20 ans. J'ai forcé tous les hommes avec qui j'ai été à aller voir Luchini. Il y a une forme d'éblouissement devant la manière dont il s'emploie à transmettre le patrimoine de la langue française. Je partage aussi les mêmes goûts littéraires que lui. Céline, Flaubert, Péguy, ce sont des lectures qui me parlent. Ca fait résonner un truc en moi. La manière dont il arrive à transmettre ces textes dans une salle, c'est merveilleux. Je l'ai poursuivi pour qu'il soit mon invité. Et il nous fait un beau cadeau en nous emmenant dans sa maison dans le sud de la France, et en nous permettant de valoriser l'oralité à travers cette spéciale "art de parler". Il y avait deux grands passeurs de la langue française : Jean d'Ormesson et lui. Il n'y a plus que lui. Ceux qui aiment Luchini adoreront cette émission. Ceux qui ne l'aiment pas seront surpris. Ce n'est pas le sketch habituel, c'est plutôt comme une master class où il nous explique comment il décortique un texte. On le voit aussi juger l'éloquence des politiques. Et vous verrez qu'on arrive aussi à le faire taire...
"Je m'interroge souvent sur les raisons du désamour des Français pour la culture en télé"
Aujourd'hui, est-ce qu'il n'y a qu'un magazine comme "Stupéfiant" pour oser le parallèle entre le clash Booba/Kaaris et la brouille Rimbaud/Verlaine, comme ce sera le cas dans l'émission de ce soir ?
Je ne sais pas si nous sommes les seuls. Mais, vous voyez, typiquement, c'est une idée de Laurent Bon. Je veux le redire encore, cette émission, c'est son succès. Modestement mais fièrement, j'incarne et je porte cette émission. Le clash entre Booba et Kaaris, c'est l'art de parler parce que c'est aussi l'art de se disputer. Ce clash très médiatisé est parti d'une battle de mots. C'était l'occasion toute trouvée pour revenir sur les grandes disputes d'amitié, voire d'amour pour Rimbaud et Verlaine, qui ont marqué la culture française. Il y a aussi Camus et Sartre et d'autres... C'est une grande remise en perspective.
Il faut avoir ce ton là, souvent surprenant, parfois déconcertant, pour parvenir à intéresser les gens à la Culture ?
Je crois. On me demande souvent : "Pourquoi c'est si difficile la Culture à la télé ?". J'avoue que je n'ai pas la réponse. Je suis un peu nostalgique du temps où Bernard Pivot rassemblait des millions de téléspectateurs, même si c'était en première partie de soirée. C'est difficile en télé mais il y a encore des zones de résistance. "Stupéfiant !" en est une, tout comme "La Grande Librairie". Je m'interroge souvent sur les raisons de ce désamour. Est-ce de notre faute ? Pourquoi la France s'arrêtait pour voir l'émission de Pivot et faisait la queue le lendemain dans les librairies ? Est-ce la faute de la concurrence entre les chaînes et des nouvelles manières de consommer ? Ce sont des questions auxquelles je n'ai pas la réponse.
L'audience de "Stupéfiant !" a progressé entre la saison 1 et la saison 2, pour atteindre près de 700.000 téléspectateurs. Pensez-vous qu'il y a encore une marge de progression ?
On espère ! Déjà, ce serait bien de pérenniser le socle de fidèles qui s'est constitué la saison dernière.
On ne va pas se mentir non plus. Le lundi en deuxième partie de soirée, avec une émission culturelle, on ne fera jamais 2 millions de téléspectateurs. Ce qui a aussi été notable sur la deuxième saison, c'est l'augmentation des visionnages en replay.
"Recevoir le ministre de la Culture ? Pourquoi pas"
Il y a clairement des sujets qui intéressent plus que d'autres. Notamment la spéciale Johnny ou celle sur le nu l'année dernière. Ce sont ces sujets-là, fédérateurs, que vous recherchez ?
C'est important qu'on le fasse mais on ne veut pas se contenter de ne faire que ça. On ne va pas faire le nu ou Johnny toutes les semaines parce que ça marche. Oui, Johnny marche beaucoup mieux que la spéciale Louvre et le nu marche plus que la spéciale Gauguin. Mais on va continuer à parler du Louvre et de Gauguin.
Justement, quels thèmes seront abordés cette saison ?
Dans les prochaines semaines, il y aura une spéciale Michael Jackson mais aussi une émission consacrée aux salles de cinéma, avec notamment une interview complètement folle d'Eddy Mitchell dans la salle de cinéma où il a tourné "La dernière séance". Nous préparons aussi une spéciale Victor Hugo et une spéciale Jacques Brel.
Vous imagineriez recevoir le/la ministre de la culture dans "Stupéfiant" ?
Pourquoi pas ? D'ailleurs, on réfléchit à une émission autour de la Culture et de la politique.
"Il a fallu se serrer la ceinture mais le contenu de 'Stupéfiant !' n'est pas impacté"
Comme les deux saisons précédentes, l'émission revient pour une vingtaine d'émissions dans la saison ?
Oui, ça ne change pas. Et toujours quelques best of dans l'année. L'émission est aussi de nouveau rediffusée le samedi soir après "On n'est pas couché" sur France 2.
Dans quelle mesure "Stupéfiant !" est-elle impactée par les économies réclamées par la direction de France Télévisions ?
En période de vaches maigres, toutes les émissions y passent. Il y eu une petite baisse de budget mais "Stupéfiant !" est l'une des rares émissions qui a été signée pour toute la saison. Il a fallu se serrer un peu la ceinture mais le contenu de l'émission n'est pas impacté.
Vous demeurez vigilante sur les horaires de programmation de l'émission ? Certaines ont été programmées excessivement tard la saison dernière. Et les primes de France 2 démarrent désormais plus tard...
Je suis très vigilante concernant cette question. Nous sommes très tributaires de ce qui est diffusé avant nous. Or, le lundi soir est une case mouvante, dont les contenus changent souvent. Pour nous, commencer à 22h45, ce n'est pas pareil que de commencer à 23h30. Parfois, nous avons été programmés tard et nous avons été sanctionnés par le public. C'est normal, c'est le début de la semaine, les gens travaillent le mardi, ils ne vont pas veiller jusqu'à 1 heure du matin. Je dois dire que cette année la programmation des premières émissions semblent se fixer à 22h40. C'est une bonne nouvelle car une deuxième partie de soirée, ce n'est pas une troisième partie de soirée.
"Je suis dans un moment de ma vie où je me brûle un peu plus"
On a beaucoup parlé de l'emploi du temps de Nikos sur Europe 1. Mais vous, entre les tournages de "Stupéfiant !" la semaine, la matinale de France Inter tous les matins et "L'émission politique" toutes les six semaines, comment faites-vous pour vous organiser avec cet emploi du temps monstre ?
C'est très dur. Je n'aime pas me plaindre parce que personne ne m'a mis un pistolet sur la tempe pour avoir cette vie qui est choisie à 100%. Mais je ne cache pas que j'ai beaucoup hésité à re-signer les trois à la fin de l'année dernière. Lors de la spéciale Cannes, j'ai interviewé Cate Blanchett. Elle m'a dit : "Les journalistes me demandent toujours comment j'arrive à gérer ma carrière d'actrice, ma carrière de femme engagée et ma vie de maman. La réponse, c'est que comme toutes les autres femmes, je n'y arrive pas". Moi non plus, je n'y arrive pas. Et oui, c'est plus difficile pour une femme. Je n'aurais pas dit ça il y quelques années. Je crois que je deviens plus féministe en vieillissant. Je me réveille tous les matins à 5 heures pour Inter, il y a un à deux tournages de "Stupéfiant" en semaine et "L'émission politique" est une énorme machine à gérer. À côté de ça, j'ai une vie personnelle et une vie de mère à gérer. Je cours après le temps. Je suis dans un moment de ma vie où je me brûle un peu plus. Il y a un moment, nécessairement proche, où je vais devoir arrêter l'une ou plusieurs de ses activités.
Votre place au sein de la matinale Inter a évolué cette année avec votre interview de 7h50 et désormais l'interview à deux voix de 8h20 avec Nicolas Demorand. Pourquoi cette évolution ?
C'est une idée qui vient de Catherine Nayl, directrice de l'information de France Inter. Elle s'est dit, à raison, qu'il y avait quelque chose de bancal dans la répartition des choses. Elle avait envie de tenter l'interview à deux voix. Ca n'avait rien d'évident sur le papier. Ce genre de mariage, ça peut tourner à la catastrophe et au bras de fer. Avec Nicolas Demorand, ça fonctionne très bien. C'est rare de réussir les duos et j'y arrive avec Thomas Sotto en télé et avec Nicolas en radio. C'est peut-être parce que je ne suis pas là pour lui prendre sa place ! On prend un plaisir fou ensemble depuis la rentrée. Je pensais que j'en avais assez et que c'était ma dernière saison. Mais, ce 8h20 plus dense, c'est la bonne surprise de la rentrée.
Comment vous répartissez-vous les interventions avec Nicolas Demorand ?
On s'appelle tous les soirs à 17h. On évoque tous les thèmes ensemble. Il y a une répartition naturelle qui se fait ensuite. C'est un mariage heureux. Nicolas est un puits de culture et de puissance radiophonique. C'est aussi un homme qui a des failles et ça me touche.
"L'un de mes combats personnels sur Inter, c'est de donner la parole à tous"
Comment choisissez-vous vos invités de 7h50 ? Il y a une grande diversité de profils et la case n'est pas réservée aux politiques.
Ca a toujours été une volonté de France Inter de faire des pas de côté et de ne pas avoir que des politiques à cette heure-là. Toutes les semaines, il y a une réunion de programmation pour la matinale d'Inter. Laurence Bloch Catherine Nayl, Nicolas Demorand, la merveilleuse équipe de programmation du 7/9 et moi, nous nous retrouvons et en discutons ensemble tous les lundis matins. Nous sommes rarement d'accord. C'est un débat permanent. On veut vraiment avoir les meilleurs invités aux meilleures places tous les matins.
La matinale de France Inter est-elle toujours blacklistée par Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ?
Ils ne sont pas encore revenus... Mais c'est un travail de longue haleine.
Il y a des personnes que vous vous interdisez de recevoir ?
Non, personne. Les listes noires, ce n'est pas mon truc.
Vous auriez pu recevoir Eric Zemmour par exemple ?
Oui, j'ai envisagé de le recevoir d'ailleurs. C'est une question qui a été posée dans cette fameuse réunion de programmation. J'aurais pu le faire, dans l'interview de 7h50. Je pense qu'il faut que tous les courants de pensée soient représentés sur le service public. L'un de mes combats personnels sur Inter, c'est de donner la parole à tous. Finalement, pour Zemmour, on a trouvé que le grand entretien qu'il a eu face à Ali Baddou, dans un espace de débat plus long, était le format le plus adapté.
"Je n'animerai pas une matinale seule la saison prochaine"
Statutairement, c'est nécessaire pour France Inter de conserver à tout prix son statut de première matinale de France ?
Oui, bien sûr et nous en sommes fiers. C'est une vraie bagarre, on ne va pas se mentir. C'est une bagarre avec les autres matinales qui sont toutes de très bonne qualité, notamment celles d'Yves Calvi et de Jean-Jacques Bourdin, qui sont nos concurrents les plus directs. Disons que c'est une compétition respectueuse et à la loyale avec les autres matinales.
Ce statut, est-ce la garantie d'être le meilleur endroit pour communiquer pour un homme politique ? On pense bien sûr à l'annonce de la démission de Nicolas Hulot sur France Inter...
Pas forcément. Ce qui est sûr, c'est que la matinale radio est un endroit incontournable pour les hommes politiques puisque ça détermine les reprises qui seront faites le reste de la journée. C'est d'ailleurs toujours l'endroit le plus stratégique pour un politique qui veut communiquer. Aujourd'hui, ils ont un choix pléthorique entre Jean-Jacques Bourdin, Elizabeth Martichoux, Audrey Crespo-Mara et les autres.
Il y a de plus en plus de femmes parmi les intervieweuses. Mais les matinaliers sont tous des hommes. Demorand, Calvi, Aliagas, Fauvelle, Bourdin... Comment l'expliquez-vous ?
Longtemps, les patrons ont pensé que les voix de femmes crispaient les gens. Si je suis honnête, parfois, il m'arrive de me demander si je ne préfère pas être réveillée par la voix d'un homme. Je mesure le degré de sexisme de ma réponse. Mais ça veut dire qu'il y a encore beaucoup de travail pour casser cela. Fabienne Sintès l'a fait sur Info, avec grand talent. Sur Inter, il y a aussi Florence Paracuellos qui présente désormais le journal de 8h. Le journal le plus écouté de France est désormais présenté par une femme, qui plus est talentueuse. Je crois que la féminisation est en marche douce...
Vous pourriez endosser, seule, le costume de présentatrice d'une matinale radio ?
La proposition m'a été faite, sur Inter et sur une autre station. Aujourd'hui, j'ai un enfant en bas âge et ce serait trop compliqué pour l'instant pour moi d'assurer une charge aussi lourde. Ma place au sein de la matinale de Nicolas Demorand me va parfaitement. Donc non, je n'animerai pas une matinale la saison prochaine.
"On ré-entendra parler de Patrick Cohen sur une matinale ou une grosse tranche info d'ici un an ou deux"
Il y a encore deux ans, Patrick Cohen était le roi des matinales. Il est aujourd'hui hors circuit avec deux émissions le week-end. Une chute aussi brutale, ça ne vous fait pas peur ?
J'ai toujours eu conscience de la temporalité cyclique des choses. Tout peut s'arrêter du jour au lendemain. Je doute toujours, je remets en cause ma vie tous les matins, ce qui est d'ailleurs parfois insupportable pour mes proches. Mais parce que je sais que c'est nécessaire. Concernant Patrick, c'est un moment à passer pour lui. Je suis sûre qu'il reviendra par la grande porte. C'est l'un des meilleurs journalistes de Paris. Je pense qu'on ré-entendra parler de Patrick Cohen sur une matinale ou une grosse tranche info d'ici un an ou deux.
Le choix qu'il a fait, quitter le service public pour une station privée, vous pourriez le faire ?
Bien sûr. Depuis quatre ans, j'ai été sollicitée par des radios privées. Je pense qu'il y a une vraie spécificité au service public et qu'il y a une vraie couleur. Mais j'ai commencé dans les chaînes privées. Je n'ai pas de jugement sur ça. Patrick a fait un choix parce qu'il pensait qu'il avait peut-être déjà tout fait sur Inter. Il faudrait lui demander s'il s'en mord les doigts mais je ne pense pas. Et il a raison.
Vous pourriez arrêter la radio pour vous consacrer à vos activités télé ?
Non. J'ai découvert la radio sur le tard mais la liberté que ça représente m'est indispensable. Orson Welles disait que la différence entre le cinéma et la radio, c'est que l'écran est plus large à la radio. Je crois que cette différence s'applique aussi à la télévision. Même s'il y a de plus en plus de radio filmée, il y a toujours une part d'imaginaire forte. Je pense que la radio survivra mieux que la télé.
"J'ai repris du plaisir sur 'L'émission politique'"
La semaine dernière, la première de "L'émission politique" a rassemblé 2 millions de téléspectateurs. L'objectif, c'est de se maintenir à ce niveau ?
Il faut déjà dire que, sur la politique comme sur la Culture, si on ne faisait que se braquer sur les audiences, on ne ferait pas ces émissions-là. Or, ce sont des émissions qui répondent à une mission de service public. Elles sont nécessaires. Sur l'année électorale, en pleine folie politique, la moyenne de l'émission tournait à 2,5 millions de personnes. Hors période électorale, c'est évidemment très satisfaisant de faire ce score et d'être deuxième chaîne de France alors qu'il faisait encore très beau et qu'il y avait une grosse concurrence.
Que signifient les nombreux changements apportés à l'émission en cette rentrée ?
Nous sommes à l'écoute des retours des téléspectateurs. Il y a eu une grosse enquête sur la qualité de l'émission en fin de saison dernière. Le principal reproche, c'est que l'émission était trop séquencée. L'enjeu majeur pour nous, c'est de fluidifier l'ensemble. C'est ce qu'on essaye de faire avec le découpage en trois grandes parties. On a gagné en clarté et on a plus le temps pour creuser les sujets. C'était insupportable pour tout le monde, même pour moi, de passer du coq à l'âne sans arrêt. On réussira en revenant à quelque chose de plus classique, en allant dans le débat profond et moins dans la petite phrase. C'est aussi pour ça qu'on arrête les farces et attrapes, comme l'invité mystère, pour revenir à du temps long.
Et quel bilan tirez-vous de cette première et notamment de l'arrivée de Thomas Sotto, que vous revendiquez comme un choix personnel ?
Tout n'était pas parfait mais j'ai repris du plaisir. L'année dernière, je n'en avais plus vraiment. C'est une émission qui avait été pensée pour deux, avec David. J'avais pris plaisir à la faire avec lui. Après son départ, on n'a rien changé. Cette année, j'ai mis ma patte dans l'émission. J'ai plus le sentiment qu'elle me ressemble. Un de mes choix, c'est effectivement de faire venir Thomas Sotto. Là, le bonheur est immense. Ça me permet une vraie interaction et de ne pas être complètement seule dans la gestion d'une énorme émission de trois heures de direct, sans aucune coupure. Vous savez que "L'émission politique" est une des rares émissions en prime en direct, ce qui est une immense pression. J'avais envie et besoin d'avoir quelqu'un à mes côtés. J'ai eu envie de partager ça avec Thomas Sotto. Ça faisait des années que l'on se suivait avec Thomas. On a eu des parcours très parallèles. Nous sommes de la même génération, parfaitement complémentaires. Les retour des téléspectateurs sur ce duo sont excellents. Je suis ravie que ça se passe aussi bien avec mon binôme de la télé qu'avec mon binôme de la radio. Je préfère être en duo que seule. Sur le bilan global de la première, on va retravailler la partie du grand débat avec les Français, qui a été plus perfectible.
Quid de la séquence de l'invité mystère ? On ne comprend pas trop si elle va revenir...
Disons qu'on ne se l'interdit pas. Ça n'était pas une mauvaise séquence mais ça marchait beaucoup mieux en période électorale avec l'apogée Fillon/Angot qui restera dans les annales de la télé. L'année dernière, ça fonctionnait moins bien car il n'y avait pas un suspense fou. Attendre l'invité mystère, et avoir Jack Lang face à Jean-Michel Blanquer, c'est plus déceptif. Ce sera plus excitant de le faire en période électorale. "L'émission politique" sera aussi plus mouvante désormais. Par exemple, la prochaine ne ressemblera pas forcément à celle de la semaine dernière. Chaque émission sera événementialisée.
"Ce serait bien que le président de la République revienne sur le service public à un moment"
Via notamment la délocalisation en région ?
Oui, ce sera sur la deuxième ou sur la troisième émission. Ce n'est pas encore tranché.
L'une des problématiques que vous allez rencontrer cette année, c'est d'intéresser le public aux Européennes, élections dont ils se désintéressent traditionnellement. Comment allez-vous faire ?
Vous avez raison, c'est un vrai challenge. Mais nous sommes aidés par la situation politique dans le monde et en Europe. Des enjeux très lourds sont posés. C'est le premier test électoral du quinquennat d'Emmanuel Macron. C'est une élection capitale et déterminante sur ce que nous serons plus tard. C'est aussi la première fois qu'il y a un vrai risque de se retrouver avec un parlement européen majoritairement euro-sceptique. Nous sommes dans une période de guerre des idées avec des camps très opposés qui s'affrontent. Je pense qu'il y a un espace et un besoin pour des débats de fond.
Comme l'année dernière, Édouard Philippe était l'invité de la première de la saison. Êtes-vous condamnés à avoir les mêmes invités que l'an dernier ?
Nécessairement car il n'y a pas suffisamment de personnalités d'envergure dans la nouvelle classe politique, ce qui ne nous empêchera pas de recevoir de nouvelles personnalités. Nous sommes en période de transition. Tout cela nous oblige à être plus inventifs. On va donc essayer d'autres choses avec la délocalisation ou la venue de plusieurs invités en même temps. On retrouvera donc les personnalités qui sont venues l'année dernière mais dans un exercice différent.
Emmanuel Macron, qui ne s'est pas exprimé sur le service public cette année, pourrait être l'invité d'une "Emission politique" spéciale ?
Je ne sais pas mais il est évidemment le bienvenu sur le service public mais dans un format qui ne s'appellerait pas "L'émission politique". Je pense que ce serait bien que le président de la République revienne sur le service public à un moment.
"L'année dernière, j'ai pris plus de plaisir à faire 'Stupéfiant !' que 'L'émission politique'"
Il doit s'exprimer devant les Français ce mois-ci. Selon "L'Opinion", il devrait le faire sur RTL. Vous aviez proposé un format à l'Elysée ?
Oui, comme tout le monde. France 2 s'est positionnée bien sûr. Encore une fois, ce serait dommage que le président de la République ne s'exprime pas sur le service public, de la télé ou de la radio.
Serez-vous intégrée au dispositif des soirées électorales de France 2 pour les Européennes ?
Honnêtement, ce n'est pas tranché et c'est un choix de la direction. Cette décision ne m'appartient pas. France 2 compte de nombreuses incarnations légitimes.
Finalement, est-ce que vous prenez plus de plaisir à préparer une interview sur Gauguin ou une interview de Jean-Luc Mélenchon ?
C'est une question piège... (rires)
Je ne vais pas faire de langue de bois. Je dirais que ça dépend des moments. L'année dernière, j'ai pris plus de plaisir à préparer une émission sur Gauguin. Là, en cette rentrée, la politique revient en force, ça ouvre l'appétit. Je reprends un vrai plaisir. Donc, ce serait plutôt du 50/50 cette année.
RETROUVEZ LES GRANDES INTERVIEWS DE RENTRÉE DE PUREMEDIAS :
- Yann Barthès et Théodore Bourdeau ("Quotidien")
- Laurent Ruquier et Charles Consigny ("On n'est pas couché")
- Thierry Ardisson ("Les Terriens" de C8)
- Alessandra Sublet ("C'est Canteloup")
- Julien Courbet ("Capital")
- Camille Combal (Danse avec les stars")
- Bruce Toussaint ("Grand Angle")
- Jean-Baptiste Boursier ("Talk Show")
- Yannick Letranchant (Info de France Télévisions)
- Xavier Gandon (TF1, TMC, TFX, TF1 Séries Films)