Maxime Saada tape du poing sur la table. Mercredi 26 octobre 2022, lors d'une table ronde organisée au Sénat et consacrée au piratage des évènements sportifs, le président du directoire du groupe Canal+ , a fait de la lutte contre l'IPTV - un mode de consommation de la télévision qui se fait via un boitier connecté à Internet - une priorité. Après avoir "tiré un bilan positif" et s'être "réjoui des premiers effets" de la loi sur l'audiovisuel du 25 octobre 2021 (elle renforce le dispositif de lutte contre les plateformes de streaming illégal, ndlr) celui qui est également président de l'Association pour la protection des programmes sportifs (APPS) a fait part de son inquiétude face à la montée en puissance du piratage par IPTV en France.
"Nous ne pouvons nous arrêter aux premiers signaux positifs de la loi Audiovisuel. Nous devons orienter nos actions vers le préjudice majeur causé par l'IPTV", a-t-il indiqué devant la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat. "À la différence du live-streaming qui pirate les contenus, le piratage IPTV attaque lui notre modèle même en vendant des abonnements. Et nous avons de quoi nous inquiéter. Il s'agit d'une utilisation contrefaisante d'objets légaux. À l'instar de boitiers, de smartphones et/ou de télévisions connectées. Ceux-ci sont détournés de leur usage légal lorsqu'une application illégale est téléchargée pour donner accès à des contenus piratés. Ce mode de consommation est particulièrement destructeur", a-t-il insisté.
Maxime Saada s'appuie sur une étude de l'Arcom affirmant que "9% des internautes utilisent de l'IPTV illicite pour regarder les compétitions sportives, ce qui représente 40% des consommateurs ayant des usages sportifs illégaux".
"Des tendances venant confirmer cette étude quant aux rapport de l'usage illicite vers l'IPTV. Nous identifions au quotidien une présence accrue de ses offres d'abonnements illégales sur les réseaux sociaux que nous scanons". Le président du directoire du groupe Canal+ a notamment dénoncé le boom des abonnements à certains de ses services. "Le service premium OTT est ainsi passé de moins de 50.000 utilisateurs mensuels en décembre 2021 à 200.000 utilisateurs en septembre 2022. Le service IPLay est lui passé de 45.000 utilisateurs en décembre 2021 à 145.000 utilisateurs en septembre 2022".
Pour Maxime Saada, "Canal+ doit désormais accélérer sa lutte contre l'IPTV pour ne pas perdre irrémédiablement la bataille des contenus. Ce fléau pourrait véritablement remettre en question les modèles de PayTV en jouant sur une ambiguïté : la difficulté vient que de nombreux utilisateurs ne pensent pas être dans l'illégalité car ils payent une forme d'abonnement. Les outils actuels ne sont malheureusement pas assez efficaces pour atteindre sensiblement le piratage IPTV. L'enjeu n'est pas d'éradiquer le piratage, ne soyons pas dupes, mais il s'agit de trouver le point de sortie viable d'une crise à venir liée à l'IPTV en perfectionnant un outil adapté qui puisse le limiter".
Pour lutter contre ce phénomène, Maxime Saada préconise "un blocage à la source, donc de l'adresse IP". Un modèle qui, selon lui, a fait ses preuves en Angleterre où la Premier League "attribue une baisse extrêmement significative de la consommation IPTV grâce au blocage IP obtenu par voie judiciaire".
Lors de cette table ronde, Maxime Saada n'a pas mis de côté l'importance du blocage des sites illégaux de live-streaming. Selon lui, Canal+ aurait déjà réussi à bloquer "500 noms de domaines" en 2022 et "probablement 600 d'ici à la fin de l'année". Pour 2023, le PDG de Canal+ vise "plus de 1.000 sites bloqués" hors IPTV. "Le piratage est le premier concurrent de Canal+ (...) Nous avons pu identifier les effets (des blocages) sur nos abonnements en remarquant une augmentation de 55% des recrutements sur des journées phares d'événements sportifs par rapport à 2021" s'est-il, tout de même, réjoui.