Lorsque la chanteuse Lio se prête au jeu de l'interview, elle y va cash. Dans un entretien accordé au quotidien "Libération", l'interprète du titre "Les brunes ne comptent pas pour des prunes" a évoqué le moment vécu en télévision où elle a pris conscience de la nécessité de son engagement féministe. "Quelque chose de très puissant m'a fait avancer", a-t-elle repris.
"En 1987, j'ai accepté de compléter un plateau télé au pied levé, en plein mois d'août. À l'époque, j'avais une image de lolita, qui certes avait grandi, mais était désirable. Je jouais beaucoup avec ça, car je pensais que c'était un jeu", a rembobiné l'artiste de 61 ans. Enceinte, elle se rend dans les studios de ce programme du petit écran. "J'avais pris 26 kilos, j'étais grosse comme une baleine. J'ai blagué à l'antenne sur le moment où on allait manger, pensant mon micro coupé", évoque-t-elle encore.
Ce moment aurait été fatidique pour la carrière de la chanteuse. "Dès le lendemain de l'émission, ma maison de disques m'a dit que c'était terminé pour moi : j'avais foutu en l'air mon image de sex-symbol." L'artiste dit tout de même avoir reçu de nombreux courriers de soutien après la diffusion du programme. Par écrit, des femmes, par centaines, la remerciaient. "Quand j'en ai lu plusieurs centaines qui racontaient la même histoire, j'ai compris que ça n'était pas lié à moi. Que c'était un système, qu'ils ne nous aimaient pas. Qu'ils étaient prêts à tout mettre en place pour nous annihiler. (...) Nous sommes des résistantes."
Lio est aussi revenue sur son engagement pour défendre Marie Trintignant, tuée il y a vingt ans par Bertrand Cantat. Ses prises de positions avaient mené à un clash très médiatique avec l'autrice Muriel Cerf en 2003 sur le plateau de "Tout le monde en parle" présenté par Thierry Ardisson sur France 2. "Quand j'ai pris la parole, je n'ai reçu pratiquement aucun soutien, si ce n'est d'Antoinette Fouques. Je suis tombée, j'ai tout perdu. Certains sont allés jusqu'à prétendre que j'avais touché de l'argent, jusqu'à me comparer à une 'hyène de service', jusqu'à dire qu'on en arrivait à comprendre le mec qui m'avait cassé la gueule."
Elle conclut en demandant qu'aucun honneur ne soit rendu aux hommes coupables de viol. "J'aimerais saluer le courage d'Adèle Haenel et Céline Sciamma quand elles ont quitté les César. Bertrand Cantat peut écrire pour d'autres, sans monter sur scène, sans qu'on l'applaudisse. Et à ceux qui disent qu'il a payé sa dette, j'ai envie de dire : quatre ans de prison, c'est ce que vaut la vie d'une femme ?"