C'est une polémique qui traverse l'Atlantique. Après un été médiatique focalisé sur le burkini, le "New York Times" a invité, via un article datant du 22 août, les femmes musulmanes en Europe à témoigner. Le 2 septembre dernier, dans une version française et anglaise, le journal a publié dans ses colonnes un recueil de témoignages de femmes d'origine musulmane de tout âge, dont la majorité réside en France et en Belgique. Selon le "NYT", plus de 1.000 réponses ont été reçues, décrivant le quotidien "difficile" de celles qui portent un voile ou un burkini à la plage.
A la suite de la publication de cet article, Manuel Valls a tenu à riposter par une tribune, écrite dans les deux langues et mise en ligne sur le "Huffington Post" français hier. Selon le Premier ministre, l'article du "New York Times" "donne une image insupportable, car fausse, de la France, pays des Lumières et pays des libertés." "Ce que je conteste avec la plus grande vigueur, c'est que la journaliste donne la parole à des femmes de confession musulmane en prétendant que leur voix serait étouffée, et ce, pour dresser le portrait d'une France qui les oppresserait", a-t-il expliqué, ajoutant que la reporter "n'explique pas ce que sont les principes républicains : liberté, égalité, fraternité, et la laïcité à la française."
Après avoir repris quelques citations des témoignages de l'article du quotidien américain, le locataire de Matignon a jugé qu'un seul "point de vue" a été exprimé à travers les récits de vie : "Mais l'exigence aurait dû porter la journaliste du 'New York Times' à interroger l'immense majorité des femmes musulmanes qui ne se reconnaissent pas dans une vision ultra-rigoriste de l'Islam". Manuel Valls affirme que l'article n'est pas "une enquête de terrain" et que les "témoignages ont été pour la plupart obtenus à la suite d'un événement scandaleux organisé en France : un 'camp d'été décolonial'". Ce colloque qui s'est déroulé cet été à Reims avait pour but de faire débattre les personnes dites "racisés", ou "non-blanches".
Face à ces attaques, le "New York Times" a répondu dans la foulée au chef du gouvernement, dans un second article intitulé "Le Premier ministre français reproche au 'NYT' de donner la parole aux femmes musulmanes" et qui ne mentionne à aucun moment le colloque de Reims évoqué par Manuel Valls. "Notre histoire a été rigoureusement écrite et basée sur les réponses de plus de 1.200 lecteurs à la suite d'un appel aux témoignages en ligne, rédigé en anglais, en français et en arabe, demandant l'opinion des femmes musulmanes en Europe, après l'interdiction du burkini", s'est exprimée la porte-parole du journal, Danielle Rhoades Ha, concluant que la rédaction "soutient cet article".